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L’honneur des uns et des autres…

11 juillet 2021, 12:49

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Un sursaut salutaire ! La démission de Gilbert Gnany comme Chairman de Statistics Mauritius démontre qu’il existe encore à Maurice un certain sens de l’éthique. Même si celui-ci garde le silence depuis sa démission lundi dernier, la coïncidence entre son départ et la polémique autour d’un incroyable changement de chiffres de la croissance (de 4,4 % à 5,4 %) en seulement 48 heures laisse comprendre qu’il y a cause à effet entre les deux événements.

Si Bérenger affirmait déjà, il y a quelques jours, que «nou ena ransegnman ki se sou presion gouvernman, an partikilie minister Finans, ki finn ena sa zigzag-la», cette fois, c’est Duval, leader de l’opposition, qui affirme (dans Le Défi) «qu’il y a actuellement un grand malaise parmi les employés de Statistics Mauritius. Beaucoup d’entre eux ont refusé d’être associés à ces dernières prévisions».

Reste à savoir, après un premier démissionnaire – et pas des moindres –, ce que feront les autres membres du board. Parce que si les dires de l’opposition s’avèrent, si effectivement il y a eu modification des chiffres après l’intervention du ministère des Finances, si comme nous nous le demandions dans l’édito de la semaine dernière, Statistics Mauritius a subi des influences externes, l’affaire serait grave et l’organisme perdrait, comme tant d’autres, sa perception d'indépendance, son sérieux et sa crédibilité. Si ce n’est déjà fait après les dernières secousses !

Est-ce que les membres actuels du Conseil et les responsables de l’organisme cautionneront cette posture faisant croire qu’il est facile de manipuler les chiffres de Statistics Mauritius ? Si d’un côté, ce dernier soubresaut confirme la crise que connaissent nos différentes institutions, avec une ingérence du pouvoir dans nombre de corps paraétatiques, d’un autre côté, la démission de Gnany témoigne d’une attitude courageuse que de rares braves possèdent. Moralisation, valeur, honnêteté ? Depuis trop longtemps, les mots ont perdu leur profondeur dans la République du copinage.

Maurice n’étant pas l’Inde où une dizaine de ministres peuvent d’un coup démissionner, ici, nos moeurs politiques sont telles qu’elles peuvent plutôt choquer, tant il est devenu normal que des nominés et des élus s’accrochent désespérément à leur fauteuil influent, quitte à perdre leur honneur. N’a-t-on pas assisté à l’indigne résistance de Sawmynaden qui n’a même pas osé dire qu’il démissionnait de son poste de ministre ? Ce, pour préférer le terme «congé politique», sûrement moins dommageable à ses yeux.

C’est dire qu’une démission volontaire, sur la base de l’éthique, quand il s’agit de ceux exerçant dans les arcanes du pouvoir, est exceptionnelle et mérite qu’on s’y attarde. Bien évidemment, il y a aussi de ces départs qui entraînent des interrogations, à l’exemple du claquement de porte de Bodha dont le rapprochement hâtif avec l’opposition met en doute ses critiques envers un système auquel il a appartenu pendant des décennies.

Quand arrive le moment de quitter la scène, il y a ceux qui partent la tête haute, d’autres qui doivent être forcés à la sortie, puis il y a une catégorie qui n’hésite pas à avoir recours à toutes sortes de manoeuvres pour rester au pouvoir. C’est ainsi que nous avons assisté à la proposition d’un vote pour amender les statuts du Comité olympique mauricien (COM), le but étant de permettre désormais à un membre de se porter candidat aux élections, même s’il a déjà atteint la limite d’âge de 80 ans. Une façon indigne qui donnera l’occasion à Philippe Hao Thyn Voon (qui fêtera ses 80 ans cette année) de rester à la tête du COM en briguant un cinquième mandat lors des prochaines élections.

Renouvellement ? Il n’y a pas que chez les politiques que les dinosaures ne veulent pas céder la place en s’accrochant farouchement au siège du pouvoir. Cela dit, quand l’on sait que cette motion a eu la faveur d’une vingtaine de fédérations sportives, on ne peut que conclure que le fameux système – décrié dans toutes les marches citoyennes – a de beaux jours devant lui… Ici, malheureusement, le sursaut attendu n’a pas eu lieu !