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Le tout-à-l’ego

16 septembre 2016, 09:48

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Pour le cheval, le trot est d’une essence vitale. Pour le politicien aux affaires, le trop nuit. SSR en fit les frais en 1982. Et SAJ l’apprit à ses dépens en décembre 1995. Si le premier le prit avec une résignation salutaire et symptomatique de son caractère affable, le second, plus primaire et agissant à l’instinct plutôt que dans la réflexion, n’y vit qu’ingratitude. Comme quoi la hauteur d’un homme se jauge dans la défaite. Vingt ans après, la pilule électorale est encore dure à avaler. Et comme les réflexes d’un autre temps perdurent chez les dépassés de la République, on eut droit à une deuxième couche : clouer au pilori une communauté majoritaire qui selon SAJ serait dénuée de toute perspicacité et de discernement. Pitoyable et révoltant. Vision 2030 dites-vous ?

Pourtant, la douce retraite de château dont il jouissait plus longtemps qu’un SSR exterminé émotionnellement, ne déplut à personne. L’on s’en accommoda sans sourciller car l’homme avait, n’en déplaise à certains, un bilan plutôt flatteur à la tête du pays. Malgré une ou deux indélicatesses malheureuses, le lion domptable se fit aussi à l’idée, non sans calcul politique, et le maintint où Bérenger l’avait envoyé d’un mutuel accord. Déjà le «kick him upstairs syndrome»

Comme quoi les arcanes gériatriques se profilant déjà à l’horizon, l’affaire MedPoint allait tout bouleverser pour un géniteur pas responsable d’un produit engendré et non pas créé. Les tribulations d’un petit frère passant au stade de crétin pour le faiseur de rois, l’instinct respectable et respecté d’un père se vit pris au piège d’un Bérenger toujours aussi bassement opportuniste malgré sa grande intelligence et son patriotisme incontestable.

Nonobstant les dispositions du Code civil qu’il connaît bien, l’homme réagit en bon père de famille à l’appât du pêcheur moustachu. La maladresse étant son point fort, il choisit, à tort, son espace pas si réduit que ça pour s’exprimer publiquement sur des questions purement d’ordre politique alors qu’il n’avait pas le droit de le faire. Bérenger exulte. Politiquement cela s’entend. Ramgoolam fils dénonce. Constitutionnellement cela se comprend.

La pêche miraculeuse suivie d’un morceau de gâteau traîtreusement glissé entre les lèvres de l’octogénaire, l’on prêtait déjà à SAJ, avec une morbidité aussi inextricable qu’implacable, le catafalque politique.

Mais voilà que deux pâles mathématiciens qui croient toujours détenir le magistère de la vérité se mettent à l’œuvre, entourés de béni-oui-oui qui ont fait leur temps. Deux et deux faisant quatre, sans pour autant ressentir le pouls populaire ou l’ignorant avec arrogance et mépris, et sans doute nostalgiques de l’envoûtement de décembre 1995, ils imposent et non proposent au peuple leurs diktats. La population s’en ressent. Un boulevard s’offre alors à l’ancien ministre de SSR et qui, il faut le rappeler, doit son salut politique uniquement à un Bérenger mal né selon certains rétrogrades. SAJ fouette alors son auditoire, bien que fébrilement et avec un tâtonnement révélateur de son état médical, à coups de «cotomili» et de poisson «sounouk». Le tour est joué. Et tant pis pour le débat démocratique et le niveau intellectuel où se joue une élection.

Trilochun n’est pas un saint. Mais il n’est pas bête. De plus, il se bat pour l’insoumission. Son interview accordée à Ruth Rajaysur et à Patrick Saint Pierre est révélatrice à plus d’un titre : l’alliance Lepep, quel gâchis. Et il a bien raison. L’express titrait, à tort selon l’auteur de ces lignes, que l’élection de décembre 2014 était due à «L’effet SAJ». Foutaise. La population n’a tout bonnement pas apprécié les gesticulations outrancières d’un Bérenger qui ne se suffit qu’à lui-même et un Ramgoolam qui se voyait déjà en un omnipotent à la Bongo. Point d’effet SAJ. Mais plutôt un réflexe... sage des électeurs.

Aujourd’hui, nous apprenons que le sage laissera sa place à sa progéniture. Bien que cela ait pu bien embarrasser XLD lors de sa campagne, il n’en demeure pas moins que c’était écrit d’avance. Cette passation des pouvoirs non mandatée par les électeurs hérisse les poils des plus démocrates d’entre nous. Mais elle réconforte un secteur privé de rien qui ne sait plus qui est son interlocuteur. Et c’est tant mieux si le pays en sort gagnant d’un point de vue stricte- ment économique. La démocratie reste cependant amplement bafouée.

Bref, nous avons affaire à un problème de tout-à-l’ego. Ceux qui pousseront le jeu de mots plus loin n’auront pas si tort en fin de compte.