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Angus Road: pourquoi les reçus sont graves

11 novembre 2020, 17:07

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Angus Road: pourquoi les reçus sont graves

L’étau se resserre autour de Pravind Jugnauth. Alors que le Premier ministre n’a absolument rien dit pour se défendre dans le scandale de ses achats immobiliers (à part ses menaces contre l’express et la promesse de laver son honneur), le leader de l’opposition a révélé des documents qui ne font que corser la position déjà délicate du chef du gouvernement. Ces documents sont des reçus qui portent l’en-tête de Bel-Air Sugar Estate (BASE), et la signature de l’assistant comptable de la compagnie à l’époque, un certain Philippe Yuen Zing. Selon ces reçus, Pravind Jugnauth a, entre le 19 février et le 28 novembre 2002, procédé à des paiements totalisant Rs 3,5 millions représentant des «downpayments» pour «sale of Soreze». Soreze, c’est l’appellation familière des quatres arpents de terres que possédait BASE à Angus Road et que Pravind Jugnauth allait par la suite acheter. 

Selon ces documents donc, Pravind Jugnauth a, à cinq reprises en 2002, payé en cash : Rs 500 000 le 19 février, Rs 500 000 le 6 mars, Rs 1 million le 14 juin, Rs 1 million le 26 août, et Rs 500 000 le 28 novembre. Si ces reçus s’avèrent, au moins deux des paiements sont illégaux et violent la Financial Intelligence and Anti Money-Laundering Act (FIAMLA), loi promulguée le 10 juin 2002. L’article 5 de la FIAMLA, au chapitre «Blanchiment d’argent» et l’intitulé «Limitation of Payment in Cash» stipule que «(…) any person who makes or accepts any payment in cash in excess of Rs 500 000 (NdlR : à l’époque c’était Rs 350 000) or an equivalent amount in foreign currency, or such amount as may be prescribed, shall commit an offence ». Toute violation de cette loi rendrait l’auteur passible de 20 ans de prison maximum et d’une amende pouvant aller jusqu’à Rs 10 millions. 

Le plan initial d’Arvin Boolell était de confronter Pravind Jugnauth à ces reçus durant la PNQ, hier. Mais le speaker l’a déjoué en censurant la question que le leader de l’opposition avait soumise il a refusé de procéder avec la version du speaker. Arvin Boolell tenta quand même de déposer les reçus sur la table de l’Assemblée nationale mais le speaker l’en empêcha. Mais ce n’était que retarder l’échéance et Arvin Boolell a finalement remis ces documents aux journalistes. 

Le paiement en espèces, que représente ce reçu daté du 26 août 2002, viole la FIAMLA.

La défense de Pravind Jugnauth 

Avec ce développement intervenu hier, le Premier ministre se retrouve donc avec le devoir de se défendre sur au moins quatre fronts : paiements en cash au-dessus de la limite autorisée, corruption et conflits d’intérêts allégués (Pravind Jugnauth avait des dealings personnels avec BASE quand il payait pour acheter ces terres et au même moment il était ministre de l’Agriculture et il a professionnellement eu plusieurs fois BASE comme interlocuteur), et évasion fiscale à travers une sous-évaluation (les reçus et les dépositions à l’ICAC datent les paiements à 2001 et 2002 alors que les contrats n’ont été enregistrés qu’en 2007 et 2008 sans prendre en compte l’inflation et l’appréciation de ces biens immobiliers), et enfin le mystérieux paiement de Rs 20 millions en Angleterre par Loganaden Govinden pour une autre partie du terrain. 

L’express a tenté de joindre la direction de BASE pour obtenir sa version et celle du comptable qui a signé les reçus, mais en vain.

 

 

Pourquoi les numéros des reçus sont consécutifs ? 

<div><img alt="" height="500" src="/sites/lexpress/files/images/article/invoice.jpg" width="455" /></div>

<p>C&rsquo;est une des questions posées, à juste titre, par certains internautes après la publication de ces reçus. Pourquoi le livre de reçus ne comporte que les transactions de Pravind Jugnauth alors que celles-ci s&rsquo;étalent sur une année ? BASE n&rsquo;avait aucun autre client ? En effet, les cinq reçus sont numérotés A812 à A816. La réponse est simple, explique une des sources qui alimente les révélations de l&rsquo;express sur ce sujet : <em>&laquo;BASE ne vend pas des téléviseurs avec des ventes quotidiennes. Ce livre de reçus est dédié aux ventes immobilières qui de surcroît ne sont pas le &lsquo;core activity&rsquo; de la compagnie sucrière, et Pravind Jugnauth était à l&rsquo;époque notre seul client&raquo;</em>, dit-il. Et puis nous dit cette source, <em>&laquo;si ces reçus sont faux et qu&rsquo;il n&rsquo;a jamais payé en cash, que Pravind Jugnauth dise comment il a payé les Rs 7 millions pour les 3,500 m2. Il ne l&rsquo;a pas expliqué jusqu&rsquo;à l&rsquo;heure.&raquo;</em></p>