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Jeux Olympiques 2024

Bernadette, aveugle, et sa chienne Mara testent les trajets vers les sites

15 avril 2024, 12:13

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Bernadette, aveugle, et sa chienne Mara testent les trajets vers les sites

Un bon point pour les tramways et les autobus, qui annoncent les stations. Le métro, lui, s'apparente à une course d'obstacles. A 100 jours des JO de Paris, Bernadette Pilloy, aveugle, teste les trajets qui mènent aux sites olympiques, accompagnée de sa chienne-guide Mara.

A 76 ans, elle fait partie des «comités d'experts usagers» mis en place par les organisateurs des JO pour tester régulièrement des cheminements jusqu'aux sites olympiques - des comités composés de personnes en fauteuil roulant, non-voyantes, autistes...

Pour améliorer le quotidien des quelque 200.000 non-voyants en France, la septuagénaire fait remonter les difficultés concrètes qu'architectes et concepteurs n'avaient pas anticipées.

Car les organisateurs attendent des dizaines de milliers de personnes handicapées dans le public des Jeux olympiques (26 juillet - 11 août) et paralympiques (28 août - 8 septembre), sans compter les 4.300 athlètes qui participent à ces derniers.

Cet événement est l'occasion de donner un coup d'accélérateur à l'accessibilité, clé pour l'inclusion, mais aussi pour adapter la société à une population vieillissante.

Métro en direction d'Arena Bercy (sud-est de Paris), où se tiendront les épreuves de basket. «Mara, cherche la porte», lance Bernadette Pilloy. La chienne en laisse la guide vers l'ouverture de la rame. «Mara, cherche un siège.» La chienne trouve un strapontin et place sa tête dessus.

«Nous ne les verrons pas!»

La rame n'annonce pas les stations. «Je compte sur mes doigts. Onze stations.» Elle a, comme toujours, planifié son déplacement avec une appli payante spécifique.

«On nous a promis que les métros seraient vocalisés, puis on nous a dit que ce serait impossible. Seules les rames les plus modernes parlent», regrette la septuagénaire.

A la station suivante, le trafic est interrompu par un incident, les passagers doivent sortir. Lorsqu'elle est perdue, la voyageuse s'exclame: «Y aura-t-il quelqu'un de gentil pour m'aider ?»

Arrivée sur le quai de la station Bercy, vers quel côté sortir pour rejoindre l'Arena?

La chienne la guide vers un escalier. Est-ce le bon? Bernadette tâte autour d'elle et détecte un panneau. Elle sort de sa poche son iPhone. L'appli «Seeing AI» lui «lit» le panneau.

«Etre autonome, c'est ne pas peser sur ses proches, ne pas avoir besoin qu'ils viennent avec moi», explique cette mère de cinq enfants et grand-mère de 11 petits-enfants, mariée depuis 52 ans à un homme voyant.

A la sortie du métro, comment trouver l'Arena? «Il y aura des volontaires, 30.000, spécialement formés pour aider les personnes handicapées. J'ai dû expliquer lors des réunions que c'était à eux de nous repérer...car nous ne les verrons pas!.»

Ces volontaires formés au handicap seront recrutés pour la période des Jeux, mais Bernadette Pilloy veut croire que cette formation leur sera utile dans leur profession future.

Le tramway «parle»

Et maintenant, en bus, direction Roland-Garros (sud-ouest), qui accueillera boxe et tennis. C'est nettement mieux. Tous les bus parisiens annoncent les stations et des endroits sont prévus pour les fauteuils roulants. Mais lorsqu'il y a du monde, ces places ne sont plus accessibles, relève Bernadette Pilloy.

Elle teste ensuite le tramway, pour aller à Arena La Chapelle (nord), le site où se dérouleront les épreuves de para-badminton. Le chien détecte la «bande d'éveil à la vigilance» (des picots), qui indique le passage qui traverse les voies. Le chien lui trouve la porte, un siège. «Le tramway +parle+ et est extrêmement accessible», se réjouit-elle.

Pour cette membre de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), pouvoir se déplacer, «c'est avoir un accès réel aux droits: à l'éducation, à la santé, au sport, à la justice...»

Membre également du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), elle vient à Paris depuis Elancourt, en banlieue ouest, où elle vit, plusieurs fois par semaine pour des réunions.

Des Jeux, elle espère un «changement de regard sur les personnes handicapées, une acceptation plus grande de leur présence.» «On va les voir dans la rue, les stades, les salles de sport. Là où sont tous les autres citoyens.»