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MK sous administration volontaire: Éviter à tout prix la liquidation

23 avril 2020, 21:00

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MK sous administration volontaire: Éviter à tout prix la liquidation

Comme d’autres compagnies aériennes internationales, MK n’a pas été épargnée. Elle a été placée sous administration volontaire, le mercredi 22 avril, en pleine crise du Covid-19. Les administrateurs, qui veulent à tout prix éviter la liquidation, essaient de comprendre la situation et devrait dégager un plan de restructuration bientôt.

Le Covid-19 n’a pas épargné le fleuron de notre industrie aérienne nationale. Depuis hier, Air Mauritius (MK) se trouve sous administration volontaire. Sattar Hajee Abdoula et Arvind Gokhool, de Grant Thornton, ont été nommés administrateurs pour redresser la compagnie aérienne.

Déjà, ils sont nombreux à affirmer que, bien avant la pandémie, MK se trouvait en mauvaise posture. «C’est clair que MK était au bord de la faillite. La compagnie était déjà hospitalisée, maintenant elle à l’unité des soins intensifs», réagit l’économiste Rama Sithanen. Il est rejoint dans ses propos par Éric Ng. «Avant le Covid-19, MK faisait des pertes. Le coronavirus est venue accélérer la situation.»

Dans un communiqué émis le jeudi 23 avril, Sattar Hajee Abdoula soutient que MK était depuis le début d’année dans un processus de restructuration, notamment avec la mise sur pied d’un comité de pilotage pour étudier la transformation stratégique et opérationnelle de l’entreprise. Selon lui, la situation de MK n’est guère différente de celle de Virgin Australia et South African Airways, placées cette semaine en redressement judiciaire. «La situation n’est guère différente pour MK, qui est fortement dépendante du tourisme, un des secteurs les plus impactés aujourd’hui chez nous.»

Sattar Hajee Abdoula explique qu’en tant qu’administrateur, sa mission est avant tout de sauver l’entreprise. «Nous savons que la compagnie nationale d’aviation est un acteur clé de notre économie et qu’elle fait partie de notre histoire. Plus encore, MK est une source de fierté pour la population mauricienne. Et il ne fait aucun doute que cette nouvelle nous touche tous.»

L’heure est à présent au sauvetage de la compagnie aérienne et il faut éviter à tout prix la liquidation, nous dira Sattar Hajee Abdoula. Interrogé sur une première rencontre au Paille-en-Queue Court hier, il ne pipera mot, insistant tout simplement sur le fait qu’il essaie de comprendre la situation pour le moment.

Pour Rama Sithanen, ce «rescue mechanism» est une alternative à la liquidation. L’économiste avance que le redressement passera tout d’abord par des discussions et négociations avec les créanciers de MK, notamment la banque, les sociétés de Leasing pour la location des avions, les fournisseurs de carburant et les autres. «Il faut proposer un plan à tous les créanciers, ce qu’ils ont l’intention de faire en termes de sacrifice et de soutien pour la restructuration. Et deuxièmement, proposer des facilités de crédit et d’overdraft pour que MK continue à opérer.»

L’ancien grand argentier estime qu’il existe quatre possibilités pour que MK sorte de ce marasme. Tout d’abord, restructurer la compagnie aérienne, ce qui inclut les avions, les dessertes et les ressources humaines nécessaires pour les opérations. Ensuite, les actionnaires, notamment l’État, Air India, Air France, Rogers et la SIC, doivent y injecter de l’argent. Un autre scénario envisageable est de vendre la compagnie à un potentiel investisseur comme un «going concern». Ce sera à un prix dérisoire. Finalement, défusionner MK et faire le tri parmi ses autres filières d’activités, notamment l’hôtel Cotton Bay à Rodrigues et son service d’hélicoptère. Et vendre certaines subsidiaires et préserver l’essentiel, c’est-à-dire la compagnie aérienne.

Eric Ng abonde dans le même sens. «Il faut baisser la masse salariale. Même après le Covid-19, le tourisme ne va pas reprendre cette année. En attendant, il y a des coûts.» Selon lui, s’il y a des pertes et que les réserves sont à zéro, cela peut mener à une liquidation de la compagnie aérienne. Entre-temps, les administrateurs ont du pain sur la planche pour sortir notre compagnie nationale du gouffre.

C’est quoi une administration volontaire ?

