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Droits de l'homme: l'ONU entame sa visite au Xinjiang

24 mai 2022, 19:07

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Droits de l'homme: l'ONU entame sa visite au Xinjiang

La cheffe de l'ONU pour les droits de l'homme, Michelle Bachelet, entame ce mardi une visite extrêmement attendue dans la région chinoise du Xinjiang, où Pékin est accusé de mener une répression féroce contre les musulmans ouïghours.

Ce déplacement se fait pour l'heure dans la discrétion, la délégation onusienne étant tenue d'intégrer, au nom de la situation épidémique en Chine, une bulle sanitaire qui la tient à l'écart de la presse étrangère.

Aucun détail sur les lieux précis où ira Michelle Bachelet n'a été rendu public, ce qui interroge sur la latitude dont elle bénéficiera concrètement sur le terrain.

D'autant plus que le ministre des Affaires étrangères, Wang Yi, lui a dès lundi déclaré qu'il s'attendait avant tout à une visite qui puisse «clarifier la désinformation» dont la Chine s'estime victime.

Inquiets, Ouïghours de la diaspora et associations de défense des droits de l'homme ont exhorté l'ex-présidente chilienne âgée de 70 ans à ne pas se laisser entraîner dans une opération de communication orchestrée par Pékin.

Dès mardi, l'agence de presse officielle Chine nouvelle a ainsi assuré que Michelle Bachelet, devant Wang Yi, avait «félicité la Chine pour ses importantes réalisations en matière de développement économique et social et de promotion de la protection des droits de l'homme».

Des propos que la porte-parole de Mme Bachelet n'a ni confirmé ni infirmé.

Le Xinjiang (Nord-Ouest), longtemps frappé par des attentats sanglants attribués à des séparatistes et des islamistes ouïghours, fait l'objet depuis quelques années d'une répression menée au nom de l'antiterrorisme.

Des études occidentales accusent la Chine d'y avoir interné au moins un million de Ouïghours et de membres d'autres minorités musulmanes dans des camps de rééducation, voire d'imposer du «travail forcé» et des «stérilisations forcées».

Washington accuse Pékin de «génocide». La Chine dénonce le «mensonge du siècle» et présente les camps comme des «centres de formation professionnelle», destinés à combattre l'extrémisme religieux.

Attentats

Pékin dit n'imposer aucune stérilisation, mais uniquement appliquer la politique de limitation des naissances à l'oeuvre dans l'ensemble du pays, auparavant peu mise en pratique dans la région.

Présente mardi et mercredi au Xinjiang, Michelle Bachelet doit se rendre dans la capitale régionale Urumqi, théâtre dans le passé de plusieurs attentats visant des civils.

Mme Bachelet ira également à Kashgar, dans le Sud du Xinjiang, où la population ouïghoure est majoritaire et la campagne sécuritaire est réputée être particulièrement féroce.

Nursimangul Abdureshid, une Ouïghoure installée en Turquie, dit toutefois n'avoir «pas beaucoup d'espoir» que les visiteurs de l'ONU puissent «apporter un quelconque changement».

«Il faut qu'ils rendent visite à des victimes, comme les membres de ma famille, pas qu'ils participent à des mises en scène préparées à l'avance» par Pékin, déclare-t-elle à l'AFP.

Son frère a été condamné à près de 16 ans de prison, notamment pour «préparation (d'actes) violents et terroristes», a-t-elle récemment découvert dans un fichier révélé par l'AFP et réputé provenir d'une fuite des archives de la police.

«Si l'équipe de l'ONU n'a pas d'accès illimité au Xinjiang, je n'accepterai pas leurs prétendus rapports», déclare Nursimangul Abdureshid.

Anti-chinoises

Michelle Bachelet est la première responsable onusienne des droits de l'homme à se rendre en Chine depuis 2005, après des années d'âpres négociations avec Pékin sur les termes de sa visite.

«Mme Bachelet doit comprendre que ce qui est en jeu, c'est la confiance du monde dans les Nations unies», déclare Raphael David, de l'organisation International Service for Human Rights (ISHR).

Selon ses services, l'ex-présidente chilienne discutera notamment avec des membres de la société civile travaillant sur les droits de l'homme.

Dans ce contexte, un consortium de médias étrangers a publié mardi des documents censés provenir du piratage d'ordinateurs de la police du Xinjiang.

Parmi eux figurent des milliers de photographies, présentées comme ayant été prises dans des «camps de détention» et montrant les visages de nombreux «détenus».

Des accusations qui sont «le dernier exemple en date du dénigrement du Xinjiang effectué par les forces anti-chinoises», a fustigé mardi Wang Wenbin, un porte-parole de la diplomatie chinoise.

La cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, a de son côté «exigé des éclaircissements» lors d'un entretien avec son homologue chinois Wang Yi.