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Rakesh Bhuckory se joint à la politique après son limogeage

27 janvier 2023, 20:30

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Rakesh Bhuckory se joint à la politique après son limogeage
  •  Il confirme que Navin Ramgoolam retrouvera son ancien fief lors des prochaines générales

Il n’est pas rare qu’à la veille des élections générales, un fonctionnaire démissionne de son poste pour se porter candidat. Par contre, le cas de Rakesh Bhuckory, deputy high commissioner au ministère des Affaires étrangères interpelle. Ce haut fonctionnaire était encore en poste il y a un mois. Le vendredi 20 janvier, il a présidé une réunion privée que le Parti travailliste organisait à Solitude. Une présence très remarquée car il était très à l’aise dans ce rôle, nouveau pour lui. Il a d’ailleurs charmé de nombreuses personnes. Nous l’avons rencontré pour mieux le connaître.

Rakesh Bhuckory a été fonctionnaire pendant 28 ans. Il a été contraint de prendre sa retraite par la Public Service Commission (PSC) à la suite de plaintes portées contre lui par son chef hiérarchique, soit le Secretary for Foreign Affairs (SFA), Haymandoyal Dillum. Depuis 2021, Rakesh Bhuckory le poursuit pour abus de pouvoir, abus d’autorité et harcèlement. Quand il a été mis à la retraite forcée fin décembre, il a porté plainte auprès du Public Bodies Appeal Tribunal (PBAT). Et s’il n’obtient pas satisfaction, il envisage des poursuites au civil.

Une fois poussé vers la porte de sortie avant le moment prévu, Rakesh Bhuckory avait pensé à émigrer en Angleterre car, à 53 ans, il croit qu’il a encore une carrière devant lui. Entretemps, cet habitant de Triolet a fait part de ses misères à Ranjiv Woochit, député de la circonscription de Pamplemousses/Triolet et surtout à Navin Ramgoolam, leader du PTr. Ce dernier lui a conseillé de rester à Maurice et lui a demandé d’être son campaign manager dans la circonscription no 5. C’est la raison pour laquelle Ranjiv Woochit l’a incité à faire son baptême du feu en politique le vendredi 20 janvier.

Mais sera-t-il candidat aux prochaines élections générales ? «Écoutez, j’ai une tâche à accomplir pour le moment. Laissez-moi me consacrer à ce travail et on verra plus tard.»

Un riche parcours

Si Rakesh Bhuckory a rejoint la fonction publique il y a 28 ans – il a été éducateur au collège Droopnath Ramphul et assistant secretary (AS) à la National Developement Unit (NDU), qui était rattachée au bureau du Premier ministre –, il a ensuite été affecté au ministère des Affaires étrangères pendant ces 26 dernières années.

Nommé second secrétaire en 1996, deux ans après, il a été appelé à travailler à New-York. Parmi les souvenirs tristes gravés dans sa mémoire, il cite l’attaque terroriste contre le World Trade Centre (WTC) qu’il a vécue en direct.

Rakesh Bhuckory est quelqu’un qui aime étudier. Il a obtenu une première maîtrise en relations internationales en 2001. De retour au pays, il a repris son poste au ministère mais a été en conflit avec le Secretary for Foreign Affairs (SFA) de l’époque, soit Vijay Makhan. Il dit avoir voulu s’élever contre une injustice car Vijay Makhan entendait changer le mode de promotion. «J’ai toujours été un homme de principes et je n’ai jamais hésité à élever la voix quand je constate qu’il y a une injustice non seulement contre moi mais contre n’importe lequel de mes collègues.»

Après les élections de 2005, il s’est retrouvé à la haute commission de Maurice à Londres en compagnie d’Abhimanu Kundasamy, qui avait été nommé haut-commissaire. «C’est là que j’ai eu davantage l’occasion de démontrer mes talents de diplomate en allant négocier avec de grosses entreprises britanniques pour les inciter à venir investir à Maurice, d’autant que durant cette période, les quotas sucriers et de textile pour l’île étaient menacés.» Il est fier d’être parmi ceux qui ont permis à Maurice de voir le taux d’investissement britannique grimper considérablement. Mais sa plus grande satisfaction comme diplomate à Londres, c’est d’avoir pu négocier avec l’université de Glasgow pour que des boursiers mauriciens obtiennent quatre sièges, soit deux pour des études en médecine et deux autres en dentisterie, au sein de cette prestigieuse institution. Et pendant qu’il était toujours en Grande-Bretagne, il a suivi d’autres cours et obtenu d’autres maîtrises, notamment en études diplomatiques, en Management Organisation and Governance de la London School of Economics. Des cours qu’il a payés de sa poche. Sa plus grande fierté, c’est qu’il détient un Sloan Master in Leadership and Strategy de la London of School of Business. Selon lui, parmi les Mauriciens ayant obtenu cette maîtrise, il y a Antoine Seeyave et Nita Deerpalsing.

