Publicité
[Municipales]
Quatre-Bornes : Un retour aux urnes dans une indifférence feutrée
Par
Partager cet article
[Municipales]
Quatre-Bornes : Un retour aux urnes dans une indifférence feutrée

■ Dans les centres de vote, il y avait la plupart du temps plus d’officiels que de votants.
La ville de Quatre-Bornes s’est réveillée au rythme lent d’un dimanche pas comme les autres. Après dix ans d’attente, les 60 488 électeurs enregistrés ont enfin eu l’occasion d’exercer leur droit démocratique pour élire les 20 conseillers municipaux. Un droit bafoué à trois reprises depuis 2015, rétabli par le nouveau gouvernement en poste depuis novembre dernier, qui honore ainsi l’une de ses promesses électorales.
■ Akil Bissessur accompagne sa mère.
Dans le centre-ville, les rues sont plus animées que les centres de vote. Au marché de Quatre-Bornes, les étals débordent de légumes et les ménagères affluent pour faire leurs achats. Le scrutin ? Presque un détail. «Mo pa pou al vote, mo pa konn mem non bann kandida», confie un marchand. Sur le parking, Sirouven, vendeur de fruits, a une tout autre opinion. Il est allé voter dès le matin. «Nou lavil inn tro neglize pandan dizan. Aster ki nouvo gouvernman inn redonn pouvwar pou swazir nou bann konseye, nou bizin vote», déclare-t-il.
■ Des arrangements sont faits dans tous les centres de vote pour que les électeurs porteurs de handicap puissent voter dans les meilleures conditions.
À l’école du gouvernement Louis Nellan «A», les électeurs arrivent au compte-gouttes, accueillis par un «bonjour» ou un «namasté». Une poignée de votants attendent patiemment leur tour, carte d’identité à la main. À 11 heures, seules 522 personnes avaient voté au Ward 4 sur les 8 550 électeurs inscrits. À midi, le taux de participation peinait à franchir la barre des 10 %. Un chiffre aussi glaçant qu’inquiétant pour des élections municipales censées rapprocher les citoyens de leurs élus.
■ Trois candidats du Mouvement Mauricien Citoyen Inclusif.
Avitah Babajee, jeune candidate du MMM au sein de l’Alliance du changement, consultante en informatique issue d’une famille militante, se dit confiante. Inquiète de la faible affluence ? «Non», répond-elle, persuadée que la cadence s’accélérera dans l’après-midi. Elle se présente pour, dit-elle, proposer des idées neuves visant à améliorer la vie des citadins, notamment sur les plans environnemental et infrastructurel.
■ Babita Thannoo, députée de ReA, fait son devoir civique à la Baichoo Madhoo Govt School.
Denis Rayapen, candidat de Repiblik Sitwayen Popiler, formation politique lancée par Tania Diolle, se présente pour la première fois à un scrutin. Il mise sur la proximité de ses colistiers avec les habitants pour répondre aux problématiques locales.
■ Les femmes à l’honneur au Ward 1 : Indira Kalayah de l’Alliance du changement, Doreen Arnachellum du Reform Party et Nazia Jeewon Jugoo de Republik Sitwayen Popiler.
Dans les centres, la commission électorale supervise le déroulement du vote avec méthode et rigueur. Rien n’est laissé au hasard. À l’école Hurrylall Chooroomoney, au Ward 5, le Deputy Returning Officer a dû rappeler fermement aux agents et candidats que le canvassing, consistant à serrer la main des électeurs ou à leur donner des consignes de vote, est formellement interdit.
Participation famélique et candidats confiants
Il est 13 heures. Le soleil est haut, les rues sont calmes et l’ambiance dans les bureaux de vote est à peine animée par le va-et-vient des assesseurs. Dans certains quartiers, les banderoles des partis flottent paresseusement au vent, les stands de campagne ont du mal à attirer les rares passants et l’effervescence attendue n’est tout simplement pas au rendez-vous. L’atmosphère est mi-figue mi-raisin, à l’image d’un scrutin dont l’enjeu semble ne plus parler à une partie grandissante de la population – et notamment aux jeunes, très peu visibles ce matin.
■ Avitah Babajee, candidate mauve de l’Alliance du changement au Ward 4.
Au Ward 1, à la Baichoo Madhoo Government School, le contraste est frappant entre l’énergie déployée par les candidats et le désintérêt des électeurs. Babita Thannoo, députée de Rezistans ek Alternativ dans l’Alliance du changement, connue pour avoir détrôné le Premier ministre dans son bastion de Moka–Quartier- Militaire, appelle à une mobilisation de dernière minute : «Nou’nn lager pou sa. An Desam ou’nn gagn drwa vote, pran ou drwa dan ou lame, vinn vote.» Militante du transport en commun et de la démocratie de proximité, elle sillonne les rues avec la même ferveur, malgré la désillusion ambiante.
■ Les personnes du 3e age, comme cette électrice, n’ont pas eu besoin de «grand push» pour aller voter.
Autre figure du Ward 1, Doreen Armachellum, candidate du Reform Party, confie vivre une campagne «très humaine», faite de rencontres sincères : «J’espère que les citadins vont faire la différence. Pa donn enn 120 - 0 !» Pour Nazia Jewon Jugoo, du parti Republik Sitwayen Popiler de Tania Diolle, l’enjeu est clair : redonner une place aux jeunes et créer des espaces sains face au fléau de la drogue. Son engagement s’est centré sur la jeunesse, mais celle-ci semble absente des urnes ce dimanche.
■ Les officiels des bureaux de vote ont chômé pendant une bonne partie de la journée.
Enfin, Indira Kayala, également de l’Alliance du changement, déclare : «Pandan enn mwa nou finn fer kanpagn, nou finn pas kot zot, zot finn explik nou ki problem zot ena dan lavil. Me zordi zot pa finn sorti pou vote… Nou pe atann zot, nou pou la pou zot.» Au Ward 2 au SSS Sodnac, nous rencontrons Me Akil Bissessur, qui se dit heureux de faire son devoir civique car «pendant dix ans nous avons été prives de nos droits et aujourd’hui c’est un bol d’air frais que nous avons».
■ Dès le son de la cloche à 17 heures, des préposés de la commission électorale s’affairaient à remettre les lieux en état.
À 15 heures, le taux de participation moyen atteignait à peine 18,89 %, confirmant l’impression d’un scrutin perçu comme mineur. Les dirigeants des principaux partis présents font des apparitions discrètes dans les écoles, saluent brièvement et reprennent aussitôt leur tournée des écoles. À 17 heures, les portes des 15 centres de vote se ferment, sans tension. Le taux de participation aura été de 27,01% avec 16 335 votants sur 60 488 électeurs inscrits. (Voir tableau officiel de la commission électorale ci-contre). Une petite heure plus tard, le dépouillement des votes commence…
La journée s’achève comme elle a commencé : dans un calme presque déconcertant. La démocratie a parlé… ou plutôt, elle a chuchoté.
Taux de participation
Les Élus
Publicité
Publicité
Les plus récents




