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Interview

Liza Gundowry: «Nous devons réfléchir aux possibilités qui s’offrent aux jeunes dans notre pays»

16 mars 2024, 20:00

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Liza Gundowry: «Nous devons réfléchir aux possibilités qui s’offrent aux jeunes dans notre pays»

Liza Gundowry, Miss Mauritius World.

Notre Miss Mauritius World, Liza Gundowry, 26 ans, qui s’est installée en Angleterre avec sa famille depuis qu’elle a huit ans, a fait notre fierté, la semaine dernière, pour s’être classée parmi les 12 premières candidates au concours Miss World à Mumbai. Diplômée en relations internationales et en langues modernes, elle est aussi détentrice d’une maîtrise en études africaines auprès de l’université d’Oxford. Elle y travaille actuellement à distance en tant que facilitatrice d’études pour les étudiants ayant des difficultés d’apprentissage. Entretien.

Qu’est-ce qui a changé concrètement dans votre vie depuis une semaine ?

Il est trop tôt pour dire ce qui a changé concrètement car je n’ai pas encore repris une vie normale. Cependant, j’ai eu la chance de retourner à Maurice avec la délégation de Miss World, une expérience extraordinaire, qui a transformé ma vie. Si le concours lui-même a été une expérience inoubliable, le fait de passer une semaine supplémentaire avec cette délégation, de travailler en étroite collaboration avec l’organisation, m’a fait découvrir de nouveaux horizons et constitue une occasion unique. Pour l’instant, c’est une expérience surréaliste, alors j’en profite pleinement.

Y a-t-il davantage d’appels, de contrats ?

Les appels téléphoniques sont incessants et sur les réseaux sociaux, de plus en plus de personnes me rejoignent. Je reçois des offres de collaboration et des propositions, même de la part de marques de vêtements et de celles qui m’entraîneront à devenir ‘influenceuse’. Il est très rare qu’une Mauricienne atteigne le Top 12 du concours Miss World et je suis très heureuse d’avoir eu le soutien des Mauriciens et qu’ils en soient conscients. Cependant, je suis plutôt favorable à une offre d’emploi concrète dans ma filière d’études.

Comment comptez-vous exploiter votre remarquable performance ?

Puisque je suis à Maurice avec la délégation de Miss World, je suis reconnaissante et j’aimerais que ces expériences durent. Je suis également réceptive aux nouvelles opportunités qui se présenteront à l’avenir. J’espère pouvoir faire partie d’autres voyages avec cette délégation et les autres Miss, qu’il s’agisse de voyages destinés à promouvoir le tourisme ou ceux organisés avec la philosophie Beauty with a Purpose, qui permet aux participantes de voyager et de mener à bien des projets sociaux. Cela a été un rêve et j’en profite au maximum, en espérant qu’il se poursuivra.

Des regrets de n’avoir pas été mieux classée ?

Honnêtement, je suis très satisfaite de mon classement. J’attendais avec impatience d’être interrogée sur une scène internationale pour démontrer qu’une jeune mauricienne peut répondre intelligemment et avec éloquence. Je n’ai pas eu l’occasion de le faire mais je suis très satisfaite et reconnaissante d’avoir été classée parmi les 12 premières candidates. Cela n’a pas été facile. Il y avait 112 femmes incroyables qui se sont présentées à ce concours avec des projets extraordinaires et un grand cœur et tout le monde a été méritant. Plusieurs femmes du continent africain sont très douées. C’est avec beaucoup d’humilité que je suis parvenue à ce résultat et le fait de figurer parmi les trois premières déléguées africaines est une grande victoire. Je sais à quel point j’ai travaillé dur pour y parvenir. Aller plus loin aurait été un rêve mais je viens d’un petit pays et il n’y a que ma famille et moi et quelques personnes gentilles et des amis sur qui j’ai pu compter. Atteindre ce niveau est donc une énorme victoire pour notre équipe.

Ayant grandi en Angleterre et étudié dans ce pays et au Mexique, que signifie ‘être Mauricienne’ pour vous ?

Mon authenticité et le fait que je n’ai jamais vraiment perdu mon identité de Mauricienne. Même si j’ai voyagé à travers le monde, je suis toujours restée fidèle à moi-même. J’ai toujours été très connectée à mon pays, à mon peuple, à ma langue, je suis fière de mes origines. Être fière et vouloir présenter notre culture et notre identité au monde, c’est ce qui m’a aidée à continuer à être Mauricienne.

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Est-ce que devenir Miss était votre rêve de petite fille ?

