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Kronik-KC Ranzé

L’argent…

23 février 2025, 08:57

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L’argent…

Quand j’ai lu le constat no 133/2025 de l’Occurrence Book de la CCID de samedi dernier, détaillant ce qui avait été trouvé et saisi chez M. Oomah Chandradeo, le comptable de My Holidays, je me suis dit que cela ressemblait beaucoup à des restes de voyage à l’étranger, des restes de per diem en particulier; cette verrue typique des voyages d’affaires qui fascine tant ceux qui y ont droit. Il y avait des billets en euros, en dollars américains et singapouriens, quelques billets de livres sterling, de rands, de francs CFA, de roupies indiennes, de dirhams. Une boîte en carton griffée Romeo y Julieta suggère le cigare (surprise !), un reçu de Pandora Dubai indique des bijoux féminins, un reçu du Royal Club de New Dehli révèle des achats de blouses et de saris. Il y avait sept montres, Cartier et Rolex, que l’on achète, peut-on supposer, parce que c’est moins encombrant que des liasses de billets ? Après tout, même les ambidextres ne peuvent porter que… deux montres et tous les téléphones cellulaires affichent pourtant déjà l’heure ! Les récépissés d’hôtels confirment qu’il ne s’agit pas d’un monde ordinaire…

Et puis, il y avait des pièces plus intrigantes : 2 662 billets de Rs 1,000, 300 de Rs 2 000 et 556 de Rs 500, ça ne ressemble plus à des «restes de voyage» et encore moins à des «restes de per diem»… Une enveloppe blanche déjà ouverte adressée à «Son Excellence M. Pravind Kumar Jugnauth, Premier ministre de la République de Maurice» fait tiquer par sa veulerie. Une autre enveloppe de couleur blanche (on ne dit pas si elle est ouverte, celle-là) au nom de Ms Jugnauth. Heureusement que les enveloppes sont blanches ! Si elles avaient été grises, vous imaginez les soupçons ? Mais tout de même, la désinvolture avec laquelle on laisse autant de roupies traîner dans une valise, cela suggère au moins cynisme et surabondance. Mais vous savez, depuis que les coffre-forts ont été dévalorisés, on se rabat forcément sur ce qui marche, littéralement. Sur du plus mobile quoi !

Nous n’avons pas encore vu le détail de ce que contenait les autres valises, mais si les policiers savent compter, il y en aurait pour Rs 114 millions et plus. De l’argent désormais… orphelin ! Le dépositaire principal, Josian Deelawon, dit que les valises que l’on a retrouvées à son bureau, lui ont été confiées pour Pravind Jugnauth après une rencontre avec ce dernier, le 21 novembre dernier au Maradiva. Le facteur/convoyeur aurait été l’ancienne deputy mayor de Vacoas-Phoenix.

La police et la FCC soupçonnent qu’il y a d’autres dépositaires chez qui dorment des valises similaires. S’ils existent, ces dépositaires auraient peut-être intérêt à se prévaloir des articles 48 et 49 de la Prevention of Corruption Act pour rapidement devenir des whistleblowers protégés par la loi, plutôt que de porter le chapeau de receleur averti, comme MM. Deelawon et Oomah. Les dépositaires de valises sont restés longtemps en prison. Les propriétaires de valise, pas.

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Donald Trump n’a pas fini de nous étonner. Deux pays, la Russie et l’Ukraine, sont en guerre aux portes de l’Europe. La Russie, pays envahisseur de son voisin, est sous l’effet de sanctions majeures de l’Europe, de l’Amérique et de leurs alliés. Trump trouve cependant approprié de discuter de l’avenir de l’Ukraine directement avec Poutine ; l’Ukraine et l’Europe n’ayant pas eu voix au chapitre jusqu’ici !

On peut mieux comprendre la démarche depuis peu, puisque le businessman qu’est Trump est à la recherche d’un «deal» avec l’Ukraine. Dans son approche purement transactionnelle, il aurait exigé, en contrepartie d’un soutien militaire continu, un accord avec l’Ukraine pour $ 500 milliards de terres rares (rare earths), ces minerais effectivement extrêmement rares, qui sont essentiels pour les véhicules électriques, les lasers, les cellulaires, les aimants puissants ou les convertisseurs catalytiques. Ce montant de $ 500 milliards est bien plus important que l’aide accordée par les ÉtatsUnis jusqu’ici, soit $119 milliards. Bien sûr, puisque c’est un «deal», je vous dis.

Il y a cependant quelques «hics» à ce plan.

