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Erreur médicale : Quand des jeunes médecins de formation douteuse tuent en silence dans nos hôpitaux 

25 mai 2013, 17:31

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Erreur médicale : Quand des jeunes médecins de formation douteuse tuent en silence dans nos hôpitaux 

(For English version, click here)

 

Elle se penche sur moi. Elle demande où je ressens des douleurs. La blouse blanche et  le stéthoscope pendu autour du cou indique que cette jeune femme est médecin. Je lui dis que c’est au plexus solaire que lancine la douleur.

 


« C’est quoi le plexus solaire ? Montrez-moi où il se trouve ?», demande-t-elle.

 

Cet interrogatoire m’abasourdi. Allongé sur une lit de consultation de la salle des urgences de l’hôpital du Nord, je me demande si elle ne sait vraiment pas ce que c’est que le plexus solaire, aussi appelé plexus cœliaque. Je me dis qu’elle veut probablement vérifier si je sais de quoi je parle ?

 

Je réfléchis au ralenti. Un autre jeune médecin entre dans la salle. La doctoresse lui lance immédiatement : « To coner toi ki été ça, plexus solaire. Cotte trouver ça zaffaire là ? »

 

(Traduction : Sais-tu ce que c’est que le plexus solaire ? Où se situe cette chose dans le corps ? )
L’incident me retourne des années en arrière. Aux confidences faites par des médecins expérimentés, responsables de l’internat des jeunes médecins mauriciens formés dans les pays de l’Est ou en Chine. Ils affirment que plusieurs de ces médecins ne connaissent pas la différence entre pression sanguine systolique et diastolique.

 


« On se demande s’ils ont vraiment suivi des cours de médecine » , affirment toujours ces médecins spécialistes ou consultants. Leurs déclarations avaient fait l’objet d’un article paru dans l’express dimanche du 7 janvier 2006 sous le titre « Médecins …malgré eux » et où il était question de faux diplôme, d’étude de médecine avec un diplôme de « senior craze crazé » et d’intervention politique. http://www.lexpress.mu/node/166617

 


Ni le ministère de la Santé, ni le conseil de l’ordre des médecins n’avaient osé réagir aux affirmations de ces médecins. Certains d’entre eux avaient parlé à visage découvert alors qu’un spécialiste, qui était alors président du « Medical Council », l’ordre des médecins, avait fait un appel au Premier ministre pour redresser la situation.

 


Certains de ces mêmes médecins qui avaient parlé en 2006 affirment aujourd’hui, huit ans après, que la situation n’a pas changé et qu’elle va empirer avec l’arrivée des médecins formés en masse en Chine.

 


« Il y a peut-être plus de 300 qui étudient actuellement la médecine en Chine ou qui se spécialisent là-bas. En Chine, les super-spécialisations, cardiologie ou neurologie ne prennent que 3 ans alors que dans tous les autres pays, de l’Inde à l’Afrique-du-Sud en passant par l’Europe de l’ouest et les Etats-Unis, il faut entre cinq à six ans pour se spécialiser en cardiologie et neurologie par exemple » affirme un médecin consultant de l’Etat.

 


Dans les milieux des médecins professionnels, on affirme toujours que c’est l’ancien ministre de la Santé, Ashok Jugnauth, avec la complicité de Paul Bérenger, qui a très probablement ouvert l’avalanche des médecins médiocres en transformant l’Ordre des médecins de Maurice en un impuissant bulldog. Le certificat d’incompétence aux hôpitaux et médecins du pays, Ashok Jugnauth l’a délivré alors qu’il était ministre de la Santé. Tombé malade, il s’était fait soigner en clinique. Plusieurs leaders politiques font de même, certains se faisant soigner à l’étranger.

 


Le grand public n’a pas ce moyen. Il est condamné à se faire tuer par l’incompétence de certains médecins.

 

Ainsi, l’année dernière, le ministre de la Santé, Lormus Bundhoo, déclarait au parlement que 200 cas de négligence médicale ont été répertoriés par son ministère en l’espace de deux ans. http://www.lexpress.mu/node/99851

 


Il ne faut cependant pas tout mettre sur le dos des médecins. Incompétents ou compétents, ils doivent s’occuper souvent d’une centaine de malade en l’espace de trois heures, et n’ont qu’environ deux minutes à accorder à chaque malade pour éviter des grosses foules ou des queues interminables aux urgences ou auprès des salles de consultation des spécialistes. Difficile d’éviter des erreurs de diagnostic dans de telles conditions de travail.

 


 « Nos hôpitaux sont devenus des endroits dangereux et vous risquez de vous faire tuer par ces médecins de formation douteuse et incompétents » affirme souvent et sans ambages un de mes nombreux amis médecins de l’Etat.

 


En pensant à cela je suis descendu péniblement de la table de consultation alors que personne ne s’occupait de moi. La salle des urgences était bondée. Il était déjà 22 heures et je me suis retrouvé à l’hôpital quand une douleur atroce m’a pincé au plexus solaire alors que je rentrais chez moi dans le Nord.

 


J’ai pris ma voiture pour me rendre à une clinique privée. J’ai la chance d’avoir une assurance médicale, payée en grande partie par mon employeur. Une chance que la plupart des Mauriciens n’ont pas.