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Welcome Uncle Joe and Tantine Kamla !!!

8 novembre 2020, 06:49

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Le peuple américain a pris son temps, a douté, mais a fini par parler. Quelque 74 millions d’entre eux ont choisi le duo inédit Joe Biden et Kamala Devi Harris pour occuper la Maison Blanche. Leur 'acceptance speech’ vient nous rappeler le contraste qui existe entre eux et Donald Trump, sans doute le plus spectaculaire accident de la riche histoire politique des Etats-Unis. 

Leur belle victoire résonne aujourd’hui, aux Etats-Unis comme ailleurs dans le monde, comme le retour du bâton de la démocratie. 

La démocratie n’est pas une fin en soi gravée dans le marbre, c’est un processus, un changement perpétuel. C’est surtout un acte de foi, qui dépend, avant tout, des gens, qui peuvent, sur la force de leurs convictions ou pas, changer un système, quel qu’il soit, verrouillé ou pas; qui peut renverser la force du mal, qu’elle soit incarnée par un milliardaire fou comme Trump, ou par des réflexes d’un passé raciste, où certains pensaient avoir plus de droit que d’autres. 

Le ticket Biden-Harris représente la victoire des faits sur les fake tweets, de la science sur l’obscurantisme et la gestion hasardeuse du coronavirus, de la diversité sur le racisme, la division et le populisme. C’est une vraiment belle victoire, qui redonne confiance, qui est un rayon de soleil dans un monde sinistre, où l’on perdait espoir. 

Dans les années 1960, quand la maman de Kamala, venant du sud de l’Inde, est arrivée aux States, elle ne pouvait pas imaginer que sa fille serait la première femme à être vice-présidente des Etats-Unis, mais elle savait, au fond d’elle, pour avoir fait ce choix d’immigration, que c’était, sans doute, le seul pays au monde, où l’on est jugé sur la méritocratie, la persévérance, et l’effort — et non pas sur la couleur de sa peau, sur ses origines, croyances ou appartenances, voire sur son accent ou son compte en banque. Ce qui n’est pas possible, en 2020, dans l’Inde de Modi ou dans Maurice de Jugnauth. 

Si Joe Biden, qui aura 78 ans dans une quinzaine de jours, est le plus vieux president candidat élu des States, il a su opérer, en choisissant sa colistière Kamala Devi Harris opérer l’un des plus beaux changements démocratiques depuis Obama. Comme je l’avais déjà écrit en éditorial, je ne dirais pas engouement sans précédent puisqu’avant la sénatrice Kamala, il y a eu Geraldine Ferraro en 1984, Barack Obama en 2008, mais c’est bien la première fois qu’une femme non-blanche se voit ainsi propulsée sur le devant de la scène, longtemps après Rosa Parks. Cela apporte un joli contraste dans cette Amérique, à l’ère de Trump, et secouée par la mort de George Floyd. 

“Tantine Kamala", 55 ans, fille d’un professeur d’économie jamaïcain et d’une oncologiste sud-indienne, s’avère un puissant symbole, sur lequel le reste du monde pourrait s’appuyer pour effectuer des changements démocratiques. 

Et avec Biden, qui a dit qu’il ne souhaite faire qu’un seul mandat, Kamala se retrouve en position de force pour l’élection présidentielle de 2024 ! 

Kamala n’est pas du genre à faire dans la dentelle, ou de sourire comme un vase à fleurs ambulant. Cette femme intelligente, pugnace, mais toujours souriante, avec un gestuel qui nous rappelle l’Inde ou Maurice, n’avait pas pris de gants contre Biden lors des primaires démocrates. Mais Biden, au lieu de lui en tenir rigueur, a apprécié son style. 

Heureusement pour elle que Kamala n’est pas née à Maurice. Elle aurait été victime, comme beaucoup d’entre nous, du système électoral et n’aurait pas pu briller comme elle brille aujourd'hui aux États-Unis. Elle serait restée au ras des pâquerettes de celles qui doivent danser au rythme des propriétaires des partis (et/ou de dynasties) traditionnels.

Le 23 mars 2008, sous le titre «Si Obama était mauricien», j’écrivais : «Encore heureux que Barack Obama ne soit pas issu du terroir mauricien. Avec un patronyme inconnu, de surcroît issu d’une union mixte, il aurait eu bien du mal à obtenir un rôle auprès d’un des trois principaux propriétaires de parti politique. Qui sont comme mandatés à vie pour valider le profil ethnique de nos hommes publics : du simple conseiller de village au président de la République. Derrière les mots d’Obama, il y a une vision, derrière cette vision, un idéal pour l’égalité des chances à tous. Derrière ceux de nos principaux leaders politiques, il y a du vent. Et de piètres conseillers !» 

Aujourd’hui, quand l’on voit un Pravind Jugnauth et son risible ministre de la Culture, qui tentent maladroitement de brimer notre liberté d’expression alors même que l’on est censé célébrer les lumières du Divali, l’on ne peut que conclure qu’en 12 ans Maurice a reculé, un peu comme les States ont reculé depuis que Trump avait remplacé Obama. Mais aujourd'hui les States ont choisi de sortir de la logique électorale qui enferme et de s’ouvrir au monde en évolution. Si Trump était la raison principale qui rendait les States moins ouvert comme pays, Uncle Joe et Kamala Devi Harris viennent nous rappeler que cette democratie reste, malgré tout, celle qui devrait inspirer le reste du monde, à bien des égards, sur le plan démocratique et électoral. Si tant que nous voulons aller vers le progrès social et sortir, enfin, des siècles de préjugés basés sur la religion et le castéisme - et chez nous sur le désuet Best Loser System. 

Sur le plan personnel, je suis rassuré que mon fils, Sami-Lee, grandisse là-bas, sur la côte Est, hors de l’influence des Trump, et sous la lumière des pionniers comme Uncle Joe et Tantine Kamala qui ont du pain sur la planche pour défaire le populisme inquiétant que l’on appelle le Trumpisme, dont on n’a pas fini d’entendre les méfaits...