Publicité

Ajinomoto: bon dans la bouche, un mystère pour la science

19 mars 2016, 20:00

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Ajinomoto: bon dans la bouche, un mystère pour la science

Une poudre magique ? Le monosodium glutamate (MSG), commercialisé à Maurice sous la marque Ajinomoto, a l’art de diviser. Une fois encore, les autorités ont décidé de l’interdire de la vente. Annonce faite par Ashit Gungah, ministre du Commerce, en début de semaine.

Première cible de cette annonce : l’importateur de la marque Ajinomoto. En 2015, EAL Man Hin a importé 162 000 kg d’Ajimoto. Chiffre fourni par Thierry Liu Man Hin, directeur de la société. Depuis lundi, c’est le mécontentement chez cette société qui importe ce produit de Malaisie depuis 1955.

«Le ministère n’a pas toutes les données», affirme Thierry Liu Man Hin. Lesquelles? L’importateur nous sort une épaisse documentation. À commencer par la nouvelle brochure du produit qui indique que l’Ajinomoto est fait à partir de la fermentation d’un mélange de tapioca et de canne. Petite nuance: une précédente brochure indiquait que le sagou entrait aussi dans la composition de l’Ajinomoto. Où est-il passé entre-temps? L’épaisse documentation ne le dit pas.

«Ailleurs dans le monde, ce n’est pas un produit banni.»

«C’est un produit naturel», insiste l’importateur. Il ajoute que le produit est présent «souvent sous un autre nom que le monosodium glutamate» dans une variété de produits, dont les boîtes de conserve, sauce de soja, ou encore les nouilles instantanées.

Tout en soulignant qu’«ailleurs dans le monde, ce n’est pas un produit banni», l’importateur s’interroge: «Si on fait confiance aux standards internationaux en matière de produits dérivés où le monosodium glutamate est présent, pourquoi ne fait-on pas confiance au produit dans sa forme brute?» Thierry Liu Man Hin va plus loin, «j’ai déjà entendu des nutritionnistes dire que c’était cancérigène. Mais il n’y a aucune preuve scientifique». La documentation de l’importateur cite une pléthore de journaux scientifiques. Mais autant se rendre compte par nous-même de ce qui est dit sur cette substance, faite d’un atome de sodium pour un de glutamate.

Le site de US Food and Drug Administration répond, entre autres questions, à celle-ci: «Est-ce sûr de consommer du MSG ?». «Le Food and Drug Administration considère que l’ajout du MSG à des aliments est ‘généralement reconnu comme étant sûr’. Même si plusieurs personnes disent être sensibles au MSG, les scientifiques n’ont pu le prouver, malgré des tests effectués sur ces mêmes individus.»

Dr François Ip : «Soyez vigilant»

Médecin généraliste et acupuncteur, le Dr François Ip explique d’emblée que le MSG est un «produit naturel». «Lors de la digestion du parmesan, par exemple, le corps produit de l’acide glutamique.» C’est aussi le cas lors de la digestion des viandes et «même de la pomme de terre».

En dehors des phénomènes naturels, est-ce mauvais d’en consommer? «Il y a eu des tests en laboratoire où on a donné du MSG à des bébés souris. On a vu que cela avait endommagé leur cerveau. C’est vrai, certains diront que des souris ne sont pas des hommes. Mais par précaution, nous conseillons de ne pas en donner aux bébés», indique le médecin. Il précise : «Les effets nocifs sur l’homme ne sont pas prouvés, mais par mesure de précaution, nous conseillons de faire attention. Il faut être vigilant, ne pas faire d’excès.»

Il existe également le «chinese restaurant syndrome». Il s’agit de personnes qui après avoir mangé dans un restaurant chinois, ont des migraines, très soif, voire un dessèchement de la bouche, de fortes transpirations. «Certains ont le visage rouge. Ces personnes attribuent tout cela aux plats chinois qu’ils viennent de consommer.» Citant des études datant des années 1970, parues dans la revue Practitioner, le Dr Ip explique qu’«à l’époque, on avait remarqué que c’étaient les personnes ayant une déficience en vitamine B6 qui étaient plus susceptibles d’avoir le chinese restaurant syndrome».

Jean Pierre Lai Min, restaurateur : «Une solution de rechange»

«Beaucoup de clients nous demandent de ne pas mettre d’Ajinomoto dans leur plat, affirme le restaurateur Jean Pierre Lai Min. J’ai remarqué qu’il y a certaines personnes qui y sont allergiques. Cela leur donne des boutons et des démangeaisons.» Si l’Ajinomoto fait partie intégrante de la cuisine chinoise, car il «rend les plats plus goûteux», Jean Pierre Lai Min a déjà trouvé la solution de rechange : du bouillon de poulet fait par ses cuisiniers.

«Pas celui qui est en cubes», assure-t-il. Ce qui, au final, lui fait dire que la nouvelle interdiction de l’Ajinomoto, «cela ne change pas grand-chose pour nous».