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WikiLeaks : Ramgoolam a reconduit SAJ au Réduit pour contrer une alliance MSM/MMM

6 septembre 2011, 00:00

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WikiLeaks : Ramgoolam a reconduit SAJ au Réduit pour contrer une alliance MSM/MMM

L’ambassadeur américain Cesar Cabrera explique avoir appris de la bouche de Navin Ramgoolam que le remaniement ministériel de septembre 2008 et la reconduction de sir Anerood Jugnauth au Réduit relevaient d’une stratégie électorale. Le Premier ministre envisageait déjà de soutenir la candidature de Pravind Jugnauth au No. 8.

C’est un secret de Polichinelle mais l’ambassadeur américain l’a appris de nul autre que de Navin Ramgoolam lui-même. Le remaniement conduit par le chef du gouvernement le 12 septembre 2008 et la reconduction de sir Anerood Jugnauth au Réduit avaient uniquement pour objectif d’empêcher la concrétisation d’une alliance entre le Mouvement socialiste militant mauricien (MSM) et le Mouvement militant mauricien (MMM) à l’approche des élections législatives.

Dans une note confidentielle signée Cesar Cabrera, transmise à Washington le 26 septembre 2008 et mise en ligne par WikiLeaks le mardi 30 août, l’ambassadeur relate dans les moindres détails comment Navin Ramgoolam s’est félicité de sa stratégie. Il l’a lui-même expliqué lors d’une rencontre avec l’ambassadeur US six jours après cet exercice, disant avoir voulu se décharger de certains « overwhelming duties » et prévenir, par la même occasion, toute alliance entre les deux partis de l’opposition.

Le Premier ministre est d’ailleurs qualifié de politicien rusé dans les commentaires de l’ambassadeur dans la note intitulée « Prime Minister details motives for Cabinet ». Il avance que ce dernier a réussi la prouesse d’attirer toute l’attention politique sur lui En réunissant le tour de force de jeter le blâme sur la vieille garde de son cabinet ministériel quant aux mesures impopulaires. Et à réussir à appâter le MSM en procédant à un remaniement et à prolonger le mandat du « pilier du parti », sir Anerood Jugnauth en tant que président de la République.

« Against the public discontent and opposition pressure, Ramgoolam, ever the shrewd politician, is deflecting the blame for unpopular policies on ''''old guard'' cabinet members and baiting the swing opposition party (MSM) in the same breath, by reshuffling his cabinet and re-appointing MSM stalwart Anerood Jugnauth as president. Ramgoolam looks to be avoiding any public alliances and to be focusing political attention on himself instead », écrit Cesar Cabrera.

Empêcher une alliance entre le MSM et le MMM, alors divisé dans une guerre d’egos entre leurs leaders respectifs, était la priorité des priorités de Navin Ramgoolam. Il voulait « à tout prix » éviter que ce rapprochement se fasse. Cesar Cabrera va même jusqu’à citer les confidences du Premier ministre à l’effet que le leader de l’opposition Paul Bérenger a tenté de dissuader sir Anerood à accepter un deuxième mandat.

Si le président a accepté de rester au Réduit, a souligné Navin Ramgoolam à Cesar Cabrera, c’est parce que son sens du devoir surpassait tous les arguments du leader du MMM. « Keeping the opposition in check was the PM’s primary motivation for re-appointing Sir Anerood Jugnauth president. Ramgoolam alluded to rumors that MMM leader Paul Bérenger attempted to persuade President Jugnauth not to accept the nomination, and added that Anerood Jugnauth accepted because of "his sense of duty superseded all of Bérenger’s arguments" and because his age limits any other options for political contribution to his country », poursuit l’ambassadeur.

Mais Cesar Cabrera n’est pas dupe quant aux vraies raisons du remaniement ministériel. Il note ainsi que Navin Ramgoolam s’est attiré beaucoup de critiques pour avoir contourné la Constitution, ayant nommé Rama Valayden ministre des Droits humains et deux autres membres de son cabinet comme vice-Premiers ministres.

Ce remaniement a été vertement critiqué par le père Jocelyn Grégoire suite à l’éjection d’Etienne Sinatambou comme ministre des Technologies de l’information et de la communication (TIC). Dans sa note, Cesar Cabrera souligne l’aveu que lui a fait Navin Ramgoolam à l’effet que « les membres de la communauté créole » ont eu un comportement « d’opportunistes », ceux-ci ayant demandé à Etienne Sinatambou de ne pas se satisfaire du poste de Deputy Speaker de l’Assemblée nationale.

Dans la même note, mention est faite des chaudes félicitations du secrétaire général du MSM, Nando Bodha, concernant ce remaniement. Et du choix avisé d’Arvin Boolell comme chef de la diplomatie mauricienne. Sans compter la décision de maintenir sir Anerood Jugnauth au Réduit tout en prédisant des élections anticipées pour 2009.

A la question de l’ambassadeur à Nando Bodha si le fait que l’ex-leader du parti a été reconduit à la présidence va bloquer une alliance entre le MSM et le MMM, il a confié que « the re-appointment is a peripheral move and it wouldn’t affect with whom the MSM makes alliances for projected 2010 elections ». A ce moment-là, Paul Bérenger et Pravind Jugnauth maintenait que cette décision ne va pas entamer une alliance future…

Mais lors de la réunion avec Cesar Cabrera le 18 septembre 2008, Navin Ramgoolam le fait clairement ressortir à son interlocuteur. Le « move » est éminemment politique et il pense déjà à apporter son soutien à l’un des deux camps pour l’élection partielle au No. 8 au cas où le siège d’Ashock Jugnauth est invalidé, voulant avoir toutes les cartes en main, en gardant les options ouvertes.

« Ramgoolam conceded that the presidential re-appointment may not deter an MMM/MSM alliance, but that it was a necessary move for him to "keep all of his options open." The PM noted that he would have other opportunities to prevent the opposition party alignment, including by supporting one side or another during a possible upcoming MP bi-election. In sum, Ramgoolam said that it is too soon to broker any public alliance now and that he is more than happy to keep his options open », fait ressortir l’ambassadeur américain.

Clairement, pour Cesar Cabrera, ces manœuvres de Navin Ramgoolam augurent des élections générales.