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Chetan Rambans Dookun: «Je n’ai jamais connu une telle rupture de stock de médicaments»

14 novembre 2022, 21:00

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Chetan Rambans Dookun: «Je n’ai jamais connu une telle rupture de stock de médicaments»

À Madagascar pour un congrès régional, les pharmaciens de Maurice ont évalué les axes de coopération. Ceci, en vue de résoudre les problèmes actuels d’approvisionnement de médicaments. Comment faire ? Chetan Rambans Dookun, président de la PAM, nous répond.

La semaine dernière, une délégation de plus d’une vingtaine de pharmaciens mauriciens a participé au congrès de la Fédération Pharmaceutique de l’Océan Indien (FPOI), à Madagascar. Quels en sont les objectifs ?
Nous sommes à Madagascar dans le cadre du 29e congrès de la Fédération Pharmaceutique de l’océan Indien (FPOI) fondée en 1986. Elle regroupe les pharmaciens de Maurice, la Réunion et Madagascar. Cet événement s’est tenu jusqu’en 2018, année à laquelle les Comores ont intégré la fédération. Suivant la pandémie, la nouvelle édition se tient finalement en 2022.

Ainsi, du 9 au 10 novembre, nous avons participé à une série de conférences lors du congrès à Madagascar. En 2023, celui-ci se tiendra à Maurice. Les objectifs visent à développer l’esprit de solidarité et confraternité, constituer une plateforme d’échange technique, législatif et d’expériences, dispenser une formation postuniversitaire de haut niveau, organiser des rencontres entre les pharmaciens de l’océan Indien pour une réflexion commune des problèmes de santé publique qui se présentent dans la région et favoriser la synergie entre toutes les parties prenantes dans le secteur pharmaceutique.

Avez-vous eu des rencontres pour tenter de résoudre les problèmes qui n’en finissent pas comme la pénurie de médicaments et la flambée des prix entre autres?
Après les deux jours de conférences, les membres de l’exécutif des diverses associations de pharmaciens de la région se sont rencontrés le vendredi 11 novembre à 14 heures. Car Maurice, comme Madagascar, subit plusieurs problèmes dans l’industrie pharmaceutique suivant la pandémie tels que le manque de médicaments, l’approvisionnement entre autres. Nous en avons discuté lors de la réunion. Pourquoi ne pas s’entraider ?

Pourquoi se fier à l’Europe ? Comment faire pour étendre la collaboration de la FPOI, changer son appellation et inclure des pays de l’Afrique de l’Est comme le Kenya, la Tanzanie etc. Le continent africain dispose aussi de fournisseurs. Nous avons échangé sur ces aspects.

Justement, Maurice dépend beaucoup des marchés d’Asie et d’Europe pour l’approvisionnement des médicaments. Serait-ce plus avantageux de solliciter Madagascar et les pays africains ? Comment ?
Il faut considérer les deux directions. Par exemple, certains produits ne sont pas en rupture à Madagascar. À l’inverse, ils peuvent être sujets à une pénurie à Maurice. Pour d’autres médicaments, Madagascar peut être en pénurie contrairement à Maurice. Or, on gagnerait à s’entraider entre pays de la région. Par exemple, à Maurice, une compagnie précise importe du panadol. À Madagascar, une autre entreprise assure cet approvisionnement. Le fournisseur de Maurice n’achète pas ce médicament avec celui de Madagascar mais de ses contacts internationaux. Au cas où une rupture de panadol survient à Maurice, tandis que Madagascar dispose de stocks du médicament en question, nous pouvons alors entrer en jeu.

Le système de monopole de certains fournisseurs peut être une des causes d’indisponibilité des médicaments. Par exemple, depuis plusieurs mois, on ne trouve pas de panadol en sirop sur le marché. Un opérateur peut s’en approvisionner auprès d’un autre fournisseur mais comme il n’est pas enregistré à Maurice, cela occasionnera des problèmes. Nous réfléchissons aux axes de coopération avec les pays africains.

Auparavant, nous n’étions pas confrontés à de telles ruptures de médicaments durant plus d’une année. Je suis pharmacien depuis plus de 22 ans et je n’ai jamais connu une telle période de rupture de stock ou de médicaments par quota. Pour ces raisons, cette problématique figurait à la table des discussions.

Face aux problèmes d’approvisionnement des médicaments par appel d’offres, quels modèles sont utilisés par les pays participant au congrès pour plus d’efficacité afin d’assurer leurs stocks ?
Pour La Réunion, c’est facile : les médicaments proviennent de la France dont l’île sœur dépend. Pour Maurice, ce type d’approvisionnement dépend des autorités locales. Comme nous œuvrons dans le secteur privé, il est difficile d’y répondre. Notre île a signé un traité qui protège le Trademark. Ainsi, il n’y a pas de libre marché. Donc, seul un fournisseur peut importer des médicaments spécifiques. Et quand celui-ci n’arrive pas à les avoir, cela crée une rupture de stock à Maurice. Et si un autre opérateur arrive à s’en approvisionner auprès de fournisseurs différents, il ne peut les apporter. On dépend de ce système qui joue à notre détriment en cas de pénurie, et surtout à celui des citoyens qui en pâtissent. Et on voit que les prix continuent à augmenter. Avec plus de concurrence, ceux-ci baisseraient. Il faut considérer des sources alternatives pour l’approvisionnement de médicaments.