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Inondation catastrophique à Cité Argy: la présence du ministre Balgobin décriée par des résidents

29 janvier 2023, 18:39

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Inondation catastrophique à Cité Argy: la présence du ministre Balgobin décriée par des résidents

Alors que les inondations provoquées par les pluies torrentielles de vendredi ont paralysé le pays tout entier, il a aussi été question des répercussions de l'action – ou plutôt de l'inaction – cumulative des policy-makers. À Cité Argy, la rivière sous le pont principal débordait dangereusement depuis 8 heures du matin, privant les automobilistes d'accès et causant des dégâts à une quinzaine de maisons voisines. Les équipes de la SMF – soutenues par le conseil de district de Flacq et certains habitants – la police et les pompiers sont intervenus pendant plusieurs heures pour régler le problème.

Toutefois, la présence du ministre Deepak Balgobin, élu de la circonscription, sur les lieux pendant l'intervention des services de secours n'aurait pas plu à certains habitants. Nous l’avons aperçu pendant notre reportage sur les lieux. La situation a vite empiré quand un homme lui a carrément lancé un juron, lui reprochant de ne pas avoir pris les mesures appropriées en temps voulu pour éviter une telle catastrophe. «Al rant dan lakaz bann dimounn-la to gété ki problem ena… to pe zis fer tamtam...» a-t-on entendu crier. Un autre habitant s'est exclamé, “Samem li bon pou fer!” devant des policiers et curieux venus voir comment les services de secours intervenaient – (et nous) qui regardions en silence. Ledit ministre a préféré quitter les lieux sans tarder. Mais pourquoi cette colère des habitants, a-t-on voulu savoir.

Aucune action malgré plusieurs requêtes

Dès lors, on apprend de volontaires engagés sur le terrain au sein d'associations telles que le groupe Friendship de Cité Argy et d’un activiste de la région que, malgré les nombreuses requêtes des habitants pour que cette rivière soit dépolluée, aucune action n'a été prise pendant très longtemps. «Résultat, la rivière a hébergé beaucoup de plantes aquatiques qui n'ont cessé de pousser au fil du temps, encombrant l'espace et obstruant le passage d'eau sous de la passerelle. De plus, un drain a été construit ici, dont le niveau est inférieur à celui de la rivière, ce qui fait que l'eau refoule. Ainsi, à chaque pluie torrentielle, l'eau boueuse et polluée remonte au niveau du pont, déborde complètement et répand son fort débit vers les maisons», explique l'activiste.

D’ailleurs, le chef-inspecteur Mukhood Shradhanand, responsable de l'équipe de la SMF présente, nous explique qu'une intervention de plusieurs heures était en cours pour débarrasser les plantes aquatiques accumulées et remettre une structure propre afin que le niveau des eaux ne remonte pas si les intempéries persistent. «Nous devons nous assurer que cet intervention soit faite correctement afin que, même si la pluie persiste, elle ne pose pas d’autres problèmes...»  Un autre habitant soutient que la faute reviendrait également au conseil de district de Flacq. «En novembre ou décembre, le nettoyage de la rivière aurait déjà dû être fait car nous savons tous que juste après, la saison des pluies et des cyclones se rapproche... Depuis décembre de l'année dernière, j'ai attiré l'attention du conseil et de sa direction sur cette affaire, mais en vain.»

Alors qu'on se dirige vers les maisons inondées de Cité Argy, où les services de secours procèdent à l'évacuation des eaux, on aperçoit le ministre Sudheer Maudhoo, autre élu de la circonscription n° 9, parlant aux autorités et à des habitants. Mais ce qui nous surprend, c'est qu'il n'y a aucune hostilité des habitants à son égard et qu’il intervient dans le calme pour essayer de résoudre la situation. Scène tout à fait contraire à ce que nous venons de constater un peu plus tôt, dans le cas du ministre Balgobin. Mais, selon des habitants, «le degré de connexion et de relativité est meilleur car il est généralement très présent sur le terrain. Il est intervenu dans le passé pour consulter, noter ce problème et proposer des solutions... mais là encore, lorsqu'il s'agit de mettre en œuvre les mesures, le conseil de district ne semble pas vouloir les appliquer.»

Nous avons dû prendre du temps pour saisir le sens de cet épisode avec autant de questions posées par des habitants de Cité Argy : «Si, le jour d’une situation d’extrême danger due à une inondation, des mesures immédiates pour nettoyer une rivière peuvent être prises avec la collaboration d’autorités comme le conseil, alors que le froid, la pluie et le vent violent frappent sans cesse et que l’intervention est complète en une journée dans l’intérêt public, pourquoi cette même vigueur et ce même zèle ne sont-ils pas déployés quand les gens soulèvent une inquiétude et sollicitent une intervention la première fois ? On suppose donc que l’on devrait attendre le pires des choses pour voir certaines mesures prises…?» Personne n’avait de réponse.

Nouvel an, «mem zistwar»

Ce n’est pas la première fois qu’un ministre est la cible de la colère de la population, surtout en raison d’accumulation des eaux qui mettent en danger la sécurité publique lors de pluies torrentielles. En avril 2021, Alan Ganoo avait été pris à partie par des gens révoltés, devant des policiers, à Chemin-Grenier. En effet, le ministre s’y était rendu pour un constat dans cette région touchée par des inondations après de grosses averses. Mais des insultes ont plu, lancés par des habitants. D’ailleurs, des vidéos partagées sur les réseaux sociaux témoignaient de l’indignation des gens s’exclamant, «Ale depi la... nou pa le tend to mem, nou pa le truv to mem mo frer… zot kouyonn dimounn, pou nanyé zot minis, nek zot rempli zot pos…»

Sollicité, le service de communication du ministre a fait savoir qu’il a été sur le terrain pendant plus de deux heures avec ses deux colistiers et s’est entretenu avec plusieurs personnes pour les rassurer. «Ce n’est que vers la fin qu’une poignée de personnes, qui étaient sous l’influence de l’alcool or whatever, qui s’en sont pris à lui. Le ministre a tenté de leur parler mais face à leur hostilité, il est parti» explique-t-on.

En avril l’année dernière, quatre habitants de Plaine-Magnien, dont trois membres du conseil de village, incluant le président Nazim Gurib, avaient été arrêtés car ils faisaient partie d’un groupe de personnes qui voulaient rencontrer les ministres Bobby Hurreeram et Stephan Toussaint (élus de la circonscription n° 12), après que le village avait été victime de sérieuses inondations le week-end précédent. Les ministres, qui se trouvaient au Citizen’s Advice Bureau du village, avait refusé. À la suite de quoi, tout était parti en vrille au point où ces derniers avaient dû quitter les lieux sous forte escorte policière. Cette fois, la tendance semble s’être poursuivie. L’année change… mais pas la situation, et la colère des gens non plus, semble-t-il.