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Pétards «cerf»: une tradition qui a la peau dure

29 décembre 2019, 18:00

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Pétards «cerf»: une tradition qui a la peau dure

«Le pétard cerf, c’était le moins cher sur le marché. Les gens ne pouvaient se permettre d’en acheter d’autres. Dans les familles, il fallait une boîte pour chaque enfant», raconte Daniel, 60 ans, retraité. Dans certains cas, les petits réunissaient leur argent de poche pour se ruer vers la boutique du coin, histoire de mettre la main sur une boîte à 75 sous, confie-t-il. Et bien sûr, dès qu’ils les prélevaient de leur boîte rose à l’effigie d’un grand cerf à l’avant, ils les flambaient immédiatement. «Puis on les jetait et se sauvait à toute vitesse car ça explosait très rapidement. Et si cela n’avait pas sonné, les enfants les brisaient en deux et les allumaient au centre. Ça tournait et faisait la fusée», se souvient-il.

Pendant des décennies, le pétard «cerf» a été un inconditionnel du nouvel an à Maurice, estime le sociologue Chandra Rungasawmi. Tout comme Daniel, il se remémore d’ailleurs du fait que les enfants voulaient faire durer le plaisir des pétarades. Pour cela, ils les déliaient et les sonnaient individuellement. «À l’époque, on n’avait même pas les ‘sandals’. Alors les enfants prenaient un bout de bois et les allumaient sur les braises des ‘foyers’ de cuisine. Et là, on lançait un pétard, puis un autre après un certain temps», précisent nos interlocuteurs.

D’où vient donc le pétard «cerf»? En fait, il est fabriqué à Liuyang, une ville située dans la province du Hunan en Chine, très renommée pour son industrie du feu d’artifice. Introduits par les Chinois, ces petits pétards rouges, verts et jaunes se sont vite insérés dans la culture locale, constate le sociologue.

Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Ces derniers ne semblent plus briller aux yeux des enfants, constatent nos interlocuteurs. «Ce sont les pétarades de luxe qui les attirent davantage. Celles-ci ont plus d’effets spectaculaires», soutient Daniel. Il mentionne notamment les fusées, les feux d’ar tifice entre autres pétarades hautes en couleurs et formes variées. Selon Nathalie, responsable du magasin Chong & Sons à Floréal, les «Pop Pop» sont les chouchous des enfants comme ils sonnent directement lorsqu’ils sont balancés au sol. «Le Golden Deer est surtout acheté par les revendeurs. Notre prix actuel est à Rs 20 la boîte. Le stock est parti très vite», souligne-t-elle.

De son côté, Jean-Claude Leung Loong Cheong, un des responsables de la boutique New Paris Store, confirme l’engouement pour les «Pop Pop» chez les enfants. Le «cerf» n’en démord pas et se fraye toujours sa petite place. Néanmoins, il ne se taille plus la part du lion comme auparavant. «J’ai plus d’une cinquantaine de variétés de pétarades. Les enfants ont l’embarras du choix», confie-til. Dans les supermarchés, les rayons s’achalandent de grosses fusées et feux d’artifices en tout genre. En revanche, on aperçoit quelques rangées du «pétard cerf». Celui-ci trouve tout de même preneurs. «C’est le pétard de mon enfance. Alors c’est une tradition que je me dois de perpétuer. Et je la transmets au passage à mon fils», confie Jean, 45 ans, un acheteur. Nitish, 33 ans, qui en achète cinq boîtes, s’amusent à transmettre la flamme à ses petits neveux. «Au Nouvel An, comme il y a plein de repas familiaux, on se met sur la terrasse et on les fait sonner. C’est comme un rituel qu’on attend», explique-t-il. Certes, même s’il se fait un peu plus rare qu’auparavant, le pétard «cerf» n’est pas prêt de s’éteindre de sitôt.

En chiffres

209 621 kilos de feux d’artifice ont été importés de Chine de janvier à septembre 2019. C’est ce qu’indique Statistics Mauritius. L’institution ne dispose pas de données précises pour les pétards. En revanche, pour les feux d’artifice, cela a coûté Rs 7 513 853 millions. En 2018, Maurice en avait importé 473 397 kilos de Chine et 540 kilos de La Réunion au coût de Rs 18 519 864 et Rs 78 814 respectivement. Quant à 2017, 413 535 kilos de feux d’artifice étaient achetés de Chine au coût de Rs 12 206 597 et de la Grande-Bretagne à raison de 16 kilos pour Rs 3 235.