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Le temps des récompenses

23 février 2020, 14:27

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La formule est toute trouvée, elle est de de l’Estrac qui, interrogé sur les 100 premiers jours du gouvernement, parle de «la consolidation de l’État MSM». «Aucune mesure d’importance sur le plan économique alors que la situation l’exige, mais une série de nominations visant à placer, partout dans les institutions de l’État, des proches du pouvoir quand ce ne sont pas des proches des Jugnauth. Tous les gouvernements ont pratiqué, plus ou moins, cette forme de cannibalisation politique. Mais personne n’en avait fait à ce point, un principe de gouvernement. (…) C’est grave, c’est anti-démocratique. Ce népotisme est en totale contradiction avec les promesses de méritocratie et de transparence.»

Diffcile de ne pas être d’accord avec cette analyse, même s’il faut reconnaître que le MSM ne fait que ce qu’il a pratiqué lors de son dernier mandat, avec des ils et elles de, des proches de ceux au pouvoir casés ici et là. Il serait injuste aussi de ne pas reconnaître que chaque alternance politique débouche sur une série de nominations et d’autres gouvernements, toutes couleurs confondues, n’en ont pas fait l’économie dans le passé.

Oui, mais voilà, a-t-on déjà vu une aussi large pratique insouciante du copinage, qui ressemble plus à une distribution de récompenses, parfois à des lots de consolation, pour ces portesdrapeaux orange, dont les compétences à des postes clés ne reposent que sur leur proximité avec le clan du Premier ministre  ? Si cette situation mérite d’être soulignée, c’est parce qu’elle entraîne des questions sur le respect dû à certaines institutions dont la gestion supposément indépendante suscite de sérieux doutes. C’est de l’Estrac toujours qui nous dit que «cette pratique (suite à une question sur l’ingérence dans les institutions) nuit à la bonne gouvernance. C’est toujours la population qui fait les frais de cette médiocratisation. Certaines nominations sont scandaleuses et traduisent un profond mépris de la population. Elles sont d’autant plus intolérables qu’elles émanent d’un pouvoir électoralement fragile du fait qu’une majorité de la population se trouve dans l’opposition». Et de continuer  : «Dans les démocraties plus abouties, un pouvoir aussi contestable aurait adopté une stratégie d’ouverture plutôt que celle du repli sur son pré carré.»

Sauf que nous sommes à Maurice et Jugnauth donne l’impression de placer ses pions, avec l’objectif d’avoir une mainmise totale sur l’ensemble de nos institutions, l’exemple le plus flagrant étant la nomination de Roopun à la présidence de la République, dont la démarche tranche avec celle ayant conduit à faire d’Ameenah Gurib Fakim, la première locataire du Réduit ne venant pas du sérail politique. Avec les conséquences que l’on sait.

Du coup, encore une fois, nous reste un arrière-goût d’un favoritisme l’emportant sur la compétence, donnant au chef du gouvernement un air de super-héros aux yeux des nouveaux nommés, faisant désormais partie d’une troupe au garde-à-vous, toujours présent pour l’applaudir. Un peu comme ces nouveaux élus de la majorité qui, dès leur prise de parole, ne pouvaient manquer de remercier le Premier ministre et qui, pour plaire davantage au leader du MSM, n’ont pas hésité, dans leur discours, à s’illustrer en critiquant les partis de l’opposition. Une attitude très locale, nourrissant un culte de la personnalité faisant croire à tous les Premiers ministres du jour qu’ils sont, comme dirait l’autre, «enn tigit pli tipti ki Bondie».

Mais que ce soit nos élus, qu’il s’agisse des ministres, voire des nouvelles nominations, nous avons le droit, sinon le devoir, de réclamer des comptes à ceux-là qui sont rémunérés de l’argent des contribuables. S’il est trop tôt pour exiger un bilan après la formation de ce gouvernement, restons vigilants afin de pouvoir mesurer les (inac)actions concrètes de l’équipe au pouvoir !