<p>Selon Rama Sithanen, le conseil d&rsquo;administration, en nommant&nbsp;un administrateur, il faut que ce dernier prépare&nbsp;un mécanisme de sauvetage pour tirer la&nbsp;&nbsp;compagnie de ce mauvais pas car elle est insolvable. Ce qui signifie que les dettes sont plus nombreuses que les actifs et qu&#39;elle fait face&nbsp;à une&nbsp;&laquo;negative equity&raquo;. Même placée sous administration volontaire, MK&nbsp;devra&nbsp;trouver des moyens pour opérer. Pendant ce temps, la compagnie aérienne doit continuer ses opérations sous la tutelle de l&rsquo;administrateur et des créanciers.</p>

 

Pourquoi la nomination de Sattar Hajee Abdoula fait des vagues

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	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/gallery/abdoula_satar.jpg" width="620" />
		<figcaption>Sattar Hajee Abdoula est également le président de SBM Holdings.</figcaption>
	</figure>
</div>

<p>Le placement volontaire sous administration est une situation où la compagnie se voit dans l&rsquo;impossibilité d&rsquo;honorer ses dettes à leur&nbsp;échéance. Elle peut donc choisir de se mettre volontairement sous administration. C&rsquo;est ce que nous explique un expert en la matière. L&rsquo;administrateur prend contrôle de la compagnie mais il exercera d&rsquo;autres pouvoirs supplémentaires, tels que la renégociation des dettes avec les créanciers.</p>

<p>L&rsquo;administrateur pourrait, par exemple, leur demander&nbsp;d&rsquo;accepter le remboursement d&rsquo;une partie seulement, disons 80 % des dettes en règlement final. Chaque créancier se verra proposer une offre. Y compris les banques. Dans le cas de MK, il est fort probable qu&rsquo;Airbus, par exemple, se voit offrir un règlement partiel pour les achats controversés des six avions, dont deux ont été loués à South African Airways.</p>

<p>Si les créanciers dans leur majorité n&rsquo;acceptent pas les propositions au bout des 40 jours d&rsquo;administration, la compagnie devra&nbsp;être placée sous liquidation. À noter que ce délai de 40 jours pourrait être étendu après l&rsquo;approbation de la cour commerciale. Le ou les créanciers peuvent opter pour la liquidation, s&rsquo;ils pensent pouvoir en sortir gagnants.</p>

<p>Par exemple, Airbus pourrait ne pas accepter une réduction des dettes de 20 % et choisir à la place une liquidation, auquel cas le constructeur&nbsp;aéronautique reprendrait ses avions qu&rsquo;elle revendra sans perdre trop d&rsquo;argent. On se demande si Airbus accepterait de perdre disons 20 % ou de reprendre les avions et ne trouver aucun client, vu la situation catastrophique mondiale dans le domaine de l&rsquo;aviation. Ainsi iront les tractations, la liquidation s&rsquo;annonçant plus grave pour MK et surtout ses employés. Car avec la liquidation, c&rsquo;est l&rsquo;arrêt des opérations.</p>

<p>Et les banquiers ? C&#39;est&nbsp;le même procédé. La SBM,&nbsp;un de ses plus gros créanciers, devra décider de concéder une baisse de la dette ou&nbsp;saisir les garanties, si elle en a. Si elle n&rsquo;en a pas, la SBM serait forcée d&rsquo;accepter l&rsquo;offre des administrateurs de MK. Si elle en a, par exemple, sur les bâtiments, la SBM devra réfléchir si cela vaut le coup de les saisir pour les revendre. Bref, la SBM aura un choix crucial à faire. Or, comme l&rsquo;ont dit Patrick Assirvaden et un expert-comptable, rien n&rsquo;empêche la SBM de sacrifier ses intérêts à ceux de MK, ce qu&rsquo;elle ne ferait pas normalement. Mais comme elle est dirigée de fait par le gouvernement, ce dernier peut la pousser à accepter de perdre de l&rsquo;argent pour renflouer MK.</p>

<p>C&rsquo;est ici que le rôle de Sattar Hajee Abdoula est déterminant : défendra-til les intérêts de la SBM, dont il est le Chairman, ou&nbsp;ceux de MK qui est aussi sous le contrôle effectif du gouvernement ? C&rsquo;est pour cela que nombre d&rsquo;experts-comptables se disent outrés que Sattar Hajee Abdoula ait accepté ce poste d&rsquo;administrateur. <em>&laquo;C&rsquo;est une honte pour la profession comptable et j&rsquo;espère que Sattar Hajee Abdoula se ressaisira&raquo;, </em>nous confie l&rsquo;un d&rsquo;eux. Sinon, les créanciers peuvent bien contester sa nomination. Cela ne risque pas d&rsquo;être la SBM en tout cas, dont il est le président&hellip;</p>

<p>Les mesures proposées par l&rsquo;administrateur peuvent inclure une nouvelle injection de capitaux. <em>&laquo;Qui le fera à part le plus gros, le gouvernement ?&raquo;</em> se demande un comptable<em>. &laquo;Et pourquoi injecter des capitaux si les revenus ne couvriront&nbsp;pas&nbsp;les dépenses à moyen ou à long terme ?&raquo;</em> C&rsquo;est pour cela que notre interlocuteur penche plutôt pour une réduction des dépenses, à commencer par un dégraissage massif du personnel.</p>

<p>Interrogé sur sa nomination en tant qu&rsquo;administrateur de MK alors qu&rsquo;il est également Chairman de la SBM, Sattar Hajee Abdoola n&rsquo;a pas souhaité faire de commentaires.</p>