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Manière de voir: Quand Xaxa coule Rambo

19 novembre 2016, 09:28

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Sir Anerood Jugnauth, le Premier ministre, en compagnie de son adjoint, Xavier-Luc Duval. © Daren Mauree

Le leader des bleus a été forcé d’afficher ses vraies couleurs. En se démarquant des Jugnauth, il a aidé à cristalliser les dissensions au sein de l’alliance Lepep.

Le vice-Premier ministre a fait preuve d’un sens inné d’opportunisme politique durant la semaine écoulée. En pas moins de deux occasions distinctes, coup sur coup, il s’est nettement démarqué du Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, tout en montrant qu’il agit au mieux des intérêts du clientélisme à long terme du PMSD.

Mardi dernier, au Parlement, dans une attitude – rendue célèbre par Jugnauth lui-même dans le passé – de pa moi sa, li sa, Duval n’a laissé aucun doute sur le rôle personnel et direct du Premier ministre dans l’affaire Air Mauritius.

Alors que sir Anerood a systématiquement affirmé qu’il ne savait rien de ce qui se passait à Air Mauritius, Duval a laissé entendre que son No 1 était au courant de ce qui s’annonçait pour mettre fin au malaise créé par l’État dans les relations entre le directeur général Megh Pillay et les membres du conseil d’administration.

Duval lui-même a cru se dédouaner dans l’affaire Air Mauritius après que son nominé Marc Hein et luimême se sont publiquement prononcés sur le limogeage de Pillay. Si Marc Hein a condamné la manière de faire du board croupion qui débarqua Pillay, Duval déclara que le conseil d’administration devait donner des explications sur son acte.

Si on cherchait des preuves sur la solidité de l’alliance gouvernementale, on ne pouvait trouver mieux. Mais pour arriver à cela, il fallait compter sur le coup de pouce providentiel de l’homme des Private Notice Questions (PNQ). Certains observateurs étaient bien surpris mardi dernier quand Paul Bérenger choisit d’axer sa PNQ sur Air Mauritius plutôt que sur l’affaire explosive et retentissante de saisie de drogue impliquant des Mauriciens à l’île de La Réunion. Cette affaire de drogue suivait la mystérieuse pendaison du constable Arvind Hurreechurn au centre de détention de Moka et la déposition du leader de l’opposition lui-même devant la commission d’enquête sur la drogue.

Raisons tactiques de Bérenger

Mais Bérenger choisit Air Mauritius pour des raisons éminemment tactiques. En effet, tout en exploitant à son compte l’indignation soulevée par le limogeage de Pillay, Bérenger a poussé Duval à afficher ses vraies couleurs et non pas de se contenter de manger la banane par les deux bouts. Bérenger s’était mis dans une position de «pile je gagne, face tu perds» en adressant sa PNQ à Duval. Si Duval prenait fait et cause pour le board d’Air Mauritius et la famille royale Jugnauth, il était cuit politiquement. Par contre, si Duval trouvait une formule pour se démarquer de la famille royale, tant mieux pour Bérenger car cela aiderait à cristalliser les dissensions et les divisions à l’intérieur de l’alliance Lepep. Dans les deux cas de figure, Bérenger allait assurer le smoking out du leader du PMSD.

Après avoir jeté Jugnauth en pâture comme un menteur, Duval est condamné maintenant à cultiver davantage la différentiation avec le MSM. Il le fera en tablant avec vigueur sur ce qui constitue le label PMSD. Et la coïncidence a voulu que le Festival créole soit lancé immédiatement après la séance du Parlement où il a mis toute l’affaire Air Mauritius sur le dos de son partenaire. Duval a alors eu l’occasion de lancer une autre pique contre son allié sur la question combien émotionnelle de la langue créole. Ainsi, Duval a réclamé avec force que le créole soit utilisé au Parlement. Dans la même foulée, il n’a pas manqué de rappeler aux Mauriciens que certains dirigeants au gouvernement même ne sont pas d’accord à l’idée que le créole soit utilisé au Parlement. Il n’était nullement nécessaire pour Duval de mentionner le nom «Anerood Jugnauth» comme le méchant qui s’oppose résolument à l’utilisation du créole à l’Assemblée nationale.

Voici pour l’histoire ce que le Premier ministre avait déclaré au Parlement le 5 avril dernier : «There are a number of issues that would need to be addressed before contemplating the formal use of the Mauritian creole language in the National Assembly. As far as I am concerned, I will never accept to introduce Creole language in the National Assembly.»

Un «as far as I am concerned» dit dans le ton de l’ancien Rambo.

Jamais deux sans trois : il est maintenant plus que certain que du côté du PMSD, on tentera de faire un spectaculaire coup à la «socioculturelle» avec la présence de Duval au Saint-Siège à Rome. Les stratèges du MSM auront à se livrer à bien des coustics à la MBC pour que l’effet Duval soit atténué et la présence à Rome de Pravind Jugnauth amplifiée hors de proportion.