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Je n’irai jamais en France !

20 mars 2012, 08:30

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C’est une tradition désormais. Pour la Semaine de la langue française et de la francophonie, une sélection de dix mots est proposée. Jouons donc avec la langue. Mais, le signifié va quand même habiter le signifiant. Les «dix mots» 2012 choisis autour du thème «Dis-moi dix mots qui te racontent» sont : âme, autrement, caractère, chez, confi er, histoire, naturel, penchant, songe, transports.

Ame. C’est une langue qui m’a créé. Le français m’a ouvert des fenêtres sur tout un univers. J’ai ainsi pu pénétrer des mondes merveilleux comme ceux de Proust, de Stendhal ou encore d’Anouilh. J’y ai découvert une certaine âme française. Et mon âme s’en est enrichie. Le Mauricien que je suis a accueilli l’âme française comme une révélation.

Autrement. Je serais resté une personne qui n’aurait pas lutté pour étudier dans une université française, celle de l’île de La Réunion. Je n’aurais pas connu les Lumières, le cartésianisme, cette idée que De Gaulle avait d’une Grande France, l’existentialisme…

Caractère. J’ai lu au fil des ans, avec beaucoup de passion, l’histoire de grands hommes comme De Gaulle et Mitterrand qui ont du caractère. A un moment donné, je m’intéressais plus à la politique française qu’à celle de mon pays. Car, je me disais que le débat avait vraiment du caractère.

Chez. A Maurice, on a des sentiments plutôt nuancés vis-à-vis de la France. Parce que nous avons nos franco-mauriciens. Chez nous, nous nous disons qu’ils vivent dans des vases clos. Cela crée de la méfiance.

Confier. Permettez-moi, aujourd’hui, de vous confi er un secret. Je n’ai rien contre la France. Elle m’a tant donné. Mais, lorsque je regarde le niveau des débats pour les présidentielles de cette année et celles des précédentes, je m’explique mal comment les Français peuvent s’abaisser à un tel niveau de réflexion.

Histoire. C’est vrai que les peurs collectives nourrissent les fantasmes. Toutefois, cela ne justifie pas tout. La France a une telle histoire. A l’origine du concept des droits de l’homme, elle montre à présent un certain mépris pour les étrangers.

Naturel. C’est devenu désormais quelque chose de congénital chez la France. Ce que certains nomment les «quatre i»: immigration, Islam, identité nationale et insécurité. Les Français parlent d’intégration et des valeurs républicaines. Reste à savoir s’ils s’intègrent lorsqu’ils s’installent dans d’autres pays.

Penchant. De nombreux Français ont développé une nouvelle inclinaison. Ils ont l’impression d’être devenus le centre du monde. Et tout le monde veut squatter leur espace, voler leur travail et les acculturer à d’autres traditions.
Songe. C’est ainsi que la classe politique française a perdu ses idéaux.

Désormais, elle glose sur la viande halal et cachère ou encore sur ces étrangers qui veulent imposer leurs coutumes aux Français. Du rêve, on est passé au cauchemar.

Transports. Tant de raccourcis pour un peuple qui a souvent apporté les bonnes réponses à des problèmes planétaires. Cyrano nous avait habitués à d’autres types de transports…

En songeant aux petites histoires d’aujourd’hui, l’adage s’impose : chassez le naturel, il revient au galop. Ce naturel, malheureusement, nous transporte vers de mauvais penchants… Mon âme me dit, désormais, de ne jamais me rendre en France.

J’aime trop me sentir chez moi là où je me trouve et je sais qu’en France, ce ne sera pas le cas. Le chauvinisme est une marque de faiblesse et il n’illustre aucune force de caractère chez celui qui l’exprime. Autrement, je vous confie ma tristesse de voir un pays si grand s’enfoncer dans ses «quatre i».