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Quand l’union ne fait pas forcément la force

18 juillet 2023, 21:43

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Le bloc PTr-MMM-PMSD, s’il arrive à colmater les fissures d’origine, pourra-t-il arracher le pouvoir au MSM sans l’aide des partis satellites ? Ces nouveaux partis qui imposent leur voix au chapitre ambitionnent certes de changer la donne, mais ce sera difficile sans une base électorale, et en misant uniquement sur la base du mécontentement populaire. Dans quels réservoirs vont-ils grignoter ? Directement ou indirectement, vont-ils faire le jeu d’un des deux principaux blocs ou vont-ils pouvoir mettre fin à la dichotomie qui a longtemps caractérisé le jeu politique local, hormis, peut-être, la lutte à trois de 2019 ?

 

Ce sont les principales questions qui se posent après l’officialisation de l’alliance de l’opposition parlementaire hier. 

 

Les Subron, Valayden, Bhadain, Dookhy, Laurette (avec ou sans Sherry Singh), Belcourt, Bibi, Bodha, Hennequin, Utchanah, Sunassee, Ramdenee, Barbier, Moirt, Tan Yan et autres braves consorts, qui aspirent à servir le peuple, semblent être conscients que sans un regroupement pragmatique, ils risquent de ne pas faire le poids. Ils s’efforcent alors de mettre l’accent sur leur manque d’ambitions personnelles en inscrivant leur action davantage dans un élan collectif national (où l'ethnicité importe peu) que dans un partage d’un hypothétique gâteau du pouvoir (où tout découle de l'ethnicité). 

 

Ces dernières années, dans le sillage de l’épisode Wakashio, du pillage des achats d’urgence durant la pandémie et de l’affaire Kistnen, les dérives autocratiques du régime au pouvoir ont permis un rapprochement des forces de l’opposition. Mais cela reste ponctuel car les seconds couteaux des partis traditionnels veulent garder les nouveaux acteurs à distance, car ils risquent de les priver de tickets, délivrés par les propriétaires de partis. 

 

Ainsi les partis satellites, qui veulent moderniser le système et introduire une seconde république, se retrouvent dans un dilemme : ils ont besoin du soutien des blocs traditionnels mais, en même temps, ils veulent en finir, du moins dans leurs discours, avec les dynasties politiques. Ils disent en privé qu’il faudra rentrer dans le ventre du monstre pour l’achever, en pensant que cela ne remontera pas aux oreilles méfiantes des chefs. 

 

C’est une tendance avérée : les partis se réveillent durant les périodes d’instabilité institutionnelle mais tendent à avancer en rang dispersé, en fonction de leurs agenda et motifs de combat. La division des forces ou des voix est à la fois une cause et une conséquence du pluralisme politique. Mais pour certains partis satellites, la division peut être une opportunité à saisir. Collendavelloo, Ganoo et Obeegadoo ont bien surfé sur la vague de mécontentement au MMM pour monter trois mouvements distincts qui se retrouvent aujourd’hui à profiter des fruits du pouvoir, alors que leurs camarades militants poursuivent leur traversée du désert. Ceux-ci ont besoin, encore une fois, de Ramgoolam pour retrouver le pouvoir, alors que les trois mouvements satellites des ex-MMM restent accrochés, sans s’unir entre eux, à la dynastie Jugnauth pour profiter du soleil, tant qu’il brille encore, chacun avec son bol à la main. 

Au pouvoir, les «partis satellites» apparaissent comme des objets sans spécificité, au service d’une dynastie ou d’un régime clanique, népotiste, autoritaire, ethniciste. Dans l’opposition, ils se présentent plus souvent comme des contre-pouvoirs qui luttent pour un nouveau modèle en faveur du mauricianisme. Leurs idéaux risquent toutefois de voler en éclats s’ils doivent négocier ou contracter des alliances avec les blocs traditionnels.  La «société civile» ou encore les partis politiques auraient ainsi été détruits ou étouffés dans l’œuf.  D’ici les prochaines législatives, les partis satellites vont essayer de se muer en formations alliées afin d’augmenter leur pouvoir de négociation dans un camp ou un autre. 

