Publicité

Viennent de paraître: quand les auteurs mauriciens ne craignent pas le froid

24 juillet 2019, 16:17

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Viennent de paraître: quand les auteurs mauriciens ne craignent pas le froid

Pas frileuse pour un sou. La production littéraire locale a encore de beaux jours devant elle. Petit florilège d’ouvrages qui viennent de paraître. Il y en a pour tous les goûts.

LPT respecte l’orthographe officielle… à une exception près

Un choix significatif. Au détour de deux contes de fées, Ledikasyon Pu Travayer (LPT) a décidé de publier deux histoires en utilisant l’orthographe officielle du kreol, «ki servi dan lekol». En s’autorisant une, «seule dérogation mineure».

C’est le point clé de la préface du livre petit format regroupant BelO-Bwa Dorman et Bolom Labarb Ble, deux adaptations des contes de Charles Perrault. Les auteurs de ces adaptations – Anne-Sophie Pyanee et Alvina Bijou – ont remporté la sixième édition du littéraire organisé par LPT. Leur œuvre, publiée par l’organisateur du concours, vient de paraître dans ce petit format, «kuma enn espes ‘zimlaz’».

LPT ne manque pas de réaffirmer sa flexibilité concernant l’orthographe, suivant en cela le système anglophone, où c’est l’éditeur et l’auteur qui s’accorde sur la manière d’écrire. «Leta pena gran soz pu fer ladan.» Contrairement au système français, «kot minis Ledikasyon pas enn lalwa pu dir kimanyer eple apre konsiltasyon avek so Académie».

Mais, surtout, LPT rappelle que sa pratique de l’orthographe s’est développée sur 42 ans : «Seki mars pli byin dan nu kour literesi adilt, seki loter nu pibliye kontan, e lefe sa ena dan piblik, seki nu servi dan nu prop minits ek korespondans.»

La publication de ces deux traductions/adaptations représente pour LPT «enn moman dan listwar». Le kreol comme matière à l’école est entré au secondaire. «Alor, li irzan pu furni zot zafer pu lir.»

LPT rappelle aussi son «estim pu linportans tradiksyon dan evolisyon enn langaz ekrit. Nu ti ule nercher enn lintere dan sa metye byin difisil la».

Loga Virahsawmy: Amour, à mort, à meurtre

<div style="text-align:center">
	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/article/loga.jpg" width="620" />
		<figcaption></figcaption>
	</figure>
</div>

<p style="text-align: justify;"><em>&laquo;Horror! A young lady in her white wedding dress, holding her bouquet, with shoed and everything on including her jewellery ready to go to church laid on the bed like a dead body.&raquo;</em> Ainsi démarre le thriller Hell in Paradise. Il s&rsquo;agit du second roman de Loga Virahsawmy.</p>

<p style="text-align: justify;">Sous sa plume, la jeune mariée, Frances Arnaud, a tout ce que l&rsquo;on peut envier. Elle vient de la bourgeoisie des quartiers huppés de Floréal. Les indices pointent en direction de Thabo Dumi, le futur marié, originaire de Namibie.</p>

<p style="text-align: justify;">Dès lors, Loga Virahsawmy n&rsquo;épargne personne. Ni la presse à sensation qui titre : <em>&laquo;Black man murders white woman&raquo;, &laquo;Should Africans marry white Mauritians ?&raquo;</em> ou encore<em> &laquo;White girl framed to marry black man&raquo;</em>. Egratignant au passage les mentalités racistes. Ni la police. Dans son roman, Loga Virahswamy met en scène le commissaire de police et son équipe en flagrant délit de brutalité policière.<em> &laquo;After the anus ordeal Thabo was chained to the chair. Three police officers slapped and kicked him so hard that blood kept oozing from his nose and mouth, his eyes were all swollen and his eyebrows cut.&raquo;</em> Toute allusion à des faits réels est loin d&rsquo;être fortuite. À la prochaine étape : la police qui crucifie les médias.</p>

<p style="text-align: justify;">Mais rebondissement dans l&rsquo;histoire, tous découvrent après coup que dans la famille du présumé coupable, il y a <em>&laquo;the best criminal lawyer that the best university of the world has produced&raquo;.</em></p>

