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Kronik KC Ranzé

Power to go!

6 juillet 2025, 08:30

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Power to go!

En lisant le Hansard du mardi 24 juin et notamment les échanges sur la PNQ du leader de l’opposition, je me suis senti pris d’un puissant début de découragement.

La question touchait pourtant une question sérieuse, puisqu’il s’agissait d’en savoir plus sur les capacités du CEB de répondre à la demande grandissante d’énergie électrique, les menaces de délestage et de black-out, après les alertes répétées de l’été dernier et, en particulier d’en apprendre plus sur le Power Ship que l’on se propose d’installer en tête de rade aussi rapidement que possible pour fournir les 100 MW de production qui nous conforteraient.

Le leader de l’opposition est étonnamment culotté de venir interroger son successeur au ministère de l’Energie au vu de l’héritage qu’il a laissé ! Outre le problème de capacités insuffisantes, le bilan du gouvernement qui promettait 60 % d’énergie renouvelable dès 2030 (le Hansard qui n’est pas encore corrigé, parle pour le moment, page 20, plutôt généreusement de 2060 !) a, en fait, vu un apport de 23 % en 2014 s’écrouler à… 17,6 % dix ans plus tard. C’est effarant ! Mais, plus productivement, l’on aurait aimé savoir à combien s’ajoutent les projets ‘renouvelables’ en chantier et à venir et la dernière estimation du CEB pour la part du renouvelable en 2030 ! Le dernier ‘Roadmap’ s’arrête à 2022. Nageonsnous désormais à l’aveuglette ?

Il est clair qu’il y a urgence !

Selon les chiffres communiqués au Parlement, une pointe de demande de 568 MW a été atteinte lors du dernier été, soit 8 % de plus que la pointe précédente. Et ce, alors que les turbines actuelles (où il ne faut surtout pas prendre le risque de jeter le leader de l’opposition, me semble-t-il, DPM…) sont vieilles et sujettes à des pannes ou à des périodes de plus en plus fréquentes de travaux de maintenance. Sans une mini campagne invitant à consommer moins en heure de pointe et sans l’apport des générateurs privés du secteur hôtelier pour environ 40/45 MW, les pannes de réseaux auraient été bien plus graves! Le CEB s’attendant à une demande de pointe de 600 MW lors de l’été qui arrive, il est clair qu’il faut une solution immédiate. IMMEDIATE. Il n’y a pas dix mille solutions. De nouvelles turbines prendront au moins trois ans. Le renouvelable s’installe, mais lentement. Parmi nos choix, il y a barge nucléaire (style Seaborg/ Samsung), les générateurs containerisés, ou le Power Ship, qui ont tous quelques risques inévitables de pollution !

Ce qui me laisse sur ma faim cependant c’est que l’on n’a aucune indication sur le coût du KWh pour une production intérimaire, à fioul, à LNG ou au nucléaire, que nous ne semblons pas avoir considéré les générateurs containerisés, que nous n’apprenons rien sur les projets biomasse, que nous n’avons aucune visibilité sur les sources futures de production d’énergie. Si sept mois ne sont sûrement pas suffisants pour inverser l’irresponsabilité du gouvernement précédent, qui n’a point investi dans de nouvelles capacités, ne serait-ce pas suffisant pour brosser un tableau, même si à larges palettes, de nos plans d’avenir (##) ? Par exemple, les IPPs vont semble t-il carburer aux copeaux de bois plutôt qu’au charbon. C’est mieux ! Mais a-t-on seulement envisagé la biomasse liquide (huile de colza/ tournesol), comme l’utilise déjà la station EDF du Port à la Réunion, qui alimente 40 % des besoins de cette île, avec trois fois moins de pollution que le fioul (*) ? Le ministre nous indique que seulement 10 % des capacités de stockage des batteries installées ont été disponibles quand requises en février/mars 2025 ! Pourquoi ? Mal achetées ? Mal maîtrisées ? Quelles sont les prévisions du prix du KWh pour les prochaines cinq années, mettons, dans le sillage de divers ‘mix’ de production d’énergie envisagés et avec un prix de baril à, mettons, 75$ ?

On sait que le KWh d’un Power Ship coûtera plus cher que l’énergie produite à terre par voie solaire ou éolienne ou en brûlant du charbon ou des hydrocarbures. Karpowership évoque, à un moment, $25 cents/kwh (Rs 11,25/KWh). Le Daily Herald de St Maarten (population : 60 000) a suggéré un loyer de 8,2m $ par mois pour 50 MW, fioul inclus. St Maarten a trouvé trop cher et a basculé vers des générateurs containerisés. Pinailler sur les risques de pollution en la circonstance me paraît kafkaesque !