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Qu’il s’agisse de l’amendement à la Declaration of Assets Act ou du projet de loi sur le financement des partis politiques, il semblerait qu’on va laisser, encore une fois, ces mêmes anciens réflexes claniques et forces rétrogrades centrifuges et occultes nous dicter.

La question est de savoir si – avant les prochaines élections générales – nous aurons accès à la déclaration des avoirs de nos élus ? Sur quel raisonnement l’ICAC, un instrument politique notoire, devrait être le seul gardien des secrets et des clés pour comprendre certains positionnements des uns et des autres, notamment sur le plan de la bonne gouvernance. Il y a aussi le dossier du financement des partis politiques qui sera repoussé, une énième fois, sous le tapis démagogique.

 

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Vers la mi-2014, avec ses 31 députés rouges contre 28 au Remake MSM-MMM, le Premier ministre d’alors, Navin Ramgoolam, ne faisait pas grand cas de l’éventualité qu’il pourrait perdre ses béquilles bleues du PMSD. Du reste, il l’avait d’ailleurs publiquement reconnu lors d’une célébration de Divali («mo pa bizin okenn bekiy mwa !») et ce, bien avant d’humilier son partenaire en jouant la carte Michaël Sik Yuen.

À l’époque, avant le scrutin de 2014, obtenir l’emblème du coq de Duval (avec ses trois députés) revêtait davantage une signification symbolique pour le Remake MSM-MMM qu’il ne représentait un risque de déstabilisation pour le PTr. Le tandem d’alors Bérenger-Jugnauth aurait pu alors inverser une tendance qui avait, jusqu’ici, tourné à l’avantage du PTr au pouvoir.

Se souvient-on toujours que grâce au pouvoir d’attraction de l’appareil d’État, le PTr de l’époque avait facilement aimanté Mireille Martin, Jim Seetaram et Pratibah Bholah (tous du MSM), alors que l’opposition, malgré ses nombreux effets d’annonce, n’a jamais pu magnétiser aucun des membres de la majorité gouvernementale. Ceux qui avaient analysé les différentes permutations possibles avec le total de 69 députés que comptait notre Hémicycle, étaient catégoriques. Le pouvoir n’aurait jamais pu échapper à Navin Ramgoolam avant les législatives de 2014. Et puis, il y a eu le «viré mam», avec les conséquences que l’on sait désormais...

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Combien de fois Xavier-Luc Duval et Paul Bérenger se sont copieusement insultés avant et surtout depuis l’étranglement manqué (dans les couloirs du Parlement) du premier par le second ? Mais c’est de l’histoire ancienne, m’a-t-on assuré cette semaine !

Dans un précédent éditorial, en 2014, l’on évoquait un programme, mis en place par un de nos compatriotes, à Harvard, pour le compte de Google, qui permet de compter le nombre de fois qu’un terme ou mot est utilisé pour dégager des tendances historiques. «Le N-Gram Viewer de notre compatriote Jean-Baptiste Michel (conçu avec son ami Erez Aiden) nous révèle que les mathématiques peuvent aider à comprendre le monde et ses acteurs. De nos jours, à l’ère du ‘Big Data’, il est devenu possible d’analyser les tendances ayant défini les sociétés et leur contexte, bref d’utiliser les mathématiques pour une compréhension plus large des phénomènes humains. Chez nous, le nombre de fois que les mots ‘Ramgoolam’, ‘Jugnauth’, ‘Bérenger’ et ‘Duval’ ont été associés à notre courte histoire politique est largement supérieur à la somme totale de tous les autres patronymes réunis.»

Au XXIe siècle, il ne faut pas minimiser le risque que, défaitiste, on finisse par croire que ces dynasties sont incontournables, même s’ils sont contraires à l’esprit républicain.