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Le droit de savoir la date des législatives..

21 avril 2019, 11:00

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Le droit de savoir la date des législatives..

Le Premier ministre a-t-il l'intention d'aller au-delà de son mandat, comme le dénonce Paul Bérenger ? Si le leader mauve semblait convaincu, il n'y a pas longtemps, que les législatives auront lieu entre septembre et décembre (combien de fois ne l'a-t-il pas répété lui-même !), c'est une autre lecture qu'il fait aujourd'hui, accusant ainsi Pravind Jugnauth d'envisager «allègrement d'aller au-delà de ses cinq ans».

Bérenger détient-il des informations que nous n'avons pas ? Ainsi, il aura beau s'en prendre à des journalistes qui, selon lui, ont perdu leur capacité d'indignation face à un gouvernement qui ne respectera pas le jeu démocratique et repousserait la date du scrutin national de quatre à cinq mois, les faits sont têtus ! Valeur du jour, il est difficile de prédire quand les élections générales auront lieu. Et si nous pouvons être d'accord avec le leader du MMM sur un point, c'est qu'il a raison de condamner ce «kitsoz complètement archaïque» qui permet au Premier ministre de détenir seul la date d'un rendez-vous aussi important que des élections générales.

Jusqu'ici, rares sont les politiciens qui ont fait entendre leur voix sur la question. Parce qu'ils profitent tous de ce système qui donne le pouvoir absolu à un chef de gouvernement qui décide, seul, de la date (qui sert ses intérêts) de la dissolution du Parlement. Parce qu'en amont, les leviers du pouvoir sont alors utilisés à fond, permettant de favoriser le gouvernement du jour. Et Bérenger a aussi raison sur ce point : Pravind Jugnauth veut «récolter le maximum de ses projets». Et cela n'a échappé à personne. Dès le verdict positif des Law Lords dans l'affaire Medpoint, la campagne du Premier ministre a pris résolument une autre tournure, le rendant visible chaque jour, dans les manifestations culturelles et religieuses, à la moindre petite inauguration, voire la pose d'une première pierre, comme à Rivière-du-Rempart où la coïncidence de l'asphaltage d'une route, cinq jours avant sa venue donne à réfléchir.

Car toute la campagne, pour l'heure, se résume à sa personne, tant son équipe de bras cassés, spécialistes des scandales, ne projette qu'une image médiocre, sinon ridicule, le dernier exemple en date étant l'affidavit de Raj Dayal dont on a toujours du mal à saisir la pertinence. Mais outre l'utilisation de son image personnelle, les contours en pointillé du calendrier politique du Premier ministre n'ont rien de mystérieux : profiter des supposés dividendes du Metro Express, optimiser un climat rassembleur en créant un feel-good factor lors des Jeux des îles, proposer un dernier Budget qu'on devine plutôt électoraliste. Même la visite du pape en septembre pourrait faire croire à une bénédiction pour son gouvernement qui ne pouvait rêver à meilleur timing de cette visite historique.

Autant de retombées politiques attendues avant qu'on daigne nous indiquer la date des prochaines législatives. Car pour l'heure, seul Pravind Jugnauth détient cette date secrète. Ce n'est pas normal. Un Premier ministre n'est pas propriétaire du calendrier des rendez-vous démocratiques de notre pays. C'est injuste envers les autres mouvements politiques, principalement tous ces nouveaux regroupements qui, déjà, doivent se battre contre la machinerie des partis traditionnels et qui, dès le départ, sont inégalement défavorisés. Mais c'est surtout une grande injustice envers les électeurs qui méritent de connaître le prochain appel aux urnes.

L'exercice démocratique qu'est une élection – et c'est aussi valable pour l'éventuelle partielle au n°7 – n'est pas un instrument politique mais un droit du citoyen. Et il est temps de sortir d'un système donnant le pouvoir absolu aux politiciens de fixer à leur guise des dates qui doivent être connues, transparentes, démocratiques. Ce n'est pas parce que Pravind Jugnauth ne fait qu'utiliser un pouvoir qu'il détient, comme d'autres l'ont fait avant lui, que cela doit perdurer. Réclamons le droit de savoir la tenue des scrutins nationaux. Et commençons par exiger la date des prochaines législatives...