<p style="text-align: justify;">Au fur et à mesure du procès, le lecteur va retrouver les péripéties des high profile cases. Même le Premier ministre s&rsquo;en mêle, sous la plume de Loga Virahsawmy. L&rsquo;atmosphère est de plus en plus viciée. Mais qui est donc a voulu la mort de la jolie mariée, la petite fille de riches ? Et si le mobile du crime était ailleurs ? Du côté des sentiments d&rsquo;un homosexuel, qui tentait d&rsquo;empêcher un mariage.</p>

Les mystères de Bel-Ombre sondés par Jean Pierre Lenoir

<div style="text-align:center">
	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/article/vous_1.jpg" width="620" />
		<figcaption></figcaption>
	</figure>
</div>

<p style="text-align: justify;">Près de trois cents ans d&rsquo;histoire. Et toujours des mystères irrésolus. C&rsquo;est aussi sans doute ce qui fait le charme de Bel-Ombre. Cette région du Sud fait partie de la<em> &laquo;filiation intime&raquo;</em> de Jean Pierre Lenoir. Avec amour et force recherches, c&rsquo;est ce qu&rsquo;il raconte dans Bel Ombre entre mer et montagne. La seconde édition vient de sortir aux Éditions du Corsaire.</p>

<p style="text-align: justify;">L&rsquo;auteur ne cache pas sa<em> &laquo;chance exceptionnelle&raquo; </em>de connaître ce vaste domaine à travers les yeux de son grand-père, Édouard Rouillard, <em>&laquo;alors actionnaire principal de l&rsquo;établissement sucrier&raquo;.</em> Fort de cet héritage, l&rsquo;auteur a enrichi la deuxième édition de l&rsquo;ouvrage de deux chapitres qui font courir l&rsquo;imagination. D&rsquo;abord Beau Champ Résidence d&rsquo;été des gouverneurs ? Point de départ, le témoignage de Nicholas Pike, consul des États-Unis à Maurice à partir de 1867. En 1873, il publie Sub Tropical Rambles in the Land of the Aphanapteryx. Jean Pierre Lenoir raconte : <em>&laquo;Dans ce livre Pike mentionne Beau Champ en écrivant que c&rsquo;est à cet endroit que plusieurs gouverneurs venaient passer les mois d&rsquo;été.&raquo;</em> Oui, mais où ?</p>

<p style="text-align: justify;">L&rsquo;auteur dit être allé aux sources. Il consulte une gravure datant de 1828, une autre extrait d&rsquo;un ouvrage de Guy Rouillard. Il compare les mesures, le nombre de portes et de fenêtres de diverses bâtisses. Ce qui le mène tout droit vers la propriété de Frederica. <em>&laquo;Peut-être qu&rsquo;à la troisième édition de ce livre dans quelques années Beau Champ nous aura livré ses autres secrets.&raquo;</em></p>

<p style="text-align: justify;">L&rsquo;autre mystère qui a retenu l&rsquo;attention de Jean Pierre Lenoir se trouve dans le chapitre intitulé Telfair or not Telfair ? Dans cette deuxième édition, il s&rsquo;intéresse à une maison qui a peut-être été la maison de Charles Telfair.</p>

Sylvestre Le Bon: En quête d’un père juif

<div style="text-align:center">
	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="441" src="/sites/lexpress/files/images/article/book_2.jpg" width="300" />
		<figcaption></figcaption>
	</figure>
</div>

<p style="text-align: justify;">Savoir qui est son père. Interrogations légitimes d&rsquo;un fils. Sauf que cette quête prend une tout autre tournure quand elle a pour cadre l&rsquo;holocauste. C&rsquo;est ce par- cours à rebours que raconte Sylvestre Le Bon, dans son dernier roman, Le rapport du ciel triste. L&rsquo;ouvrage vient de paraître aux Éditions Assyelle.</p>

<p style="text-align: justify;">Habillement, l&rsquo;auteur trace un sentier invisible entre la <em>&laquo;très vieille tante, ancienne résistante et romancière, dont le vécu a donné naissance à un personnage clé de ce roman&raquo;</em> et le cimetière des juifs à Saint-Martin. Ces êtres incarcérés à la prison de Beau-Bassin, qui n&rsquo;ont jamais pu repartir pour la terre promise.</p>

