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Arrestation de Rex Stephen: who’s next parmi les avocats?

27 octobre 2018, 00:00

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Arrestation de Rex Stephen: who’s next parmi les avocats?

Après plusieurs mois d’enquête, l’Independent Commission against Corruption (ICAC) a finalement obtenu le «clearance» du Directeur des poursuites publiques pour procéder à l’arrestation de Me Rex Stephen. Même si l’ancien magistrat se refuse à tout commentaire pour l’heure, son homme de loi, Me Gavin Glover, affirme que son client est secoué par cette décision. «Il est toutefois serein puisqu’il sait qu’il n’a rien fait de mal.

Pour le moment, il ne s’agit que d’une charge provisoire ; la défense attend que le «main case» soit déposé, probablement dans les semaines à venir, pour décider de la marche à suivre. L’avocat, libéré contre une caution de Rs 25 000 au tribunal de Port-Louis hier, jeudi 25 octobre, fait l’objet d’une accusation provisoire de blanchiment d’argent, en infraction à l’article 3(1) de la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act (FIAMLA). Il lui est reproché d’avoir reçu la somme de Rs 1,5 million d’une intermédiaire du trafiquant de drogue emprisonné, Peroomal Veeren.

Du côté de l’ICAC, l’on parle d’une enquête minutieuse initiée quelque temps après l’arrestation de Navind Kistnah, dans le sillage de la saisie record de 135 kg d’héroïne au port, en avril 2017. Les enquêteurs de l’ICAC découvrent alors le nom de l’ancien magistrat dans le «karné laboutik» de Peroomal Veeren. Ce document, saisi dans la cellule du trafiquant de drogue, permet aux limiers de lever le voile sur son entourage. Et les rémunérations faites aux avocats. Les renseignements obtenus mettent la commission anticorruption sur la piste d’un dénommé Aboobakar Ibrahim, qui aurait reçu Rs 1,5 million.

ICAC et non Task Force

Identifié comme le clerc de l’avocat Stephen, il est entendu par l’ICAC le 27 avril 2017. Il explique avoir reçu Rs 1,5 million d’une femme, de la part de Peroomal Veeren, pour les remettre à Me Stephen. Le même jour, l’avocat se rend volontairement à la commission anticorruption, afin de donner sa version des faits. Au cours d’une perquisition à son bureau peu après, une somme Rs 748 000 est saisie. Trois autres personnes, présentées comme faisant partie du réseau de Peroomal Veeren, ont été interrogées par l’ICAC dans le cadre de cette enquête.

«L’arrestation de Rex Stephen est ainsi le fruit d’un travail de fourmi de l’ICAC et non de la Task Force», tient à faire ressortir une source proche du dossier. La double casquette de Navin Bheekary, à la fois directeur de l’ICAC et président de la Task Force, a contribué à cette confusion, hier. Notre interlocuteur explique que Task Force ou pas, l’arrestation de Rex Stephen était déjà en préparation depuis plusieurs mois. Donc, il ne s’agit pas d’une réalisation de la Task Force instituée en août à la suite de la publication du rapport de la commission d’enquête sur la drogue.

Cependant, le nom de l’avocat est mentionné dans le rapport de l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. Outre des visites à Peroomal Veeren, la commission avait aussi mis le doigt sur le mode opératoire du caïd, qui consistait à se servir d’autres personnes pour verser de l’argent à Rex Stephen. Ce qui avait poussé la commission à recommander des investigations avancées, en raison de plusieurs violations à la FIAMLA.

Une «surprise»

Dans sa demande de révision judiciaire en Cour suprême, Rex Stephen fait état «d’allégations et de critiques infondées» contre sa personne dans le but de nuire à sa réputation et à sa carrière. Connu comme un avocat et un militant proche des mouvements de gauche comme le MMM, Lalit puis Rezistans ek Alternativ, Rex Stephen a été celui qui avait mené avec succès le cas de Rezistans ek Alternativ contre la déclaration ethnique devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies et la Cour suprême. Tenant compte de cette réputation, plusieurs de ses confrères s’étonnent d’ailleurs de ces révélations. «Je ne savais pas que Rex Stephen avait défendu des trafiquants de drogue. C’est une surprise pour moi», commente un ancien du barreau. 

Sa demande de révision judiciaire n’a pas freiné les ardeurs des autorités. Qu’en pense Me Gavin Glover ? «Je n’y vois aucun problème. L’ICAC a agi sur des faits particuliers alors que la commission Lam Shang Leen fait des suppositions.» Rex Stephen comparaîtra de nouveau le 13 février 2019.

