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Fraude internationale de Rs 450 millions

Une Chinoise au cœur du démantèlement d’un réseau de blanchiment par la FCC

10 mai 2025, 15:00

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Une Chinoise au cœur du démantèlement d’un réseau de blanchiment par la FCC

■ Yuanyuan Yang, alias «Jessica», complice présumée d’un vaste réseau de blanchiment international. © Aurélio Prudence

L’enquête sur la fraude électronique impliquant l’Ukrainien Yevhen Syvokon et le Mauricien Neervisingh Ramdenee prend de l’ampleur avec l’ajout d’une troisième personne. Yuanyuan Yang, une ressortissante chinoise, résidant à Choisy-les-Bains, serait selon la Financial Crimes Commission (FCC) l’une des principales complice dans un vaste réseau de blanchiment d’argent lié à une fraude estimée à Rs 450 millions.

Arrêtée par les policiers de la FCC, le jeudi 8 mai 2025, pour des soupçons de blanchiment d’argent selon la Financial Crimes Commission Act, Yuanyuan Yang a été présentée, le jour même, devant la cour de district de Pamplemousses. Provisoirement inculpée, elle a été libérée sous caution fixée à Rs 100 000, assortie d’une reconnaissance de dette de Rs 500 000. Elle devra désormais respecter plusieurs obligations : résider à une adresse fixe, se présenter quotidiennement au poste de police le plus proche entre 6 et 19 heures et rester joignable à tout moment pour les besoins de l’enquête.

Selon les investigations, Yuanyuan Yang, qui opérait sous le pseudonyme «Jessica», utilisait une agence immobilière fictive – légalement enregistrée mais non opérationnelle – comme façade pour recycler les fonds provenant d’escroqueries. La FCC a découvert une douzaine de faux contrats de vente immobilière impliquant des «acheteurs» étrangers, identités de couverture destinées à simuler des acquisitions de villas dans des complexes de luxe à Maurice.

Les fonds frauduleux provenaient de plateformes telles que celle gérée par Syvokon et Ramdenee au nom de «Strike on Line». Ciblant notamment des investisseurs en cryptomonnaies – principalement des citoyens français, belges, luxembourgeois et britanniques, séduits par des campagnes de marketing digital sur les réseaux sociaux – les victimes pensaient réaliser des placements sur une plateforme légitime. Une fois convertis en Bitcoin, ces fonds étaient détournés vers des comptes bancaires en ligne au Royaume-Uni, ouverts au nom de clients fictifs de l’agence de Yang. L’argent était ensuite retiré en liquide, une partie étant reversée à Syvokon et ses complices.

Lors d’une perquisition effectuée, mercredi soir, au domicile de Yang, la FCC a saisi un total de Rs 1,8 million en devises diverses. La somme était répartie comme suit : Rs 408 000, 14 000 euros, 9 269 dollars américains, 400 livres sterling, 5 000 francs suisses, 3 300 yuans chinois.

Ces fonds proviendraient directement des opérations frauduleuses. L’analyse forensique a également révélé des échanges de communications entre Syvokon et Yang, confirmant leur étroite collaboration au sein du réseau.

L’enquête met aussi en lumière le rôle de Neervisingh Ramdenee, qui aurait créé un centre d’appel fictif, jamais enregistré auprès du Registrar of Companies. Ce centre, dont les employés étaient payés en espèces, servait d’intermédiaire pour contacter les victimes, d’abord pour leur proposer des investissements, puis pour les inciter à payer des frais supplémentaires visant à «récupérer» leurs fonds perdus – somme qui ne leur était jamais restituée. D’après les témoignages, c’est Syvokon lui-même, accompagné de deux gardes du corps, qui distribuait la paie en liquide aux employés à chaque fin de mois.

L’affaire prend aujourd’hui une dimension européenne. La FCC collabore étroitement avec la National Crime Agency (NCA) du Royaume-Uni afin d’évaluer l’ampleur de la fraude sur le territoire britannique et d’identifier l’ensemble des victimes. Par ailleurs, les autorités examinent les conditions dans lesquelles Syvokon et Ramdenee ont obtenu leur permis d’occupation délivré par l’Economic Development Board, ainsi que leurs documents d’immigration. Une question demeure en suspens : les personnes mentionnées dans les faux contrats immobiliers existentelles réellement et les acquisitions sont-elles authentiques ou s’agitil simplement de montages fictifs visant à blanchir de l’argent ?

Cette affaire illustre la sophistication croissante des réseaux de fraude transnationale, capables de tirer parti des failles réglementaires et technologiques à grande échelle, pour orchestrer des opérations de blanchiment d’argent internationales d’une envergure considérable.