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Manière de voir
Qui sommes-nous ?: morisien to rasinn pou aret brile si to anvi
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Manière de voir
Qui sommes-nous ?: morisien to rasinn pou aret brile si to anvi

Il aura fallu quelques décennies pour que tous les grands partis politiques admettent enfin qu’un citoyen mauricien n’aura plus à décliner à quelle communauté il appartient, notamment pour des élections générales. Tous, et surtout les jeunes, devront se réjouir de cette avancée vers le mauricianisme. Tous les prétextes étaient bons pour renvoyer une telle décision aux calendes grecques.
Refrain repris à satiété : nous ne sommes pas assez mûrs ! Le Premier ministre l’a officiellement annoncé au Parlement. Vite, tournons cette page, car il reste encore un long chemin à parcourir. Mais cette chronique apporte de bonnes nouvelles.
L’ethnicité
D’où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Abiolabs (lire plus loin) répond à toutes ces questions existentielles.Certains les posent ouvertement, d’autres en cachette ou alors évitent ce sujet tabou dans notre société pleine de préjugés.
Il faudrait être hypocrite pour ne pas reconnaître que cette appartenance ethnique conditionne la vie familiale, culturelle, professionnelle, voire quotidienne. Pourquoi des citoyens mauriciens ont-ils longtemps voulu ignorer ou cacher leurs racines ancestrales ? Mystère.
Notre comportement social le prouve. Vous connaissez certainement ceux qui mettent en avant leur ascendance européenne avec fierté. Ils mettent de côté une origine asiatique (quid des enfants naturels ou nés suite aux droits de cuissage ?) ou encore plus afro-malgache. Quelle horreur ! Des préjugés longtemps entretenus.
Heureusement qu’avec le temps, le sort réservé aux Afro-Mauriciens s’améliore, mais lentement. Ils ont longtemps accepté cet état. Ils avaient même cultivé un complexe d’infériorité difficile à déraciner. De nos jours, à l’instar des Américains noirs, ils arborent fièrement leur négritude («Nègres de préférence» a écrit le poète Édouard Maunick). Ils affichent la couleur de leur peau comme un portedrapeau, reprenant la célèbre chanson de James Brown «Say it loud, I’m black, I’m proud» et leurs cheveux crépus. D’ailleurs, il n’y a aucune différence entre un cheveu crépu et un autre cheveu.
Ils ont longtemps été cantonnés à des tâches inférieures comme bonnes à tout faire, pêcheurs, artisans (menuisiers, charpentiers, maçons) ou encore videurs. Ils sont en partie responsables de cette ségrégation en entretenant des mythes comme paresseux, soular, zougader et autres débardeurs. Ils ont trop longtemps négligé l’éducation et l’instruction de leurs progénitures. Les exceptions sont peu nombreuses.
Nous avons assisté à leur lente prise de conscience. Ils ont enfin viré casaque. Une minorité pousse le bouchon jusqu’au rastafarisme. La musique a joué un rôle essentiel dans leur devenir. Le séga ravanne est maintenant reconnu, même sur le plan international, et aussi l’avènement du reggae avec un prophète à la stature mondiale, Bob Marley, et les paroles de ses chansons brûlots. Simultanément, la langue créole gagnait du terrain pour pénétrer écoles, Parlement, littérature.
Pena bare! N’oublions pas qu’un Mauricien 100 % pur race, donc de souche, ça n’existe pas. Maurice est une île volcanique sur laquelle des hommes venus d’ailleurs se sont installés pour donner naissance à une nouvelle nation de sangs mêlés.
Au fil du temps, nous avons même inventé des néologismes tels que milat, ti kreol, gro kreol, madras batize, ti nasion, gran nasion, kreol sinwa, popilasion zeneral etni indefinisab, tol ini ou kanelé, tout en accolant des épithètes, mais n’en rajoutons pas.
Les vraies racines
Ce serait un vrai bordel s’il fallait soumettre toute la population à des tests ADN. Une utopie. Alors, il faut se réjouir de l’implantation à Maurice d’Abiolabs, une institution scientifique et crédible. Tout citoyen, selon son bon vouloir, pourra avoir recours à ses services. Moyennant paiement, cette institution peut procéder à des analyses génétiques de pointe. C’est l’exploration des origines ancestrales et du patrimoine génétique. Le tout avec rigueur et en respectant des normes internationales. En résumé, révéler notre vraie identité.
Rien à craindre. Confidentialité garantie. Les données récoltées seront protégées et stockées dans des serveurs sécurisés. Seul le citoyen-client pourra y accéder, voire les faire supprimer. Des analyses fiables. En outre, des consultants en génétique seront à disposition pour interpréter ces données et répondre à toutes les questions. Cet outil tombe à point nommé au moment où le communautarisme semble reculer, comme le prouvent les résultats des dernières élections générales. Globalement, on n’a pas voté «pou nou bann», mais contre l’ancien régime, sans trop faire attention à l’appartenance ethnique des candidats élus. Promesse d’avenir ou rejet momentané ?
Beaucoup hésiteront avant de se livrer à ces analyses. Reste à savoir quel en sera le coût. La diaspora sera la bienvenue, d’autant qu’Abiolabs veut s’imposer comme leader des services génétiques dans l’océan Indien. D’où venonsnous ? Qui sommes-nous ? Notre passé va-t-il encore jouer sur le présent et sur notre avenir ? Enfin des réponses ?
Il y va de notre identité perdue, peut-être, mais aussi, sans doute, retrouvée.
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