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Transparence

11 juillet 2021, 08:55

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Outre les rumeurs d’un énième rapprochement politique entre une section de l’opposition et le gouvernement (sur lesquelles nous reviendrons en temps et lieu), et la démission, lourde de sens, même si inexpliquée, de l’économiste Gilbert Gnany du board de Statistics Mauritius (apparemment sur fond de différends relatifs aux chiffres de la croissance économique), il y a, au moins, deux autres happenings qui méritent d’être soulignés, ici, cette semaine. 

D’abord, avec Capital Horizons, dirigée par le Mauricien Shaan Kundomal, il y a le retour imprévu de la juridiction mauricienne au-devant des actualités liées au secteur offshore. C’est, en fait, une bien mauvaise actualité, voire une vilaine publicité. Qui vient, comme un rabat-joie, teinter l’optimisme entourant la venue imminente d’une délégation de la FATF (GAFI) à Maurice.

Si tout le monde souhaite que notre pays sorte de la liste grise de la FATF et de la liste noire de l’Union européenne, il ne nous suffit pas de “tick the boxes”, comme semble le croire le ministre des Services financiers. Mahen Seeruttun, qui a sûrement dû entendre parler du travail d’investigation entrepris par The Sentry, l’ONG de George Clooney, en faveur de la lutte contre la corruption, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, devrait demander à ses officiers de prendre sans tarder contact avec M. Kundomal et The Sentry afin de tirer cette histoire au clair, et ainsi démontrer qu’en termes de transparence, Maurice allie la théorie à la pratique. 

Il faut pouvoir expliquer comment un petit propriétaire de stations-service au Zimbabwe, qui est devenu subitement un des hommes d’affaires les plus influents de son pays, arrive à placer une partie de son “butin” à Maurice ? Si ce n’est pas illégal, comme insistent les hommes de loi de Capital Horizons, il faut alors pouvoir expliquer pourquoi moralement aussi notre juridiction demeure sans reproche et politiquement correcte. Ce n’est qu’ainsi qu’on gagnera la bataille de l’opinion publique afin de garantir une sortie pérenne de la liste grise. Il faut insister sur la transparence, et éviter de traiter les journaux, comme l’express, qui participent à des enquêtes transnationales avec d’autres confrères et des ONG, d’être “antipatriotiques”; les crimes financiers ayant, avant même la mondialisation, dépassé le cadre des seuls États-nations.

Au-delà de Capital Horizons et de Shaan Kundomal, il existe encore d’autres questions qui méritent d’être tranchées, ou des zones d’ombre à éclairer. Existe-t-il chez nous des “offshore listing loopholes”, quels sont-ils… 

Ensuite, est venue la réaction de Lord Meghnad Desai, Professor Emeritus à la London School of Economics (LSE), par rapport aux sévères critiques du FMI sur la Mauritius Investment Corporation, dont Desai assurait la présidence jusqu’à tout récemment. Il faut saluer nos confrères de Mauritius Times d’avoir pu recueillir ses propos. C’est ainsi que nous apprenons que Lord Desai avait discuté avec le gouverneur de la Banque de Maurice en mars de l’an dernier avant d’accepter le poste de chairman de la MIC. 

C’est Harvesh Seegolam qui lui aurait demandé comment la Banque centrale pouvait aider le pays durant les circonstances particulières de la pandémie. “Je suivais à l’époque ce qui se passait aux États-Unis et au Royaume-Uni où ils tentaient de renflouer des entreprises qui avaient perdu du business et avaient mis en place un programme de maintien dans l’emploi, qui accordait des congés payés aux employés…”

Desai fait aussi ressortir qu’il ne sait pas trop ce que l’on dit sur la MIC à Maurice : «Je ne sais pas quelles sont les vibrations à Maurice concernant la MIC, mais je peux vous dire que nous avons beaucoup travaillé ; nous avons examiné 100 candidatures d’entreprises de tailles diverses, dont 60 ont été étudiées plus attentivement. En parallèle, nous avons dû renforcer les capacités au sein du MIC, tenir des conseils d’administration dont j’ai présidé 31 à distance. Nous avons eu un conseil d’administration très coopératif et serviable avec deux représentants du gouvernement, les deux sous-gouverneurs de la Banque de Maurice et deux personnes du monde des affaires. Il m’est toujours difficile personnellement de présider une réunion à distance, mais je pense que nous avons tous très bien réussi… » 

Et par rapport aux critiques du FMI, Lord Desai ne passe pas quatre chemins, en prenant une posture idéologique : «Pendant la majeure partie de ma vie, je n’ai jamais aimé ce que dit le FMI, et je peux également ajouter que je ne l’ai pas pris au sérieux pendant ces longues années. Ils sont toujours restés plusieurs kilomètres dans les coulisses, et ils ont changé de position sur tellement de choses. Pas de chance pour eux s’ils ont dit ce qu’ils auraient dit. L’argent est investi de manière transparente par la BoM dans la MIC, et l’audit sera maintenu sur cela. Tant que cela profite au peuple mauricien, qu’importe ce que dit le FMI ? La logique du FMI est toujours l’ancienne logique…» Pour Desai, la pandémie était si inattendue et si inhabituelle, que les politiques normales du FMI n’auraient pas été appropriées.

«Maurice a été l’un des premiers pays à adopter une proposition radicale comme la MIC. La preuve du pudding est dans la dégustation : des entreprises ont été sauvées, des emplois ont été sauvés…» 

Le Professeur avoue qu’il ne suit pas trop l’économie mauricienne : «Je n’ai pas vraiment eu le temps de suivre attentivement l’évolution de l’économie mauricienne, mais je pose des questions et on me dit qu’elle se redresse. Nous ne savons pas à ce stade s’il y aura un troisième ou un quatrième tour de coronavirus... » 

En attendant, pourquoi l’économie se trouve toujours dans une situation désastreuse malgré le fait que la BoM ait imprimé, accordé et prêté de l’argent jusqu’à plus de 30 % du PIB ? Pourquoi l’inflation est-elle si élevée ? Comment se fait-il que la roupie se soit autant dépréciée ? Qui va investir dans une économie dont la monnaie se déprécie autant…