Les différentes demandes de révision judiciaire en Cour suprême ne devraient ainsi pas être un moyen de dissuasion pour les enquêteurs. Ceux qui sont dans le collimateur de l’ICAC et de la Task Force sont avertis.  Cette arrestation jette le discrédit sur tout le barreau, qui avait déjà pris un sale coup avec les conclusions de la commission drogue. Les noms de plus d’une vingtaine de membres de la profession légale sont mentionnés dans le rapport Lam Shang Leen. «Who’s next?» s’interroge-t-on dans le milieu.

Me Antoine Domingue: «Le Bar Council ne présente pas une garantie d’indépendance»

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	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/antoine_domingue_rishi.jpg" width="620" />
		<figcaption>Me Antoine Domingue, ancien président du Bar Council.</figcaption>
	</figure>
</div>

<p style="text-align: justify;"><strong>La réputation du barreau a-t-elle pris un coup avec l&rsquo;arrestation du senior Rex Stephen?</strong><br />
	La réputation du barreau n&rsquo;est pas engagée. La présomption d&rsquo;innocence s&rsquo;applique également aux avocats. Au contraire, cette arrestation démontre que nous sommes dans un État de droit et que nul n&rsquo;est au-dessus de la loi.</p>

<p style="text-align: justify;"><strong>N&rsquo;empêche qu&rsquo;après la publication du rapport Lam Shang Leen, l&rsquo;opinion publique sur les avocats n&rsquo;est pas positive&hellip;</strong><br />
	C&rsquo;est vrai que nous devons nous préoccuper de la perception du public, sauf qu&rsquo;elle est parfois erronée. 17 avocats ont été cités dans le rapport alors que le barreau compte environ 800 membres. Ce qui représente environ 2 %. Il existe des membres qui font leur travail convenablement. Il faut arracher les mauvaises herbes et non pas jeter de la boue sur l&rsquo;ensemble de la profession.</p>

<p style="text-align: justify;"><strong>Que proposez-vous comme solution?</strong><br />
	Il faut une autorité autre que le Bar Council, qui soit régie par la loi et qui défendra les intérêts des avocats. Je vote en faveur d&rsquo;un <em>Bar Standards Board</em>, comme en Angleterre, où il n&rsquo;existe pas de tension ou d&rsquo;opposition.</p>

<p style="text-align: justify;"><strong>Le Bar Council propose la possibilité de suspendre provisoirement un membre du barreau. Pourquoi cela fait-elle débat ?</strong><br />
	Le Bar Council fait face à une féroce opposition, d&rsquo;abord pour des raisons juridiques. C&rsquo;est une entorse à la loi. L&rsquo;Ordre des avocats ne peut pas sanctionner un membre dans le cas d&rsquo;un &laquo;serious breach&raquo;. Le cas est référé à la Cour. C&rsquo;est à elle de suspendre ou pas.</p>

<p style="text-align: justify;">Le Bar Council a présenté les nouveaux règlements lors de l&rsquo;assemblée générale, jeudi dernier. Je condamne la façon dont s&rsquo;est déroulée cette réunion dite informative. Elle a été faite dans l&rsquo;illégalité. Le modérateur choisi n&rsquo;a fait que couper la parole quand cela lui convenait. Ce n&rsquo;était pas normal. Les membres seniors ont le droit de s&rsquo;exprimer librement dans une assemblée du barreau.</p>

<p style="text-align: justify;">Le Chairman aurait dû présider la réunion et non un modérateur qui n&rsquo;a même pas été élu pour le faire. J&rsquo;ai suggéré qu&rsquo;on passe au vote mais on m&rsquo;a expliqué qu&rsquo;il n&rsquo;y en aura pas.</p>

<p style="text-align: justify;"><strong>Le Conseil semble être toutefois déterminé à &laquo;mettre de l&rsquo;ordre dans la maison&raquo;. </strong><br />
	Mettre de l&rsquo;ordre, oui mais il faut suivre les procédures et respecter les textes de loi. Je suis toujours d&rsquo;accord pour donner un coup de balai mais encore faut-il savoir où commencer et jusqu&rsquo;où on peut aller. On ne peut pas, par un biais juridique, décider de se donner plus de pouvoirs.</p>

<p style="text-align: justify;"><strong>Il existe la perception que le Bar Council a mené une politique de deux poids et deux mesures après la publication du rapport Lam Shang Leen. Qu&rsquo;en pensez-vous ? </strong></p>

<p style="text-align: justify;">Cette perception existe et, à mon avis, elle est justifiée. Dans certains cas, on a l&rsquo;impression que l&rsquo;Ordre passe l&rsquo;éponge sur une personne citée et frotte une brosse métallique sur une autre. Pour cela, j&rsquo;insiste pour qu&rsquo;il y ait un <em>Bar Standards Board</em> digne de ce nom. Une autorité indépendante. Malheureusement, le Bar Council ne présente pas ce genre de garantie dans le texte tel qu&rsquo;il est aujourd&rsquo;hui.</p>