Honnêtement, cela n’a jamais fait partie de mes rêves. L’opportunité s’est présentée à moi de manière très inattendue. En 2020, l’organisation Miss World est venue à Maurice pour promouvoir la nouvelle élue, qui était alors la Miss World Jamaïque, ToniAnn Singh. J’étais alors stagiaire chez Défimedia et j’ai assisté à cette conférence de presse. J’ai découvert ce qu’était le concours Miss World et sa philosophie Beauty with a Purpose. C’est ce qui m’a inspirée à participer au concours national Miss Mauritius. C’est pourquoi je me sens très humble d’être arrivée aussi loin dans le concours Miss Monde, aux côtés de filles, qui en ont peut-être rêvé depuis qu’elles sont toutes petites et qui y ont travaillé pendant plus longtemps que moi. Faire partie des 12 premières participantes, aux côtés de femmes extraordinaires, a été une grande chance.

Parlez-nous du soutien de votre famille dont celui de votre mère Sylvia, ancienne journaliste.

Ma mère a été d’un soutien incroyable tout au long de ce parcours, de même que mon frère et mon père. Mais ma mère l’a été davantage. En 2021, après avoir terminé mes études et être revenue à Maurice pour le concours Miss Mauritius, ma mère m’a accompagnée, ce qui l’a amenée à mettre sa vie en mode pause, à faire des sacrifices au niveau de ses projets, de sa carrière, de sa vie, juste pour être avec moi pendant cette aventure. C’est maintenant, trois ans plus tard, que nous pouvons voir les récompenses de ces sacrifices. Je dois tout ce que j’ai accompli à ma mère parce qu’elle a été là pour me soutenir, en dépit de tous les défis.

Votre mère défend la cause chagossienne. Quel regard portez-vous sur le sort des Chagossiens et de leurs descendants en ce 56e anniversaire de l’indépendance de Maurice, obtenue au prix fort de leur déportation ?

Oui, ma mère défend les droits des Chagossiens, qui ont été expulsés de force de leur territoire. Je suis consciente que cette population a souffert et continue de souffrir. C’est une honte et une triste réalité que 56 ans plus tard, le peuple chagossien se voie toujours refuser le droit de retour sur son territoire. Mais il est rassurant de constater que leur lutte est reconnue à travers le monde. Leur résilience est louable. Il est formidable de voir qu’ils participent aux discussions sur leur avenir. Aucun plan, aucune discussion ne devrait avoir lieu sans la présence des Chagossiens autour de la table des négociations. La colonisation est finie. J’espère que les natifs de l’île - ceux qui sont encore en vie - seront en mesure de regagner leur pays d’origine dans les plus brefs délais.

Comment réagissez-vous face à l’exode des Mauriciens dont des jeunes comme vous ?

Je suis préoccupée par le fait que plusieurs jeunes quittent Maurice. Je ne sais pas s’il s’agit d’exode, je ne dispose pas de faits pour l’affirmer, mais nous constatons qu’ils sont nombreux à quitter le pays. Je pense que c’est une bonne chose que les Mauriciens prennent leur destin en main et cherchent des opportunités à l’étranger. Mais en même temps, nous devons réfléchir aux possibilités qui s’offrent aux jeunes dans notre pays. La ressource de Maurice, c’est son peuple. Nous devons nous occuper de nos citoyens et veiller à ce qu’ils soient heureux et à ce qu’ils se sentent valorisés.

Quelle suite donnez-vous à votre projet Beauty with a Purpose – Nous Later Nou Lafors, qui engage les femmes de Sainte-Croix ?

J’aimerais poursuivre le projet Nou Later Nou Lafors avec les femmes de Sainte-Croix. Ce serait formidable de pouvoir les soutenir davantage pour s’assurer qu’elles cultivent suffisamment de produits pour nourrir leurs familles. J’aimerais qu’elles présentent leurs produits et que nous allions dans d’autres endroits de l’île pour parler à d’autres femmes. Les femmes qui participent à mon projet sont motivées à le poursuivre et à encourager d’autres femmes à faire de même.

Quelle est la réalité qui vous frappe le plus à Maurice ?

Je me sens concernée par un certain nombre de choses: la pauvreté qui touche les femmes, le problème de l’éducation dans certaines régions vulnérables, la toxicomanie chez les jeunes. Je sais que les gens disent que la drogue et la pauvreté sont partout mais il suffit d’aller dans certaines zones, par exemple dans certaines régions de Port-Louis, pour voir à quel point ces problèmes sont courants.