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Environnement
Trois mois après sa fermeture, l’île-aux-Bénitiers renaît
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Trois mois après sa fermeture, l’île-aux-Bénitiers renaît

Un tiers des 55 opérateurs était présent sur l’île à la réouverture pour reprendre leurs activités.
«L’île respire à nouveau et retrouve sa beauté naturelle», a déclaré avec émotion la junior minister à l’Environnement, Joanna Bérenger, lors de sa seconde visite officielle sur l’île-aux-Bénitiers, ce lundi 16 juin. Six mois plus tôt, en janvier, elle avait découvert une situation désastreuse sur cet îlot touristique de la côte ouest : accumulation de déchets, prolifération de structures illégales et absence totale de contrôle. Une intervention gouvernementale urgente s’imposait. Trois mois après sa fermeture pour cause de restauration écologique, l’île a enfin rouvert ses portes au public et aux opérateurs touristiques dans un cadre régulé et durable.
Lors de sa première visite en janvier, Joanna Bérenger avait été choquée par l’état de dégradation avancée de l’île. En réponse à cette situation, une série d’inspections conjointes ont été menées, notamment par les ministères de l’Environnement et du Logement et des terres. Ces visites ont conduit à une décision sans précédent : fermer temporairement l’île, à partir du 20 mars, pour en faire un chantier écologique de grande ampleur. Objectif : enlever les structures illégales, nettoyer les lieux, restaurer les écosystèmes fragiles et réorganiser l’ensemble des activités humaines sur place.
Des toilettes sèches ont été installées pour les usagers.
À l’occasion de cette réouverture, une équipe regroupant plusieurs ministères s’est mobilisée sur l’île afin d’encadrer le bon déroulement des premières activités. Sur les 55 opérateurs autorisés à y travailler, un tiers était présent pour cette reprise progressive. Ces opérateurs ont été identifiés et sélectionnés à la suite de longues consultations entre le ministère de l’Environnement, le conseil de district de Rivière-Noire et le Collectif citoyen pour l’île-aux-Bénitiers. La liste finale a été validée et officialisée par les autorités locales dans le but de garantir une occupation réglementée et équitable.
Les opérateurs bénéficient désormais d’une zone bien délimitée de 302 mètres, aménagée avec soin. Des étals y ont été intégrés de manière esthétique afin de leur permettre de travailler dans de meilleures conditions tout en respectant l’environnement naturel. Ces professionnels ont reçu un pass officiel qui atteste de leur autorisation d’exercer sur l’île. À la fin de chaque journée, ils sont tenus de démonter leurs chapiteaux, d’enlever leurs tables et d’emporter tous leurs équipements. Une nouvelle discipline qui vise à préserver l’espace et éviter toute occupation permanente non contrôlée.
Concernant les plaisanciers qui n’ont pas encore été régularisés, ils ne sont pas exclus de la reprise. Le conseil de district de Rivière-Noire a précisé qu’ils sont autorisés à continuer à transporter des visiteurs sur l’île, bien que leur régularisation soit prévue dans un second temps. Il est attendu qu’un système similaire de délivrance de pass leur soit progressivement appliqué.
❚ Une restauration en deux phases
La restauration de l’île s’est déroulée en deux étapes majeures. Tout d’abord, les structures illégales ont été démantelées sous la supervision du ministère du Logement et des terres. Ensuite, une vaste opération de nettoyage a été conduite par le ministère de l’Environnement, qui s’est vu confier la gestion de l’île par décision du Conseil des ministres. Au total, plus de 138 tonnes de débris ont été enlevées.
Ce nettoyage rigoureux a été complété par l’installation de toilettes sèches écologiques, permettant de relancer les activités dans des conditions sanitaires acceptables tout en évitant de nuire aux sols et aux nappes phréatiques. Joanna Bérenger a tenu à remercier les équipes du ministère de l’Environnement qui ont, dans des conditions parfois difficiles, campé sur l’île pendant plusieurs jours pour superviser les travaux. Elle a également salué les opérateurs volontaires qui ont mis leurs bateaux à disposition pour le transport des matériaux nécessaires à la construction des infrastructures temporaires.
