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Covid-19: ces PME qui ont bourgeonné

13 décembre 2020, 18:00

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Covid-19: ces PME qui ont bourgeonné

Coco, bombli , pistaches : ce sont les ingrédients du bonheur retrouvé. Covid-19 oblige, Luilette et Kritiman Kasseean se sont reconvertis dans la confection de condiments alimentaires. «J’ai travaillé dans l’hôtellerie pendant 32 ans. Puis, j’ai exercé au sein d’une autre boutique. Mais avant le confinement, on m’a demandé d’arrêter vu mon âge et à cause de la réduction du personnel», confie Luilette Kasseean, âgée de 54 ans. 

Ayant deux enfants étudiant à l’étranger, il est hors de question pour elle de baisser les bras. Tout comme Kritiman, son époux, 63 ans, qui comptait 37 ans de service. Il a dû prendre sa retraite anticipée. Mari et femme ont alors lancé une petite entreprise qui mitonne du chatini coco, du vindaye ou du mazavaroo de bombli écrasés sur la roche à cari, à l’ancienne. 

«On prépare la gamme Produits Nou Lakaz avec des condiments rares sur le marché. Cela a décollé grâce au bouche à oreille, à travers Facebook, ainsi que la paroisse et le Groupe Solidarité de Flacq. Une foire solidaire a été organisée pour les personnes ayant perdu leur emploi. Une nouvelle édition se tiendra le 20 décembre dans la cour de l’église Ste-Ursule», souligne-t-elle. 

Les commandes se font chaque jour, ajoute-t-il. Recyclé dans ce secteur, le couple s’attelle à la plantation, la cueillette des cocos, l’étiquetage, l’emballage. Selon Luilette Kasseean, les produits seront acheminés vers les supermarchés et autres entreprises en janvier 2021. «Je vais continuer dans ce domaine. Car avec l’âge, je ne sais où je pourrais trouver un emploi. Le Covid-19 a comme fait un bien pour moi. De plus, j’aime faire la cuisine. Mon papa était cuisinier à l’hôpital. La passion est restée. C’est difficile tout de même, par exemple, de nettoyer le bombli, entre autres. Mais j’aime ce que je fais maintenant», déclare-t-elle. 

Pour sa part, Didier Juglall, plombier de 57 ans, a dû prendre sa retraite anticipée après 27 ans de service dans le tourisme. Lui aussi s’est reconverti dans un tout autre domaine depuis le confinement. Aujourd’hui, son nouveau gagne-pain est l’élevage de volaille et la vente d’oeufs. «Suivant le Covid-19, je me suis orienté vers ce commerce. Je suis en train d’investir dedans», explique-til. Possédant des pondeuses à la maison, il se consacre désormais à cette activité. Sur chaque plateau de 100 oeufs, il gagne une marge de profit de Rs 25 à 30. Il poursuit avec sa toute nouvelle activité tout en gardant la porte du service en plomberie ouverte. 

Tout comme Jean-Marie Lapureté, 39 ans. OEuvrant dans la fabrication de tentes et paniers en raphia avec ses parents, il n’a plus de revenus faute d’arrivées touristiques. Aussi, il effectue les ventes vers d’autres lieux, notamment à La Croisée de Poste-de-Flacq. «C’est difficile. Où vais-je trouver ou même chercher un autre emploi maintenant. Avant, on exposait également nos produits dans les hôtels. On n’a plus cette possibilité désormais», confie-t-il. Parallèlement, il s’est reconverti en électricien et propose aussi ce service à domicile depuis quelques mois. 

Commandes virtuelles 

Le Covid-19 a aussi permis à Tashneem, 40 ans, d’ajoute d’autres cordes à son arc. Ainsi, confinée à la maison, elle en a profité pour se mettre à la confection de draps et autres articles de literie sur mesure. «L’idée a germé durant la pandémie en mars. J’avais déjà des stocks de tissus que j’avais achetés pour en fabriquer mais je n’avais jamais le temps avec le travail. Là, j’ai regardé des vidéos sur YouTube, j’ai commencé à en faire pour mes enfants. Comme les gens les trouvaient jolis, j’ai eu envie de me lancer», relate-t-elle. 

Avec les retombées positives, Tashneem crée la page Princess K et y ajoute ses photos. Les premières commandes ne tardent pas à venir. «Je suis dans une phase de gestion. Je choisis mes tissus, je fais la couture, je prépare des sacs aussi, je réponds aux messages moi-même. Maintenant, je veux voir si je peux trouver quelqu’un pour m’aider et grandir l’entreprise pour déléguer la couture, entre autres», soutient-elle. Voulant continuer sur cette lancée, elle prévoit une expansion de sa PME. «Je n’ai pas de stock. On me donne la dimension du lit, matelas, etc., et je fabrique les produits sur mesure afin de les livrer.» 

De mars à octobre 2020, la Small and Medium Entreprises (SME) Registration Unit du ministère du Développement industriel a enregistré un total de 2 943 PME, incluant 26 de Rodrigues. «Nous avons noté une progression dans le nombre de PME enregistrées depuis mars. On a vu beaucoup de demandes avec la pandémie, le confinement et les pertes d’emplois et surtout vers juin 2020», expliquet- on au sein de cette unité. Comparativement, de janvier à décembre 2019, ce taux était de 2 647. 

Ce foisonnement des PME est confirmé par Amar Deerpalsing, président de la Fédération des PME. «Les petites compagnies en ligne ont bourgeonné. On a vu cette opportunité émerger, surtout durant le full lockdown. Comme les Mauriciens ne voulaient pas aller aux supermarchés avec les restrictions, ils se tournaient vers les commandes virtuelles avec livraison à domicile. Ce genre de business s’est développé, surtout pour le secteur du food and beverages», constate-t-il. 

Une prolifération des producteurs de légumes sur la route et à la maison, des Mauriciens montant une petite entreprise de pâtisserie chez eux, de snacks ou des plats à livrer était également perceptible. «Comme les frontières extérieures sont fermées, cela a aussi poussé les entreprises mauriciennes à améliorer leur site Internet pour une meilleure visibilité à l’internationale», ajoute-t-il. 

Est-ce bien parti pour durer ? Si les PME fraîchement créées tendent dans cette direction, notre interlocuteur est d’avis que ces activités se focalisent sur la subsistance. «Cela permet aux entrepreneurs d’arrondir leurs fins de mois. Certains ont perdu leur travail et d’autres ont une réduction drastique de leurs revenus. Dans l’hôtellerie, par exemple, plusieurs ne touchent que leur salaire de base qui ne représente que 50 % de ce qu’ils percevaient avant. De plus, dans beaucoup de cas, les salariés n’ont plus d’heures supplémentaires comparé à la période d’avant le Covid-19», conclut Amar Deerpalsing.