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14ᵉ mois: une épée de Damoclès sur la tête des petits commerces

23 novembre 2023, 13:00

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14ᵉ mois: une épée de Damoclès sur la tête des petits commerces

Des petites entreprises sont inquiètes à l’idée d’un éventuel 14e mois à payer en cette fin d’année.

Un 14ᵉ mois en décembre demandé par l’opposition au Parlement mardi pour ceux touchant moins de Rs 50 000 par mois. Alors que de nombreux employés se réjouissent déjà, certains employeurs, surtout ceux qui peinent à s’en sortir, sont inquiets. S’ils doivent l’assumer, leur endettement pourrait mettre en péril leur activité.

L’annonce d’un possible 14ᵉ mois suscite encore des réactions 24 heures après. En effet, lors de sa Private Notice Question, le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, a avancé cette proposition. Selon lui, face à l’inflation due à la dépréciation de la roupie, de nombreuses personnes rencontrent des difficultés en cette fin d’année. Il a ajouté que 19 compagnies privées ont réalisé un profit total de plus de Rs 42 milliards pour l’année 2023, alors qu’en 2019, elles atteignaient seulement Rs 13 milliards. Pour sa part, le ministre du Travail, Soodesh Callichurn, n’a pas rejeté cette proposition mais il a indiqué qu’il devait consulter toutes les parties concernées avant de se prononcer.

Malheureusement, cette proposition prend de court les propriétaires de petits commerces. Déjà confrontés au manque de main-d’œuvre, on leur demande cette fois-ci de trouver les moyens de payer un deuxième bonus pour le même mois.

Un restaurateur de Curepipe exprime son mécontentement : «Où pensez-vous que nous allons pouvoir trouver autant d’argent en l’espace de quelques jours ?» Il souligne que les grandes sociétés de restauration rapide n‘auront aucun problème à payer ce supplément, car elles réalisent des milliards de chiffre d‘affaires chaque année.

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«Mais qu’en est-il des petits commerces qui n’emploient qu’un, voire deux, employés ? C’est déjà compliqué d’arriver à terminer le mois quelquefois. Souvent, on envisage même de mettre la clé sous le paillasson. En tout cas, cette compensation est impossible…» Il est même d’avis que cette allocation ressemble davantage à une stratégie électorale en vue du prochain scrutin. «On sent un enjeu politique. Mais, dans la réalité, qui pense aux petits commerces ?»

C’est le ressenti partagé par plusieurs autres commerçants interrogés – du coiffeur au tailleur. Tous estiment difficile de verser une compensation de cette envergure. «Embaucher une personne pour nous aider est déjà compliqué car il faut verser le montant du salaire minimal. En tant que propriétaire d’un salon de coiffure, je ne reçois pas de bonus de fin d’année. Avec ce genre d’idée, on semble vouloir faire disparaître ces petits métiers et commerces», souligne un coiffeur professionnel à Vacoas. Il ajoute qu‘il ne peut se permettre de telles dépenses, car il faut aussi penser à l‘année 2024. «Nous ne recevons aucun soutien financier de l’État.» Dans tous les cas, si le gouvernement décide d‘obliger les entreprises à verser un bonus supplémentaire aux employés gagnant moins de Rs 50 000, cela risque de sceller le destin de nombreuses petites entreprises.


Attente d’un soulagement au bas de l’échelle

Le gouvernement va-t-il légiférer en faveur d’un 14ᵉ mois pour les salariés des secteurs privé et public percevant moins de Rs 50 000, tout en prévoyant un mécanisme d’aide aux employeurs confrontés à des difficultés financières ? Alors que le ministre Callichurn a indiqué au Parlement qu’une telle mesure nécessite des consultations avec les différentes parties, un vent de soulagement est déjà attendu par ceux au bas de l’échelle.

«Vu que vers la fin du mois de décembre et le début du mois de janvier, les dépenses se concentrent sur des investissements ponctuels qui durent toute l’année, en particulier pour les besoins éducatifs des enfants tels que les matériels scolaires, les frais de cours, les uniformes, entre autres, un 14ᵉ mois apportera un sentiment de soulagement et fournira un bon départ financier pour l’année prochaine. D’autant plus que les prix des produits de base ont continué à augmenter», déclare S. M., père de deux enfants et jeune professionnel.

Pour d’autres, comme Z. H., il s’agit de pouvoir rembourser en priorité les emprunts, tout en conservant son salaire de décembre et son bonus pour maintenir les traditions de la nouvelle année et garder suffisamment d’argent pour aller jusqu’à la fin du mois de janvier, lorsque le prochain salaire sera versé. Elle et son époux gagnent moins de Rs 50 000 chacun et le couple doit rembourser des prêts hypothécaire et automobile.

Cependant, d’autres personnes travaillant dans des Petites et moyennes entreprises (PME) sont sceptiques, étant donné que les activités ont à peine repris après la pandémie. «Une telle mesure risque d’être perçue comme un staff cost additionnel et pénible. Elle me soulagera immédiatement de mes dépenses, mais elle pourrait être préjudiciable à long terme, car plus tard, pour recouvrer les coûts et continuer à fonctionner, on pourrait voir notre tranche de salaire gelée et ne pas recevoir d’augmentation. D’autre part, les prix des produits de base continueront à augmenter. Cette mesure doit également tenir compte de cette question», explique un employé d’une PME.


Jayen Chellum : «Une mesure qui ne doit pas pénaliser les PME»

Le secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM) note que cette mesure, si elle est mise en œuvre, devrait apporter un soulagement temporaire aux salariés du bas de l’échelle, étant donné que leur pouvoir d’achat a été considérablement réduit par les hausses des prix des trois dernières années. Cependant, il est nécessaire d’implémenter cette mesure de manière adéquate et holistique afin que les petites et moyennes entreprises ne soient pas pénalisées. «Le gouvernement devrait trouver un mécanisme pour les soutenir, en utilisant correctement les revenus générés par la TVA, les taxes et les prix élevés des carburants. En outre, les consommateurs doivent être soulagés à long terme par des compensations salariales adéquates». Jayen Chellum confie que l’ACIM est disposée à apporter son soutien si des réunions de consultation sont organisées.