Pour commencer, environ 40 % des «terres rares» de l’Ukraine se retrouvent dans les régions occupées par la Russie à l’Est de l’Ukraine. Ensuite, l’Ukraine fait ressortir qu’un accord stratégique sur cette ressource a déjà été signé avec l’Union européenne en 2021, ce qui met les alliés américains et européens en opposition ! Il y aussi l’exigence de Zelensky que tout accord avec les Américains doit être assorti de garanties explicites pour la sécurité future de l’Ukraine. Si les investissements miniers US éventuels sont défendus par des soldats américains, est-ce que cela suffira pour les Ukrainiens ou est-ce que l’engagement de l’OTAN (que les Russes abhorrent) va être exigé ? Finalement, la Russie elle-même lorgne ces ressources minières avec appétit ! Il se pourrait même que ses motivations déclarées…d’invasion en 2022, c’-à-d son désir d’éteindre le nationalisme ukrainien, de renforcer son équation sécuritaire et de retrouver un peu de l’empire russe d’avant la Perestroïka, cachaient en fait un fort penchant de… terres rares!

On comprend alors mieux la nécessité du dialogue direct Trump-Poutine…

L’Ukraine possède 22 des 50 «terres rares» qui sont jugées critiques par les États-Unis et les autres. Le pays est particulièrement riche en graphite (dont l’Ukraine détiendrait 20 % des ressources mondiales), le lithium, le béryllium, le titane et l’uranium. On discute ces jours-ci non pas de paix, de sécurité future et de reconstruction, mais plutôt (c’est l’histoire du monde et l’on ne s’en sort décidemment pas…) de dollars et de transactions commerciales !

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Un sujet que je répète souvent et que l’on veut de moins en moins confronter à travers nos lunettes court-termistes : Comment va-t-on faire pour payer nos importations dans les années futures ?

Les chiffres sont accablants. Pour faire disparaître le problème, pourrait-on simplement détourner notre regard ?

Et pourtant, il faut quand même entrouvrir, ne serait-ce qu’un œil !

En ce mois de décembre 2024, le déficit commercial du pays, déjà mauvais, s’est détérioré de 34,9 % par rapport à l’année précédente. Les importations de ce mois étaient de Rs 31 milliards, soit Rs 6 milliards de plus qu’un an plus tôt. Par contre, les exportations baissaient de Rs 9,4 milliards à Rs 8,7 milliards…

Un mois ne reflète pas une tendance ? C’est vrai ! Mais l’année 2024 va se solder (les chiffres de Statistics Mauritius sont provisoires) par Rs 317 milliards d’importations, couverts à seulement 35 % par des exportations…

Un an ne reflète pas une tendance non plus ? Bien sûr ! Mais le document State of the Economy (page 7) aide à souligner que si les exportations de marchandises ont évolué de Rs 82/105,5/ 103,9 à 110,1 milliards (+34 %) en 2021/22/23 et ‘24, les importations ont, quant à elles, explosé de Rs 194,3/265,4/266,8 à 317 milliards (+63 %) sur la même période ! Le taux de couverture de nos importations est ainsi passé de 42,2 % en 2021 à 34,7 % en 2024… Dans une période, ironie suprême, où la roupie faiblissante était supposée dynamiser les exportations et rendre les importations plus chères!

Il est vrai que nous avons un apport non négligeable de devises à travers la vente de nos «services» (tourisme, services financiers, FDI, etc.), mais à l’évidence, cela ne suffit pas, les Rs 88,3 milliards apportés par les «services», nous laissant un trou, c’-à-d une insuffisance de devises, de Rs 74,6 milliards en 2023, à la balance des comptes courants, GBC dûment comptabilisé. Cette insuffisance de devises était de Rs 77 milliards en 2021 et de Rs 85 milliards en 2022. Qui prévoit une amélioration en 2024 ? Ce qui est certain, c’est que le déficit de la balance commerciale qui s’aggrave ne va pas aider et que c’est LÀ que le bât blesse vraiment…

Mais tiens! (avec le sourire aux lèvres…) ! Ne sait-on pas quel est le remède de cheval que l’on doit adopter face à une lourde balance commerciale déficitaire, depuis le retour de Trump aux affaires ? Ne sait-on pas ce qu’il faut faire à ces pays, tant amis qu’ennemis, qui «exploitent» cyniquement notre économie et notre marché intérieur, en nous exportant trois fois plus que nous ne leur exportons ? La potion magique, bien sûr, ce sont les tarifs de Trump !

Il suffira de demander gentiment à ce monsieur comment il est possible, ce faisant, de ne pas pénaliser le consommateur américain/mauricien, comme il le prétend toujours. Selon lui, c’est le pays qui exporte plus qui paie ce tarif apparemment. Alors que les plus futés vous diront que seul le trésor public encaisse… pour, par exemple, réduire la taxe de ceux qui en ont déjà trop aux États-Unis…

Mais comme c’est un transactionnel, il ne voudra sûrement pas nous demander plus que Diego, gratuitement comme Gaza, pour nous passer sa formule ?