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Guerre à Gaza

Une amitié improbable pour la vie : le combat silencieux d’Abdool Nasser Hosenally pour Gaza

29 mai 2025, 21:00

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Une amitié improbable pour la vie : le combat silencieux d’Abdool Nasser Hosenally pour Gaza

Les convois, grâce à l’intervention du président américain Donald Trump, arrivent à franchir la frontière.

Cela fait peut-être des semaines, des mois, voire plus d’un an. Il a arrêté de compter les jours. Installé à quelques kilomètres de la frontière palestinienne, tout près de Gaza, Abdool Nasser Hosenally, humanitaire mauricien, poursuit sa mission avec la même détermination et une bienveillance inépuisable. Chaque lever de soleil, chaque convoi humanitaire franchissant un barrage, chaque sac de nourriture distribué, est pour lui autant de petites victoires dans une guerre où les civils sont les premières victimes.

À Rafah, au nord du Sinaï, les bruits de guerre résonnent comme fond sonore habituel. Et pourtant, dans ce tumulte, une amitié inattendue est née. Abdool Nasser s’est lié avec un soldat israélien. Une relation improbable, construite à force d’échanges sincères.«On a pris le temps de se parler, de s’écouter. Je lui ai dit que nous étions avant tout des frères. Il m’a regardé, abasourdi», confie-t-il. Cette phrase a planté une graine, et avec elle, une confiance rare dans un monde fracturé par la peur et les ordres venus d’en haut.

De ces conversations, souvent teintées d’incompréhension mais jamais de haine, est née une collaboration humaine. Grâce à ce soldat, Abdool Nasser réussit à faire passer des convois de nourriture et de matériel humanitaire dans Gaza, en empruntant des itinéraires moins surveillés, loin des zones de tension. «Il m’a aidé à identifier des routes plus sûres, m’a demandé de choisir uniquement des chauffeurs expérimentés. Il fallait qu’ils puissent conduire sans phares, dans le noir total», raconte-t-il. Le risque est constant, mais la mission est claire : sauver des vies.

L’engagement d’Abdool Nasser ne date pas d’hier. Il œuvre aux côtés de la Société Pauvreté et SSP Humanitarian Services Ltd, s’occupant depuis le nord du Sinaï de la logistique de l’aide destinée au peuple gazaoui. Les convois qu’il coordonne sont devenus essentiels à la survie de milliers de personnes. Et depuis quelques jours, les camions traversent plus régulièrement la frontière, grâce à une dynamique diplomatique internationale inattendue.

620 x 330 (11).png Petits et grands attendant l’arrivée des convois porteurs d’espoir et de nourriture.

Le soutien de l’ancien président américain Donald Trump, bien que controversé, semble avoir joué un rôle. «On ne sait pas ce qui a été négocié exactement, mais après les discussions, la frontière de Rafah s’est ouverte. La nourriture et l’aide ont commencé à passer plus facilement », explique Abdool Nasser. Mais il reste prudent.«Ce n’est pas encore institutionnalisé. Il faudrait que l’Égypte signe un accord officiel permettant aux convois de circuler librement, que les États-Unis garantissent leur sécurité, et qu’Israël s’engage à ne pas les bloquer.» Un vœu pieux ? Peut-être. Mais un espoir tenace.

Car sur le terrain, la réalité est complexe. Les trajets sont longs et coûteux : jusqu’à 2 500 dollars (environ Rs 114 000) pour faire voyager un camion du Caire à Rafah, un périple de six à sept jours, sous haute surveillance militaire. Chaque véhicule est fouillé minutieusement, à la recherche d’armes ou de substances illicites.«Cela peut durer des heures. Les soldats inspectent tout, même les moindres recoins», raconte Abdool Nasser, qui coordonne les allers-retours depuis une base militaire proche.

La logistique, il la connaît par cœur. Les airdrops, ces largages de vivres par avion, font aussi partie de son quotidien.«Nous n’avons pas le droit de filmer ni de divulguer le type d’avion utilisé. C’est une question de sécurité.» La discrétion est le mot d’ordre, mais l’urgence, elle, ne connaît pas de pause. Et pourtant, au milieu de cette tension permanente, l’humanité refait surface. Il loue l’accueil égyptien :«Les gens ici veulent la paix. Ils font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont. Ils sont fatigués par la guerre.»

Ce que vit Abdool Nasser Hosenally n’est pas un simple engagement ponctuel. C’est une mission de vie. Là où d’autres voient des frontières, lui voit des êtres humains. Là où certains ne discernent que conflits, il bâtit des ponts. Celui qu’il a tissé avec un soldat israélien, presque à contre-courant de l’histoire, en est la preuve.

Dans un monde divisé, cette amitié inattendue devient une lueur, une forme de résistance pacifique. Elle dit quelque chose de profond : qu’au-delà des idéologies, des uniformes, des ordres et des peurs, il y a la possibilité de se reconnaître dans l’autre. Et parfois, cela suffit à faire passer un camion. Ou à sauver une vie.

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