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La com comme stratagème ne remplacera jamais l’info

26 septembre 2020, 07:23

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Il y a des signes qui peuvent difficilement tromper. Acculé par la rue, le régime en place tente, par plusieurs moyens, d’intimider ceux qui lui opposent un discours contraire. Mais en essayant de faire feu de tout bois, il pousse le pays vers une voie de non-retour d’une dictature, en abusant de l’appareil d’État. 

Alors qu’il y a des enquêtes bien plus sérieuses à mener, le patron du CCID, employé sous contrat, a cru bon d’arrêter, cette semaine, l’activiste Bruneau Laurette...pour un chèque sans provision de Rs 8 000. Certes, il y a loi, qui punit ce délit même si l’affaire a été réglée, surtout s’il y a un antécédent. Mais personne ne pourra faire croire à l’opinion que l’arrestation de Laurette n’avait pas pour but de le casser, lui qui voulait aller manifester devant le terrain résidentiel – hyper controversé – du Premier ministre, à Angus Road, Vacoas. 

Autre artifice de com assez grossier. Comment expliquer que la police se retrouve, outre la demande de Laurette d’aller protester devant le domicile de Pravind Jugnauth, avec deux autres demandes quasi similaires, cette fois-ci à River Walk, à quelques encablures d’Angus Road : une pour manifester devant la maison de Navin Ramgoolam et une autre pour protester devant celle de Paul Bérenger. Bien évidemment il était bien plus facile pour la police de rejeter les trois demandes, au lieu d’avoir à justifier le refus devant celle du PM uniquement. Bonne nouvelle cependant : si le beau-frère d’un ministre, disons celui de Bobby Hureeram, souhaite manifester devant mon domicile, ou celui de ma collègue Touria Prayag, pour soutenir la plainte de Rs 100 millions de PM, la police ne pourra qu’objecter, n’est-ce pas M. Servansing ? 

En 2020, au lieu d’introduire la tant promise Freedom of Information Act, c’est le délit d’opinion qui est tristement remis sur le tapis par l’intermédiaire des juristes, comme les avouées Ragavoodoo et Sonah-Ori, par ailleurs nominées politiques, ou l’avocat Ravind Chetty, alors que  les régimes démocratiques (qui ont un tant soit peu de respect pour la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789) savent que «nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi». Dans plusieurs démocraties, cet article est soutenu par l’ajout suivant : «La libre communication des pensées et des opinions est l’ un des droits les plus précieux de l’humain; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.» Face aux procès du Premier ministre, nous, éditorialistes, rétorquerons : dir nou akot nou’nn foté? 

*** 

Les journalistes du monde entier célèbrent, ce lundi 28 septembre, la Journée internationale de l’accès universel à l’information. Au gré de nos échanges, plusieurs confrères étrangers ne comprennent toujours pas que Maurice, qui se gargarise d’être un pays développé, n’a toujours pas de télévision privée ou de Freedom of Information Act. Pire, ils tombent des nues quand nous leur disons que les délits de presse à Maurice ne sont toujours pas décriminalisés. 

À l’ère des pseudo-sites d’informations et de pseudo-journalistes, à un moment où le pouvoir recrute des journalistes-mercenaires comme conseillers en com, attardons-nous sur l’un des sujets de discussion de cette année, lancé par notre confrère Warren Fernandez, qui me paraît fort approprié dans le contexte actuel : 

«It is commonplace today to say, rather glibly, that news is available for free, every one is a journalist, and there is no future for journalism. That, to me, is an example of fake news. News you receive is never free. Content costs money to produce... If you are getting it for free, it usually means someone is paying for it, and getting it to you for a reason...»