Il faut savoir que le CEB avait, dès 2022, lancé un RFI pour une ‘LNG Power Plant’ sur barge. Quelques fournisseurs avaient exprimé leur intérêt et ont posé des questions. A lire la réponse du CEB, on ne sent ni grand enthousiasme, ni grande… urgence (**). Le CEB précisait qu’il n’y aurait pas de garantie de l’Etat, que les travaux à quai relevaient du fournisseur exclusivement, sauf pour l’interconnexion et disait ne pas être en mesure de préciser s’il voulait prendre le risque d’un prix ‘spot’ pour le LNG, ou d’un contrat à plus long terme pour un Floating Storage Regassification Unit (FSRU), éventuellement utile pour une turbine LNG terrestre. Mieux encore, le CEB se disait incapable de fournir des données MétéoOcéan pour Port-Louis, afin de permettre d’évaluer si les risques de mauvais temps obligeraient à l’usage d’un bateau plutôt qu’une barge ! Pas étonnant qu’il n’y ait pas eu de suite…

Aucun problème n’est simple et certainement pas celui-ci, que nous ont laissé le ministre Lesjongard et son gouvernement.

Certains se demanderont pourquoi envisager un contrat de 4/5 ans pour une solution temporaire ? Je vous renvoie à (##) plus haut en soulignant que plus le contrat est court, plus il coûtera cher ! D’autres évoqueront le fait que la réelle menace à nos capacités énergétiques nationales ne surgit que pendant quelques semaines chaque été et juste aux heures de pointe et se demanderont si cela vaut la peine de payer des loyers de Power Ship pour des mois entiers durant lesquels nous n’en ferons probablement pas usage…

C’est bien de voir qu’un RFP international a été lancé le 18 juin dernier. Cela ne laisse vraiment plus beaucoup de temps…, mais ce tender permet de comparer des propositions, en espérant que la visite du ministre Assirvaden en Turquie, en amont, ne soit pas évoquée par un concurrent éventuel qui ne gagne pas le contrat face à Karpowership ; empêtrant tout le processus dans de la mélasse légale.

A mon (très) humble avis, le CEB aurait probablement intérêt à aussi faire un appel d’offres pour des générateurs containerisés. Si les 40 MW des générateurs d’hôtels ont pu sauver la situation en 2024/25, ne seraitil pas judicieux d’envisager d’acheter des générateurs diesel containerisés par module de 10 ou de 20 MW, mettons, pour plus de flexibilité ? Il y a même un marché de générateur de 2e main (***) ! S’il est vrai que ceuxlà sont possiblement moins efficients que les derniers modèles, ils coûtent nettement moins cher et ils ne seront pas en usage pour trop longtemps, vu la ‘vague’ de renouvelable qui va finir par arriver…

Mais mon découragement à la lecture du Hansard ne découle ni de la seule irresponsabilité de l’ancien gouvernement qui a mis le pays au bord du gouffre énergétique, ni de l’ampleur de la mission qui reste à accomplir pour ne pas subir la honte de nouveaux délestages. Il a aussi été de constater (je suppose que c’est encore pire d’entendre ?), le fort courant de partisannerie, de règlement de compte, de quolibets stupides qui reproduisent les bêtises, les mesquineries et les enfantillages du gouvernement précédent desquels, ne l’oublions pas, l’électorat avait pourtant demandé du CHANGEMENT.

Au Parlement, on devrait débattre de notre bien commun à tous et du futur, plutôt que de faire étalage d’une puérilité de cour d’école, de partisannerie étroite et d’une médiocrité de réflexion sérieuse qui, à quelques exceptions près, commencent à faire peur!

***** 

M. Padayachy a fait une vidéo (****) pour tenter de contrer la thèse que «les caisses sont vides» et qu’il faut donc réduire les dépenses. Son argument est que : «tou les zours, 611 millions rente et resse dan la kaisse» du gouvernement, ce qui fait que «zamais li kapav vide» !

Ça se croit subtil, mais finalement c’est malhonnête et tout faux ! D’abord parce qu’il kidnappe la recette moyenne par jour du Budget… 2025/26 A venir (Rs 223 milliards de revenus annuels v/s les Rs 181 milliards de son propre Budget de 2024/25), mais aussi et Surtout, parce que s’il y avait bien dans SON budget 2024/25, Rs 496 millions dans la caisse tous les jours, celle-ci se vidait bien plus rapidement, soit par Rs 619 millions quotidiennement ! Ainsi le déficit de 6,3 % à son budget courant, en sus d’un déficit plus usuel de 3,5 % au budget capital ! On empruntait donc Rs 123 millions par jour pour payer les dépenses courantes et ce avant les nouvelles promesses électorales… Qui nous expliquera comment c’était possible de continuer ainsi ? Padayachy, vous croyez ?

(*) Eco Austral, no 397

(**) A lire la réponse du CEB

(***) USP&E l Diesel Generators

(****) Padayachy, Tele Plus, YouTube

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