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Satish Boolell: « Il y a plus de travailleurs sociaux que de défavorisés! »

17 octobre 2010, 00:00

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Satish Boolell: « Il y a plus de travailleurs sociaux que de défavorisés! »

Satish Boolell député du Mouvement Militant Mauricien (MMM), a été président du MACOSS pendant sept ans. Il dresse un tableau édifiant de l’univers des ONG’s.

Le secteur des ONG ressemble à un business… Qu’en dites-vous ?

«ONG» veut dire «Organisation Non-Gouvernementale», ce qui signifie loin du contrôle gouvernemental. Il faut sept personnes pour créer une ONG. Pour exister, les ONG doivent s’enregistrer au bureau du Registrar of Association. A l’enregistrement, elles doivent préciser la nature de leurs activités, payer des frais d’enregistrement et fournir la liste de leurs membres. Mais le Registrar of Association ne peut pas contrôler l’action des ONG sur le terrain. Selon le Registrar of Association, il y a plusieurs milliers d’ONG à Maurice, tandis que l’action effective est d’environ 300. Je m’interroge sur ce que font les autres ONG.

A votre avis que font-elles?

Il y a toutes sortes d’ONG à Maurice. J’ai établi une classification de ces organisations. Il y a les «bongo» : les business oriented ngos, qui se tournent vers les affaires. Les «pongo» sont les politically oriented ngos, qui se mêlent de la politique. Puis, les «fongo», les family oriented ngos, des ONG où ceux qui ont accès au chéquier sont parentés. Il y aussi les post office box ngos : des ONG qui n’ont pas pignon sur rue mais qui ont une adresse postale. Bien que ces ONG ont évolué depuis… aujourd’hui, elles sont devenues des emails ngos, c’est-à-dire, qu’elles existent autour d’une adresse email. Il y a également des ONG qui n’ont qu’un objectif : que le dirigeant se fasse décoré le jour de la fête de l’indépendance, le 12 mars, en tant que travailleur social émérite. Sans oublier les travel-by-night ngos, dont les responsables aiment prendre l’avion, parfois accompagnés de proches, en cachette, de préférence sous couvert de la nuit, pour se rendre à toutes les conférences de la terre.

D’où cette impression que certains lancent des ONG afin de pouvoir voyager et bénéficier d’autres avantages…
Si toutes les ONG enregistrées auprès du Registrar of Association se mettaient toutes à travailler pendant un mois, il n’y aurait plus de problèmes sociaux à Maurice. Parfois, on dirait qu’il y a davantage de travailleurs sociaux que de défavorisés ! Du moment que l’action des ONG ne peut être contrôlée par gouvernement, a commencé la grande épidémie des ONG, tel un cancer qui a infiltré nos mœurs.

Il semblerait aussi que les ONG se limitent à quelques domaines, qu’en pensez-vous ?

En fait, bien des ONG choisissent leurs domaines en fonction de l’argent et de la couverture médiatique qu’elles peuvent obtenir.

C’est un tableau très sombre que vous dressez, n’y a-t-il pas d’ONG sincères ?

Je pense que la majorité des gens engagés dans le social sont sincères et honnêtes et qu’une minorité qui veut uniquement exploiter le secteur. Il y a beaucoup d’ONG qui abattent un travail formidable sans grands moyens. Ces ONG-là, travaillent dans le silence et n’ont pas le temps de se faire interviewées, photographiées ou filmées. Il ne faut pas être totalement pessimiste. Parfois, donner de son temps et de l’amour suffit simplement pour changer la destinée des gens dans le besoin.
Comment faire pour évaluer le retour sur investissement de l’argent donné aux ONG ?
Pour évaluer le travail des ONG, il faut que les généreux donateurs demandent à voir leurs bilans financiers. Souvent, ces derniers se soucient très peu de l’exiger. Ces donateurs se contentent d’être exemptés de la taxation. Un bilan financier donnerait une indication de ce que les ONG ont fait avec l’argent donné. Cela amènerait plus de transparence au niveau des ONG.

Puisque vous parlez de donateurs, selon vous l’argent du CSR est-il bien distribué aux ONG ?

Moi-même, je demande à être rassuré que les fonds du CSR sont distribués de façon impartiale et équitable.