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Ordination diaconale demain

Deux de plus pour le diocèse

5 juillet 2025, 22:00

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Deux de plus pour le diocèse

■ Benjamino Eustasie et Patrick Couronne. © Vashish Sookrah

On ne le répètera jamais assez. On peut servir l’église de différentes manières et le diaconat permanent en est une. Avec l’ordination diaconale de Benjamino Eustasie et Patrick Couronne, demain, dimanche, à La Cathédrale St Louis, le diocèse de Port-Louis comptera désormais 11 diacres permanents. Portraits de ces deux derniers, en marge de leur ordination.

Benjamino Eustasie: Partager l’amour de Dieu aux autres

Une vie d’engagement. C’est le sentiment que l’on a lorsqu’on prend connaissance du parcours de Benjamino Eustasie, bientôt 63 ans. Ses parents ont joué un grand rôle dans le développement de sa foi. En effet, son père Joseph Ben, tailleur de son état, et sa mère Marie Sylvie, femme au foyer, étaient très pieux. Ils incitaient leurs sept enfants – trois filles et quatre garçons dont Benjamino, tous baptisés – à prier en famille chaque soir, à faire le chemin de croix en famille à chaque vendredi de Carême, à ne pas rater une messe le dimanche à l’église de St Julien ou à celle de Bonne Mère. Chaque enfant Eustasie a fait sa première communion et sa confirmation. En grandissant, le pli de nourrir sa foi était pris pour Benjamino Eustasie, qui s’est d’abord engagé comme servant d’autel puis comme lecteur à l’église de St Julien. Il a ensuite été membre du Conseil paroissial, membre de la Fabrique, bénévole auprès de Caritas, a fait partie du Mouvement Social de la Jeunesse Mauricienne.

Admis au Collège Royal de Curepipe après avoir obtenu la petite bourse au primaire, Benjamino Eustasie a tout de même trouvé le temps de cumuler études et foi, de suivre au cours de son temps libre des formations paroissiales comme celle du Groupe 40, ses formateurs étant à l’époque Maurice Piat, qui n’était encore que prêtre, et Floryse Chu. Alors qu’il était en Form V, il a suivi la formation de l’Institut pour le Développement et le Progrès avec Jean-Noël Adolphe, José Allet et Gabriel Savrimoutou.

Lorsqu’il a terminé son cycle secondaire dans les années 83-84, le chômage battait son plein. Il a été obligé de prendre le premier emploi qui s’offrait à lui en 1985 et c’était celui de postier. Un de ses collègues n’était alors autre que Michel Moura, qui a embrasé la prêtrise par la suite. Benjamino Eustasie est tombé amoureux de Lilette, institutrice dans une école catholique. Il a alors réalisé qu’après toutes les formations reçues, il avait énormément à transmettre aux enfants. Il a donc décidé d’aller suivre un cours au Mauritius Institute of Education pour devenir instituteur dans une école primaire catholique. «Je voulais mettre ma foi en pratique dans une école catholique et devenir un enseignant comme le Christ.» Il a énormément apprécié la formation reçue, en particulier la psychologie de l’enfant et la philosophie. Et quand il a quitté la poste c’était en tant que président du syndicat des postiers et a été instituteur dans des écoles catholiques. Il a épousé Lilette qui «a été et est toujours un modèle pour moi».

Il n’a jamais regretté sa décision de travailler avec les enfants. «J’aime beaucoup les enfants et je les encourage toujours à croire en eux-mêmes et en leur capacité àréussir.» Jusqu’à sa retraite, il a agi comme maître d’école à l’école Bon Accueil RCA. Benjamino Eustasie conserve de merveilleux souvenirs de ses années d’enseignement. «Plusieurs élèves m’ont rendu fier et là, je pense particulièrement à un élève qui avait échoué les grades 4 et 5 et qui a réussi, grâce à l’encadrement du personnel enseignant, à sa première tentative en grade 6. Je suis également très fier de voir que des élèves de ma classe de repeaters ont réussi leur vie et sont aujourd’hui dans plusieurs secteurs dont la police.»

Voulant pousser son engagement dans l’église encore plus loin, Benjamino Eustasie a suivi le parcours Zezi Vre Zom (ZVZ) avec le père JeanClaude Véder en 2011. «En 2013, encouragés par notre ami Antonio Salomon, nous sommes partis avec 30 hommes de Camp-de-Masque animer cette formation aux Seychelles en compagnie du père Véder. Puis, inspiré par le Saint Esprit, j’ai proposé au père Véder d’organiser un pèlerinage ZVZ en Terre Sainte et nous sommes partis en 2014 avec 48 hommes. En sus du père Veder, il y avait aussi le père Moura.» Sa proximité avec les différents prêtres de la paroisse de St Julien – les pères Claude Espitalier Noël, Marcel Maillot, André Sunassee et Tadeusz Kud – lui ont permis de nourrir et de fortifier sa foi et sa vie spirituelle.

C’est en 2020 que le père Jacques Piat lui a proposé de suivre la formation pour devenir diacre permanent. Ce père de deux enfants – Clarissa, employée à la Mauritius Revenue Authority et Nicolas, Supply educator à l’école St Joseph RCA – a non seulement reçu le soutien de son épouse et de ses deux enfants mais aussi de son gendre Josua, qui travaille à ASPEN, et même l’encouragement de son petit-fils Jérémie, qui est en maternelle.

Cette formation en vue de devenir diacre permanent a duré quatre ans et a été dispensée au séminaire dans l’enceinte du Thabor à Beau-Bassin. Il l’a suivie en compagnie de Lilette. Que représente l’ordination diaconale de demain pour lui ? «Elle représente la reconnaissance de L’Église Catholique après un parcours rempli d’amour et de foi, de même que la confiance de l’évêque pour servir avec amour mes frères et sœurs.»

