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Carburants : pourquoi les prix ne baissent pas
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Carburants : pourquoi les prix ne baissent pas

■ Kreshan Purmah, president du «Petroleum Pricing Committee». © Kiranchand Sookrah
Oublions les promesses électorales. Et rentrons dans les dures réalités. D’une part, celles du marché mondial, d’autre part, les impératifs locaux. Les prix des carburants sont calculés selon des critères préétablis qui existent depuis 2011, explique Kreshan Purmah, président du Petroleum Pricing Committee (PPC). «C’est un calcul sans émotions, où il n’y a rien de politique», précise le technicien. Pour sa première fois en tant que président du PPC, il a souhaité vulgariser le processus.
Le vendredi 12 avril, le ministère du Commerce – suite à la réunion trimestrielle du PPC – a annoncé que les prix des carburants restent inchangés. Pourquoi, malgré une baisse des prix des carburants sur le marché mondial, cela n’est pas répercuté sur les prix à la pompe, demande le consommateur ? Le contribuable devant se contenter de la baisse de Rs 5 par litre d’essence et de Rs 5 par litre de diesel, en vigueur depuis le 12 décembre 2024.
«Dans un langage simple», Kreshan Purmah détaille d’abord qui prend la décision du prix qui sera pratiqué et comment le prix est calculé. Le calcul des prix des carburants concerne trois «instances indépendantes» : tout d’abord, la State Trading Corporation (STC), qui est responsable de l’importation et la distribution aux grossistes. «C’est la STC qui calcule le prix.» Ensuite, le PPC «doit vérifier que le prix calculé par la STC respecte les critères établis et que tous les chiffres soient documentés pour certifier qu’ils sont exacts. Le PPC peut dire qu’il n’est pas d’accord avec les chiffres de la STC.» Une fois que le PPC a confirmé le prix soumis par la STC, celui-ci est transmis au ministre du Commerce, actuellement Michaël Sik Yuen. «C’est lui qui décide d’approuver ou non le chiffrefinal qui sera payé par le consommateur.»
Point de départ du calcul : le prix auquel la STC a acheté sur le marché mondial. «La STC achète pour une période spécifique d’un mois à six semaines.» Mais «on n’utilise pas le prix d’achat de la STC pour cette période spécifique», précise le président du PPC. Par exemple, pour avril, c’est une moyenne du prix des trois mois précédents – de janvier à mars – et des trois mois à venir – mai, juin et juillet – qui est calculé. La moyenne sur six mois ainsi obtenue est comparée au prix du mois précédent sur le marché mondial «et on travaille sur le prix le plus fort. C’est une mesure de prudence. Si demain les prix fluctuent à la hausse, c’est le consommateur qui va perdre. Dans tous les cas, c’est le consommateur qui paie et personne d’autre».
Pour calculer la moyenne, la référence utilisée est la plateforme internationale de la société Platts, un site d’information sur le cours mondial du pétrole. «Il n’y a pas de bias concernant les prix de référence.» Sauf qu’à l’achat sur le marché mondial, ce n’est pas au prix de référence. «Il y a un premium en dollars qui est ajouté par le vendeur international. Nous essayons de négocier pour obtenir le meilleur prix.» Dessus, il faut ajouter le fret pour transporter les carburants jusqu’à Maurice, ainsi que l’assurance pour couvrir le transport. C’est ce qui donne le prix Cost, Insurance, and Fret (CIF). Ce prix CIF en dollars est converti en roupies. Et le prix par litre est alors obtenu.
Simplifier le calcul
À ce prix par litre en roupies, on ajoute alors les taxes locales : l’excise duty, la contribution à la Road Development Authority pour l’entretien des routes. Il y a aussi la contribution pour le stockage des carburants à Maurice, et une autre pour le transport et le stockage des carburants à Rodrigues. Sans oublier la contribution des automobilistes à la subvention sur le prix du riz ration, de la farine et du gaz ménager. «Il y a aussi les dépenses opérationnelles de la STC.» À la fin de toutes ces additions, «nous obtenons les prix des carburants qui seront vendus aux grossistes».
Prochaine étape : on ajoute la marge pour les grossistes. Ce n’est pas fini. Il faut aussi ajouter la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). «Nous arrivons au wholesale price.» Au wholesale price, cette fois on ajoute la marge des détaillants. Pour arriver au prix final. «Si ce prix final varie de moins de 4 % par rapport au prix du mois précédent, il n’y a pas de changement dans les prix de carburants. C’est ce qui s’est passé cette fois pour l’essence.»
Dans le cas du diesel, la variation est de plus de 4 %, alors pourquoi il n’y a pas de fluctuation du prix à la pompe ? Cette fois, il faut regarder en direction du Price Stabilisation Account (PSA), explique Kreshan Purmah. À chaque fluctuation, le surplus est versé au PSA et le déficit est puisé du PSA. «Si le PSA affiche une balance positive de Rs 300 millions pour l’essence, pour le diesel, le déficit est de Rs 3,1 milliards. Quand le PSA est déficitaire, même si la hausse du prix est de plus de 4 %, on ne peut rien faire. Nous devons réduire le déficit.»
Que s’est-il passé en décembre 2024, quand les prix de l’essence et du diesel ont baissé ? «L’excise dutya été ajusté. C’était une décision gouvernementale.» Sauf que cette décision ne peut être maintenue à cause du déficit au niveau national. L’agence de notation Moody’s, qui établit un classement de la santé financière de chaque pays, a indiqué que si Maurice ne fait rien pour contrôler son déficit, le pays risque d’être classé comme «junk. Conséquence : les institutions bancaires n’auront plus confiance dans le pays. Ce serait catastrophique. Imaginez si la STC qui doit acheter des carburants n’arrive plus à transférer des devises».
Au-delà du calcul tous les quatre mois, le président du PPC confie avoir discuté de la grille, «pour ne pas rester dans le superficiel et simplifier le calcul». Parmi les pistes lancées : «Est-ce qu’on doit garder le subside de Rs 7,20 sur l’essence ? Pourquoi ne pas transférer cela sur le prix du riz ration, de la farine et du gaz ?» Autre suggestion : augmenter la road tax au lieu d’alourdir le prix de l’essence. «C’est au niveau du gouvernement de juger à partir de toutes les implications, pour le bien des consommateurs et pour rendre le calcul plus transparent et simple.»
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