Rakesh Buckhory a aussi été envoyé en mission à la Silicon Valley où il a pu se familiariser à Google et Twitter.

Victime de la hiérarchie

Comme à chaque changement de gouvernement, des diplomates, même ceux de carrière, sont rappelés à Maurice, cela a été son cas. Et il trouve que c’est tout à fait normal. Toutefois, si ses relations avec les ministres des Affaires étrangères Etienne Sinatambou, Vishnu Lutchmeenaraidoo, Nando Bodha et Alan Ganoo ont toujours été correctes, il pense qu’il a été victime de son chef hiérarchique. «Souvent, ceux qui occupent le poste de SFA ont pris des positions contre moi et lorsque je leur ai demandé d’en connaître les raisons, leur seule réponse a été qu’ils ont reçu des instructions à cet effet en haut lieu !»

D’ailleurs, il a eu maille à partir avec l’actuel SFA et c’est ce dernier qui aurait recommandé à la PSC de le limoger. D’où ses poursuites contre son ancien supérieur hiérarchique. Il dit aussi s’être vu refuser un study leave, qui est un congé sans solde, de même qu’un emigration leave alors de nombreux autres fonctionnaires obtiennent ces privilèges. Il dit n’avoir jamais compris pourquoi il n’a pu en bénéficier au même titre que les autres. Rakesh Bhuckory soutient qu’il a toujours fait son travail au mieux de ses capacités, et qu’un de ses plus grands défis professionnels a été quand ses collègues et lui ont été appelés à rapatrier des Mauriciens bloqués à l’étranger lors de la pandémie du Covid-19, en particulier ceux qui étaient en Inde. «Je n’ai pas hésité à demander à la grande famille des Rotariens, dont je fais partie, de contribuer à l’achat de tests PCR pour les Mauriciens, qui s’apprêtaient à regagner Maurice d’autant plus qu’ils étaient sans ressources financières.»

Après 28 ans comme fonctionnaire, il n’a pas encore perçu son lump sum et ne sait pas encore combien il touchera comme pension de retraite. S’il se joint à la politique, dit-il, ce sera pour se battre contre un système qui fait trop de tort aux Mauriciens, qui sont épris de justice et d’équité.

L’attaque terroriste du 11 septembre 2001 : «Un réel cauchemar»

<p>Rakesh Bhuckory se souvient encore de l&rsquo;attaque terroriste du 11 septembre 2001. Il devait accompagner l&rsquo;ambassadeur Jugdish Koonjul au siège des Nations unies pour une réunion de la Haute commission de sécurité où il serait question de l&rsquo;abolition éventuelle des sanctions contre le Soudan. À un moment, j&rsquo;ai entendu un énorme bruit. C&rsquo;était le premier avion détourné, qui s&rsquo;est écrasé contre le World Trade Centre. Tout le monde a voulu savoir ce qui se passait quand est arrivé le deuxième avion. Là, nous savions qu&rsquo;il se passait quelque chose de grave. En même temps, nous avons appris que des avions étaient portés manquants à l&rsquo;aéroport de La Guardia et nous avons reçu des informations que les terroristes pourraient diriger ces avions sur le siège des Nations unies. Ce fut alors le sauve-qui-peut général. Une cinquantaine de diplomates se bousculaient pour quitter le siège de cette instance. En sortant, nous étions recouverts de poussière. Les sirènes des ambulances retentissaient et les ambulanciers transportaient des morts et des blessés vers les hôpitaux. Ma résidence était située à Manhattan à New-York, non loin du siège des Nations unies. Une fois rentré, j&rsquo;ai demandé un peu plus tard à mon épouse de m&rsquo;accompagner pour faire quelques courses. C&rsquo;était la pagaille dans les rues. Des mères de familles portaient des pancartes avec la photo de leurs proches et sur lesquelles on pouvait lire : &laquo;My son is missing.&raquo; Rakesh Bhuckory souhaite ne jamais revivre une telle catastrophe.</p>