Hormis deux sacrements, soit la célébration de l’Eucharistie et le pardon lors de la confession, le diacre peut assumer toutes les autres responsabilités du prêtre. Ne craint-il pas d’être trop sollicité et que cela perturbe sa vie de famille ? «Je suis toujours positif et je trouverai les occasions de passer des moments de qualité en famille. Et puis, l’Église, c’est aussi ma grande famille, où je suis appelé à partager l’amour de Dieu avec les autres, à les encourager à faire de même, à être serviteur commele Christ.»

Patrick Couronne: Refléter l’image du Christ

On sait que les parents sont des modèles pour leurs enfants mais on ne mesure pas toujours l’impact de leur vie spirituelle sur celle de ces derniers. Aussi longtemps qu’il s’en souvienne, Patrick Couronne, 62 ans, natif de Riche-en-Eau et benjamin de trois enfants, a vu ses parents prier. Autant la foi de sa mère était intérieure, celle de son père était plus expressive et il s’est retrouvé de celle-ci, ne manquant presque jamais la messe du dimanche à l’église de St Hubert.

À l’issue de sa Form VI au collège Sookdeo Bissoondoyal de Rose-Belle, Patrick Couronne, qui a appris la guitare en autodidacte, a pris de l’emploi comme barman au Riche-en-Eau Staff Club où il a passé huit ans avant de saisir l’opportunité d’entrer comme Meter reader au Central Electricity Board.

Le déclic pour un engagement plus profond au sein de sa paroisse lui est venu de sa sœur. «On dit que l’Église appelle et c’est vrai. Ma sœur qui m’écoutait jouer de la guitare m’a demandé d’accompagner la chorale des enfants. Ils étaient encadrés par des retraités. Elle a pensé qu’il leur fallait quelqu’un de plus jeune.» N’écoutant que son cœur, il a d’abord accompagné la chorale des enfants puis a pris sur lui pour animer des cours informels de catéchèse aux enfants de six à 12 ans. «Je lisais la Parole et je m’en inspirais pour l’enseignement de la catéchèse avec eux.» Il l’a fait pendant plus de 25 ans et n’en a tiré aucune gloire. «Voir les enfants heureux n’était pas une glorification pour moi. C’était une responsabilité car je ne voulais pas les laisser seuls spirituellement.»

Au travail, il a gravi les échelons jusqu’à être nommée Acting Senior Meter Reader. C’est ainsi qu’il sillonne plusieurs village du Sud, de Baie-duCap à Grand-Sable. Marié à Estella, qui est clerc au ministère de l’Education, elle lui a donné trois enfants – Camille, 26 ans, Anaïs, 24 ans et Dimitri, 21 ans. Patrick Couronne a poursuivi son accompagnement de la chorale, de même que la catéchèse.

En 2013, sur une proposition du père Georges Piat, il a suivi une formation formelle de catéchèse auprès des parents dont les enfants se préparaient pour le sacrement de la première communion. C’est une de ses anciennes élèves de catéchèse qui a alors pris la responsabilité de la catéchèse des enfants. «La catéchèse des adultes, c’est faire les parents s’impliquer dans le parcours chrétien de leur enfant, leur faire comprendre les sacrements et leur faire redécouvrir le Christ.» Cela le peine de voir que ce sont surtout des mamans qui viennent à ces rencontres.

En 2020, c’est le même père Piat qui l’a informé qu’il avait été pressenti pour suivre une formation en vue du diaconat permanent. Après consultation avec son épouse et un temps de réflexion et de discernement vécu dans la prière, et interpellés par la Parole de Dieu qui dit «Quitte ta maison et taparenté...» (Gn 12:1) et «Prends ta part de souffrance à l’annonce de l’Evangile..» (2Tm 1,8), le couple Couronne a décidé de suivre la formation et de voir jusqu’où elle les mènerait. «Nous avons eu le sentiment que ces deux textes s’adressaient à nous et que par quitter ‘la part de souffrance’, cela voulait dire quitter notre zone de confort pour prendre notre part de responsabilité dans l’annonce de l’Evangile. Nous avons laissé la Parole reposer en nous et avons consulté notre curé, le père Jean-Pierre Arlanda, qui nous a conseillés de nous laisser porter par le Christ et c’est ce que nous avons fait.»

Patrick Couronne et son épouse ont trouvé la formation très intéressante. D’un point de vue personnel, celle-ci leur a permis de redécouvrir l’amour et l’attachement qu’ils avaient l’un pour l’autre. «Nous avons réalisé à quel point il y avait du bonheur pour nous.»

C’est seulement demain que lui et Benjamino Eustasie sauront quelle sera exactement leur mission et dans quelle paroisse ils seront appelés à servir. Même s’il est un peu appréhensif quant à cette mission, Patrick Couronne a décidé de se laisser porter par le Christ. Il explique que l’on se fait parfois un monde d’une situation dans notre tête alors qu’en pratique, les choses sont plus simples. «Depuis un an, je vais donner la communion aux malades. Au début, j’avais peur et je n’étais pas sûr d’être capable d’écouter leurs souffrances. C’est vrai qu’ils souffrent mais il y a une beauté à écouter leurs confidences, à vivre dans leur intimité.»

Être diacre pour lui c’est «refléter l’image du Christ partout où l’on est.» Sera-t-il capable de faire la part des choses et de répondre aux sollicitations, tout en accordant du temps à ses proches ? «Je l’ignore mais je me laisse porter par le Christ avec mes interrogations. Je suis sûr que progressivement, ma mission se révèlera…»

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