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Débats budgétaires au parlement
L’Hémicycle ou l’école buissonnière ? L’Assemblée nationale ou cour de récréation?
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Débats budgétaires au parlement
L’Hémicycle ou l’école buissonnière ? L’Assemblée nationale ou cour de récréation?

À l’instar de l’article de Santana Ponceneau dans l’express du samedi 28 juin («Élus dissipés et speaker agacée») ainsi que des dizaines de messages que j’ai reçus de Mauriciens, dont beaucoup de la diaspora à l’étranger et traduisant l’exaspération populaire face au spectacle affligeant des débats budgétaires et de la médiocrité intellectuelle de certains députés et ministres, on ne peut que déplorer l’appauvrissement du discours parlementaire et les comportements répréhensibles de certains élus. Et à écouter les commentaires remplis de sarcasmes d’amis dans les missions diplomatiques à Maurice… LA HONTE!
L’examen en comité du Budget est un grand moment d’exercice démocratique permettant à la population d’avoir des informations claires et simples sur de multiples aspects du Budget grâce aux questions de l’opposition et de rares parlementaires de la majorité. Il s’est déroulé dans une ambiance de cour de récréation, version bas de gamme. Et encore, il serait injuste pour les enfants de les comparer à certains de nos élus. Au moins, eux, ils savent écouter la maîtresse.
Quel spectacle désolant de ces parlementaires, dont les Bérenger, Assirvaden, Gunness, Goondeea, Jeetun etc., qui au lieu de fournir les informations requises, de manière factuelle et élégante seyant à leur fonction, essaient de manier l’insulte et le sarcasme dont ils n’ont guère les moyens intellectuels et le vocabulaire.
Et Bérenger qui a remis ça ! Le vice-Premier ministre sans portefeuille, en roue libre, nous a encore gratifiés de son florilège d’insultes dont il semble être lui-même l’instigateur. Après avoir traité le député Adrien Duval de «koson» précédemment (sans doute un clin d’œil inconscient à son propre miroir), voilà qu’il récidive avec un «imbécile» bien senti. Et chaque fois contraint de retirer ces mots. Comme un enfant pris la main dans un pot de confiture, mais qui n’apprend jamais la leçon.
La présidente de l’Assemblée nationale, excédée, a fini par lâcher un tonitruant «SHUT UP», aussi sonore que désespéré. On la comprend. Quand les débats virent aux chamailleries de bac de sable, il faut bien que quelqu’un rappelle que nous ne sommes pas dans un sketch de comédie populaire de Komiko, mais dans ce qui est le sanctuaire de la République.
Mais faut-il vraiment s’étonner ? Ces députés élus sur une vague de colère et de ras-le-bol contre la corruption de l’ancien régime nous rappellent à chaque séance qu’on ne remplace pas un poison par un antidote, mais parfois par un autre poison.
La culture philosophique ? N’en parlons pas. Elle s’est visiblement arrêtée aux portes de l’Assemblée. On chercherait en vain une once de réflexion, une trace de lecture, ne serait-ce qu’un vague souvenir d’un auteur classique. Non, ici, à part des ersatz de culture à coups de citations de grands auteurs, puisées çà et là, le débat se mesure à qui criera le plus fort ou lancera l’insulte la plus grasse.
L’exaspération populaire est à son comble. Non pas parce que la politique est vive – elle devrait l’être – mais parce qu’elle est devenue vulgaire, inculte, indigne. Ces élus, produits d’un vote sanction, se comportent comme s’ils avaient gagné un jeu de télé-réalité. Ils confondent l’Assemblée avec un plateau d’émission radio à scandale.
Et pendant ce temps, les vrais problèmes restent sans réponse. Le peuple, lui, n’a plus que ses yeux pour pleurer. On comprend pourquoi tant de citoyens désertent les urnes: entre l’ancien régime corrompu et la nouvelle classe braillante (hormis les grands silencieux), le choix ressemble de plus en plus à un dilemme sans espoir. J’essaie de trouver le mot juste pour souligner l’indigence culturelle et intellectuelle de certains élus.
On ne leur demande pas d’être des encyclopédies vivantes. Juste d’avoir un peu de tenue, un peu de substance, un peu de… cervelle. Mais peut-être est-ce trop demander. Peut-être avons-nous été naïfs de croire que la fonction fait l’homme ou la femme. Aujourd’hui, c’est la vacuité qui fait carrière. Et à ce rythme, le prochain remaniement ministériel se fera sur la base de followers Instagram et du nombre de vues sur TikTok. Quant aux livres, on les brûlera. De toute façon, personne ne les lit.
Il fut un temps où siéger au Parlement était fait de prestige, de réflexion, d’intelligence et d’éloquence. Devraisje rappeler ces grands tribuns qui ont fait la fierté du Parlement mauricien ? Aujourd’hui, il semble qu’un QI à deux chiffres suffit, à condition de savoir crier plus fort que son voisin. Finie l’érudition, finie la pensée structurée ! Bienvenue dans le royaume des jappements, des invectives et des formules creuses, applaudies comme de brillants aphorismes dans un théâtre de l’absurde. On en est là : à applaudir des injures comme de hauts faits d’armes, à confondre la virulence avec la vacuité.
Car enfin, quelle image donnent-ils ? Celle d’un pays gouverné par des gens qui n’ont jamais lu un livre d’images ? D’un Parlement vide de toute hauteur de vue, où l’on ne débat plus, où on aboie, on accuse, on éructe. Et pendant ce temps, les grands sujets – l’éducation, la justice, la solidarité – les attendent. Ils attendent qu’on les traite avec la gravité qu’ils méritent, pas avec des clowneries de comptoir. Peut-être faudrait-il songer à instituer un examen d’entrée pour tout candidat à un mandat législatif: savoir différencier Hugo de Gad Elmaleh, comprendre que Raisonner n’est pas Résonner, et maîtriser au moins deux idées complètes sans insultes et fautes de grammaire
Il serait peut-être temps de rappeler à certains élus que la culture ne se télécharge pas sur TikTok et que la fonction de député n’est pas un concours de sketchs ou un tremplin pour influenceurs ratés. On ne leur demande pas de réciter Platon par cœur – ils en seraient bien incapables – mais au moins de faire preuve d’une once de décence intellectuelle. De lire, peut-être? Ou est-ce devenu trop exigeant pour ces nouveaux parangons de la démocratie qui confondent Montesquieu avec une marque de fromage? Un prochain poste suit…
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