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Des Dockers’ Flats au Dockers’ Village: ce qui a changé

25 février 2017, 08:32

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Des Dockers’ Flats au Dockers’ Village: ce qui a changé

«Les conditions monstrueuses dans lesquelles le Sugar Industry Labour Welfare Fund, propriétaire des Dockers’ Flats, oblige 300 enfants, femmes et hommes, ses locataires, à vivre depuis deux mois sont difficilement croyables. Elles sont pourtant là, réelles, photographiables, agressant les sens révoltés de tout visiteur, cinglant démenti aux prétentions politiciennes d’un Welfare State, illustrant une carence humanitaire, administrative et sanitaire d’un tel degré que vous sentez une sourde colère, la honte vous envahir.» C’était l’éditorial du dimanche 24 février 1980 du Dr Philippe Forget. Édito qu’il a écrit après que Kersley Augustin, un enfant de deux ans et demi, a trouvé la mort en tombant dans un puits d’absorption aux Dockers’ Flats, à Baie-du-Tombeau. Trente-sept ans plus tard, ceux-ci ont laissé place au Dockers’ Village. L’express s’y est rendu…

À première vue, les rues du Dockers’ Village sont désertes en ce vendredi férié, 24 février. Au loin, un air de reggae. C’est le seul signe de vie. Nous suivons le son de la musique. Elle paraît venir d’un abri en tôle, planté au beau milieu d’un terrain vague au cœur même du quartier. Autour de cet abri, femmes et enfants sont assis à même le sol. À l’intérieur, des musiciens répètent. «Nous avons une journée récréative dimanche», explique Ludovic Louis, 24 ans.

Les musiciens du Dockers’ Village répètent pour la fête du quartier, qui aura lieu dimanche.

 

Autour du terrain vague, les maisons individuelles paraissent bien entretenues. Les rues sont propres. Pas une pelure de banane qu’on aura laissé traîner derrière. «Ici, on fait tout nous-mêmes. Les autorités ne nous aident pas forcément mais nous nous aidons nous-mêmes», poursuit Ludovic Louis. «Nou finn fatigé démann enn bis stop. Nou gran dimounn bizin marsé pandan 15 minit pou kapav pran enn bis», déplore-t-il.

Une des «gran dimounn» de l’endroit, Maya, raconte: «Avec le manque d’encadrement, de jeunes enfants tombent dans la drogue.» Depuis peu, le Dockers’ Village fait face au problème de la drogue. Problème que les forces vives du quartier ne comptent pas laisser empirer. «Depuis trois ans, nous avons un jardin bio, nous plantons, nous vendons, nous consommons nos propres légumes et fruits. Surtout nous encourageons les jeunes à venir travailler avec nous. Nous avons aussi acheté du matériel. S’ils en ont envie, ils peuvent s’en servir pour aller travailler dans la cour des gens», souligne Keven, 34 ans, un «zanfan Dock».

Pourtant, la mayonnaise ne semble pas prendre pour tout le monde. La cause? «Dimounn népli viv an kominoté asterla», regrette Maya. Propos qu’approuve Danielle, également une «zanfan Dock». «Avan, mem si dan Dockers’ Flats nou pa ti osi byen ki sa, omwin nou ti pé viv an kominoté. Kan nou ti malad, nou ti kapav kont lor nou vwazin. Nou ti viv kouma enn gran fami. Asterla, sakenn pu li», soupire Danielle.