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Venezuela: l’annonce d’une assemblée constituante aggrave la crise

3 mai 2017, 08:21

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Venezuela: l’annonce d’une assemblée constituante aggrave la crise

Les blocages de routes et les accrochages se sont multipliés mardi au Venezuela au lendemain de l’annonce par le président Nicolas Maduro de convoquer une assemblée constituante, une proposition contre laquelle les condamnations internationales se sont multipliées.

Cette proposition «est fausse, inconstitutionnelle et frauduleuse», a estimé mardi le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), Luis Almagro, dans un message vidéo.

Le ministre des Affaires étrangères du Brésil Aloysio Nunes a été jusqu’à qualifier de «coup d’Etat» l’initiative de Maduro.

«Nous sommes très inquiets des motivations de cette assemblée constituante qui passe outre la volonté des Vénézuéliens et érode la démocratie» de ce pays, a déclaré Michael Fitzpatrick, un des responsables du département d’Etat américain.

Pour la cheffe de la diplomatie argentine Susana Malcorra, ce projet ne fait que «jeter de l’huile sur le feu».

Face à ces accusations, le ministre vénézuelien de la Défense, Vladimir Padrino, s’est défendu lors d’une conférence de presse.

Il a affirmé que ce projet d’assemblée constituante visant à élaborer une nouvelle Constitution «est une proposition révolutionnaire, constitutionnelle et profondément démocratique que nous soutiendrons avec les forces armées».

A l’issue de cette déclaration, le Parlement, seule institution contrôlée par l’opposition depuis 2015, a approuvé un accord exhortant l’armée à ignorer l’appel de Maduro.

Dans ce texte, les députés de la majorité l’appellent à «respecter le cadre juridique et constitutionnel, sans tenir compte des ordres supérieurs qui portent atteintes aux droits de l’Homme et menacent les principes fondamentaux de la constitution».

'Concentration du pouvoir'

«Ce que souhaite Maduro c’est la concentration du pouvoir» et «anéantir les élections démocratiques», a déclaré le président de l’Assemblée nationale, Julio Borges.

L’opposition considère en effet que la proposition de Maduro est un coup d’Etat afin d’éviter des élections.

M. Maduro a annoncé lundi que la nouvelle assemblée, chargée de rédiger une nouvelle Constitution, sera une «constituante du peuple» et non «des partis politiques».

La moitié des 500 membres de l’assemblée seront élus, a-t-il précisé, par divers secteurs de la société. Les retraités, les minorités sexuelles ou les handicapés, les syndicats y auront par exemple leurs représentants.

Selon l’opposition, ils «sont contrôlés par le gouvernement».

Les autres membres «seront élus selon un système territorial avec un caractère municipal et local», a dit M. Maduro.

L’annonce du chef de l’Etat socialiste est intervenue un mois pile après le début de la vague de manifestations et de violences qui ont fait 28 morts.

Axes majeurs bloqués

Dès l’aube mardi, les manifestants ont bloqué les axes majeurs à travers le pays. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour déloger des opposants sur des barricades dans l’ouest de la capitale.

Dans l’est de Caracas, un groupe d’hommes non identifiés, masqués et armés, a fait face à la police après s’être adonné à des vols dans des véhicules, selon des témoignages et des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux.

Le Défenseur du Peuple, Tarek William Saab, autorité chargée de veiller au respect des droits de l’Homme, a dénoncé sur Twitter des jets de «cocktails Molotov» par des «personnes cagoulées» contre une de ses représentations dans la ville de Valencia (nord), avant d’accuser le camp anti-gouvernement.

L’opposition a appelé mardi à «une méga marche» mercredi.

La nouvelle Constitution remplacerait celle de 1999, adoptée à l’initiative de Hugo Chavez, mentor de M. Maduro.

Le chef de l’Etat n’a pas précisé si cette constituante pourrait bousculer le calendrier électoral: outre les élections régionales prévues en 2016 mais reportées, des municipales sont programmées en 2017, avant la présidentielle fin 2018.

L’opposition, qui avait conquis le Parlement lors des élections législatives de décembre 2015, accuse le pouvoir de «coup de force» depuis que, fin mars, le Tribunal suprême de justice (TSJ, Cour suprême) a supprimé l’immunité des députés et s’est arrogé leurs pouvoirs.

Devant le tollé international, le TSJ a dû faire marche arrière. Mais son initiative a déclenché une vague de manifestations au cours desquelles 28 personnes ont été tuées depuis le 1er avril, selon le parquet.

Après son annonce, M. Maduro a réuni ses ministres et les chefs des forces armées au palais présidentiel de Miraflores. Il a signé le décret convoquant l’assemblée constituante et a annoncé sans autre précision «de nouvelles formes de démocratie participative».