❚ Redécouverte de plantes endémiques rares
La réouverture de l’île-aux-Bénitiers a aussi été marquée par une excellente nouvelle pour la biodiversité locale. Des officiers de la National Parks and Conservation Service (NPCS) ont an- noncé la redécouverte de trois espèces végétales endémiques rares : le phyllan- thus vaughanii, le lycium mascarenense et l’atriplex aellenii. Ces plantes figurent sur la liste rouge de l’Union internatio- nale pour la conservation de la nature en tant qu’espèces «en danger critique d’extinction». Leur présence sur l’île-auxBénitiers est attribuée aux efforts de nettoyage qui ont permis à la flore locale de se régénérer. Les officiers envisagent désormais de récolter des graines pour effectuer des plantations dans d’autres zones de l’île Maurice afin de favoriser leur multiplication. Ils ont également noté que la prolifération de plantes envahissantes avait fortement contribué à la disparition de certaines espèces locales, d’où l’importance, selon eux, de poursuivre les travaux de restauration écologique.
Un autre constat réjouissant a été fait du côté de l’avifaune. Malgré la basse saison touristique, de grands groupes d’oiseaux migrateurs ont été observés dans le nord de l’île-aux-Bénitiers. Cette partie de l’île devrait, selon les premières orientations du master plan en préparation, être désignée comme une zone protégée dédiée à la conservation des oiseaux. Le retour de ces espèces démontre l’impact positif de la réduction des activités humaines sur l’écosystème insulaire.
Malgré ces succès, un problème persiste : la prolifération de rats sur l’île. Selon les officiers du NPCS, ces rongeurs constituent une menace di- recte pour les espèces de geckos endémiques, dont certains spécimens ont presque totalement disparu. Ces petits reptiles sont la proie des rats, qui com- promettent ainsi l’équilibre écologique. Une première campagne de dératisation a récemment été menée, mais le ministère de l’Environnement attend le rapport du ministère de la Santé avant de planifier d’autres interventions.
❚ Appel à la responsabilité collective
La junior minister s’est dit fière du travail accompli par les différentes équipes gouvernementales et les partenaires civils. Elle a reconnu que la décision de fermer l’île avait été difficile, surtout pour les personnes dont les revenus dépendent directement des activités touristiques. Mais selon elle, il s’agissait d’un mal nécessaire pour remettre de l’ordre et préserver le patrimoine naturel du pays. Elle a tenu à remercier le Premier ministre adjoint pour avoir présidé le comité chargé du suivi des travaux et pour avoir pris en compte les doléances des opérateurs dans toutes les décisions. Elle a lancé un appel à la responsabilité collective : «L’île appartient à tout le monde. Il faut maintenant que chacun joue son rôle pour la préserver. Nous devons travailler ensemble pour que nos enfants puissent continuer à profiter de nos îlots dans un esprit de durabilité.»
Virginia Lamarque, porte-parole du Collectif citoyen pour l’île-aux-Bénitiers, a exprimé son soulagement : «Ces trois mois ont été durs, mais ils ont été nécessaires. Ce choc a éveillé les consciences. Nous devons devenir les gardiens de cette île.» Elle a également salué l’approche inclusive du ministère, qui a permis à plusieurs anciens opérateurs illégaux de se régulariser.
❚ Des opérateurs entre satisfaction et adaptation
Viswanee Ittoo, artisane sur l’île-aux-Bénitiers.
Viswanee Ittoo, artisane et marchande de bijoux, se réjouit de pouvoir enfin retrouver sa place sur l’île, même si la journée d’ouverture a été lente en raison du mauvais temps. Elle note toutefois que son stand est désormais moins visible pour les visiteurs, car placé en retrait. Elle déplore aussi la difficulté de monter et démonter quotidiennement les chapiteaux en raison du vent. Pour Kenza Éloïse Annastazia Toussaint, également opératrice sur l’île, cette période d’arrêt a été mise à profit pour fabriquer de nouveaux produits artisanaux. Elle affirme qu’elle s’adaptera aux nouveaux règlements car elle est consciente de leur importance pour protéger ce joyau naturel.
Kenza Éloïse Annastazia Toussaint, opératrice.
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