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Ethnicity in Politics and Business

26 mars 2022, 08:27

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En début de semaine, le mouvement Rezistans ek Alternativ a entrepris une nouvelle initiative en faveur de l’élimination des provisions dans nos lois électorales qui perpétuent le «communalisme» et le racisme. 

L’ethnicité est imbriquée dans notre système politique du moment qu’on demande aux candidats de déclarer leur appartenance communautaire dans leur formulaire d’inscription. Cela sert à déterminer par la suite comment répartir les sièges des best-losers en fonction du label ethnico-communal officiellement déclaré des différents candidats. Et tout cela sur la base du dernier recensement communal qui remonte à 1972. 

Au fait, le système électoral, basé sur le principe de First-past-the-post et de la délimitation des circonscriptions, déterminent, dans une grande mesure, comment les majorités parlementaires sont constituées et le Premier ministre est désigné selon des considérations ethniques et communales. Il est un fait que cela a permis à un groupe particulier de dominer le système politique depuis 1967 et d’asseoir son contrôle absolu sur l’Hôtel du gouvernement. À partir de là, les emplois, les opportunités de promotion individuelle, familiale et clanique mais aussi l’extraction des richesses de l’État se font surtout dans une direction particulière. 

Deux faits historiques se produisant durant la période menant à l’Indépendance méritent d’être soulignés dans le cadre du débat actuel sur la «décommunalisation» de la société mauricienne et la promotion de la méritocratie et des chances égales pour tous. Durant les moments forts de l’agitation communale entreprise par le mouvement extrémiste All Mauritius Hindu Congress, son journal publiait régulièrement des analyses sur la composition communale du staff des différents ministères et départements du gouvernement. On pouvait constater à partir de ces documents qu’un groupe particulier était alors particulièrement favorisé par l’administration coloniale britannique. 

Sans remporter la moindre victoire aux élections générales de 1967, le Hindu Congress aida néanmoins à construire le fondement de la politique post-Indépendance qui mena à l’implantation d’un groupe électoralement puissant dans l’administration publique. 

Cette action du Hindu Congress coïncidait avec un autre grand mouvement sociologique dans ce pays. En effet, on assista à l’émigration d’un grand nombre de Mauriciens vers l’Australie mais aussi de petits groupes vers l’Afrique australe alors nettement dominée par des Blancs boers, britanniques et portugais. Ce mouvement fit Maurice perdre des milliers de ses cadres les plus compétents qui fonctionnaient tant au niveau de l’administration publique que dans des firmes mais aussi dans l’état-major des propriétés sucrières. Cette émigration facilita grandement l’installation de nouveaux éléments dans l’administration gouvernementale mais pas dans le secteur privé traditionnel. 

Ceux qui partaient vers l’Australie allaient refaire leur vie dans ce pays car, pour eux, leur terre natale n’avait plus d’avenir. La «communalisation » à outrance de la vie politique à Maurice lors des élections générales de 1967 a, en fait, faussé le débat dont on ressent encore les séquelles en 2022. En effet, on a tellement tendance à croire que tout est outrancièrement «communaliste» au niveau du gouvernement et de ses instituions qu’on ignore le fait que les préjugés racistes et communautaires sont tout autant enracinés au niveau des entreprises privées et cela parfois même au détriment de l’efficience opérationnelle et financière. Quand les Mauriciens établis à l’étranger réalisent qu’ils ne parviendraient pas à se faire employer dans les entreprises gouvernementales, ils savent aussi que dans le secteur privé leur employabilité et leurs chances de promotion sont aussi limitées sinon inexistantes. On connaît l’obstacle de ce glass ceiling qu’on ne franchit pas quel que soit sa compétence professionnelle. 

Ce plafond de verre tel qu’on le voit toujours à Maurice en 2022, soit 189 ans après l’abolition de l’esclavage et 54 ans après l’indépendance du pays, constituerait probablement un phénomène unique parmi les pays ayant connu la colonisation et l’esclavage. On a noté cependant quelques habiles exercices de maquillage et de tokenism. Certes, il existe aussi un glass ceiling dans l’accès au pouvoir central. Pourquoi ne pas utiliser le même marteau pour briser les cloisonnements érigés dans notre société et laisser les forces de la démocratisation politique et économique et de la valorisation de la méritocratie professionnelle déterminer l’avenir de nos enfants ?