<p style="text-align: justify;">Dans ce chassé-croisé où la grande Histoire n&rsquo;est jamais loin de la petite, l&rsquo;auteur a le chic de rapprocher des personnages en apparence étrangers les uns aux autres. Est-ce le recul d&rsquo;un vieillard ? Le narrateur de l&rsquo;histoire, qui déroule le fil avec tout le poids de l&rsquo;expérience. Lui qui a été largué par son épouse, partie <em>&laquo;à soixante-cinq pour suivre un type de trente ans son cadet&raquo;.</em></p>

<p style="text-align: justify;">Toujours est-il qu&rsquo;Alexandre Dunon est un fils adopté. <em>&laquo;Malgré mon phénotype, je sentais bien que je n&rsquo;avais rien en commun avec cette communauté de Maurice qui tenait les rênes des affaires et qui, plus de deux cents ans après la révolution en France, se croyait dépositaire des prérogatives de l&rsquo;ancienne noblesse.&raquo; </em>Alexandre Dunon, l&rsquo;orphelin a été adopté par Zéphyr Manant, le jardinier de l&rsquo;orphelinat. On est encore à cette époque où, à Maurice, dans les églises catholiques, on pratique la règle des bancs réservés.</p>

<p style="text-align: justify;">Il suffira d&rsquo;un petit bout de papier que Zephyr mourant donne à Alexandre, pour le jeter sur les routes. À la recherche du père. En chemin, ou plutôt en train, il croisera son frère. Le tout dans une langue ciselée et poétique, très travaillée par la plume de Sylvestre Le Bon. Ce roman illustre la maturité stylistique de l&rsquo;auteur. Les changements de rythmes de l&rsquo;histoire, les changements de conscience témoignent de la solide charpente qui sous-tend ce texte sensible. Le va-et-vient entre présent et passé, pour mieux plonger le lecteur et le chaos de la Seconde Guerre Mondiale montre bien que les meurtrissures de l&rsquo;Humanité, plus de 70 ans sont toujours à vif, dans des endroits insoupçonnés.</p>

Ce qu’il faut retenir de l’action du maulana Abdul Aleem Siddiqui

Un «missionnaire visionnaire». C’est en ces termes que Cassam Uteem revient sur le parcours du maulana Abdul Aleem Siddiqui. L’ancien président de la République signe l’avant-propos de l’ouvrage qu’Ibrahim Alladin, universitaire d’origine mauricienne qui a une longue carrière au Canada et en Russie, consacre à l’homme religieux. Maulana Abdul Aleem Siddiqui His Life, Thoughts and Message vient de paraître chez BM Publications.

Né en Inde en 1892, l’homme religieux, grand voyageur est venu à Maurice plusieurs fois. En 1953, il a par exemple assisté à la cérémonie marquant le centenaire de la Jummah Mosque. L’ouvrage qui lui est consacré explique que cette personnalité influente qui parlait sept langues était aussi philosophe, poète, auteur et un brillant orateur.

En avant-propos, Cassam Uteem – qui a rencontré Abdul Aleem Siddiqui une fois – recommande la lecture de la conversation entre l’homme religieux et le prix de Nobel de littérature, George Bernard Shaw. Conversation, qui, selon le préfacier, «reveals the erudition of the ‘learned sage’, as Shaw describes maulana sahib. The ‘grand old man’ Shaw was really impreddes with the extent of his knowledge of not only the Quran and Islam but also about world history especially the events related to the sordid activities of the ruling Church dignitaries and later the Crusades that resulted in the cold-blooded massacre of thousands of innocent people. Maulana Sahib wanted to stress the fact that the doings of its adepts do not necessarily reflect the teachings of a particular religion, be it Christianity of Islam».

Cassam Uteem écrit que l’homme religieux, en tant qu’«ambassadeur de l’islam», se mêlait aussi de la vie de la cité. Ainsi, lors de l’une de ses visites à Maurice, «he petitioned the then Governor of Mauritius for the introduction of Muslim Personal Law». Ou encore, «when he realized the unjust and unjustified Hajj Tax imposed on foreign nationals performing Hajj, he appealed to the King of Saudi Arabia to consider repealing the said tax».