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Appétits gargantuesques

17 décembre 2018, 08:02

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Appétits gargantuesques

Le jeu « Monopoly », a été une manière pour Lizzie Magie, la conceptrice, de témoigner en 1904 de la façon dont les propriétaires cupides de l’époque exploitaient leurs locataires. C’était un moyen aussi de mettre en exergue les spéculations de toutes sortes qui contenaient déjà les germes destructeurs du marasme économique à venir. C’est plus tard que le jeu a été peaufiné pour inclure le concept du monopole – le jeu ne se termine que quand tous les joueurs ont été acculés à la faillite, le grand gagnant étant en situation de total monopole. Les richesses se créent   en percevant des rentes de plus en plus mirobolantes à mesure que les richesses foncières s’accumulent. Cependant, de manière très cynique, les règles du jeu ont changé en 2018 pour se conformer à l’économie réelle. La nouvelle édition permet aux joueurs, prêts à tout pour monopoliser toutes les richesses, d’enfreindre les règles ! Le nom de cette nouvelle version -Monopoly : Cheaters Edition !

Cependant s’il a fallu attendre aussi longtemps pour que la triche fasse partie des règles officielles du jeu, dans le monde réel, nous pouvons constater que certains individus avaient déjà une longueur d’avance. La voracité avec laquelle certains individus se sont emparés de lotissements à Ebène uniquement à des fins spéculatives démontre parfaitement cela. Ainsi, connaissant dès le départ cette prédisposition innée pour la transgression des règles du jeu, nous avons voulu placer le projet de la nouvelle ville à Côte d’or sous le signe de la transparence. Rappelons qu’en avril 2017, Landscope a eu plusieurs séances de consultation avec les professionnels et les membres de la société civile en vue de permettre à tout un chacun de faire entendre sa voix. Cette communication est donc la continuation logique du travail effectué auparavant : nous vous informons ici des orientations que prend le projet dans sa phase active.

Mettre en avant la diversité

Nous avons beaucoup parlé de la philosophie de l’urbaniste Jane Jacobs qui était convaincue que les personnes les plus aptes à appréhender la complexité urbaine sont les citoyens « ordinaires et intéressés ». Elle était ainsi convaincue qu’aucune ville ne pouvait se construire sans l’apport des citoyens dans ce qu’ils ont de diversités. Au niveau de Landscope, nous avons passé de la rhétorique à la pratique en permettant à cette diversité de devenir des acteurs de développements aussi longtemps qu’ils en ont les moyens matériels et professionnels. Nous pensons ici au pouvoir attractif de Port-Louis où le souk côtoie le luxe occidental, où la nourriture de rue concurrence la cuisine plus gastronomique, où les échoppes rudimentaires avoisinent sans complexe les bâtiments à plusieurs étages. Ce n’est que la diversité sous tous ces aspects qui peut restituer cette ambiance particulière et conviviale dans la capitale. Jane Jacobs dit d’ailleurs à ce sujet : « La diversité d’un bon quartier ne peut être atteinte que lorsque nous permettons à beaucoup de personnes différentes de poursuivre leurs propres petits plans, individuellement et collectivement ». Rappelons que selon l’appel à projets, la superficie des lots alloués au cœur de ville ne devrait pas dépasser 12.3 arpents afin d’empêcher un développeur d’avoir des ambitions de créer une « ville dans une ville » Landscope tient donc à être un intermédiaire direct de ces nombreux entrepreneurs, qui de par une individualité qui leur est propre pourront apporter une certaine vitalité à cette nouvelle ville afin qu’elle soit économiquement viable.

Viabilité économique

L’appel à projets de Landscope faisait aussi référence au fait que l’Etat tenait à ce que la nouvelle ville représente une rupture avec ce qui avait été fait dans le passé. Une prédominance d’enseignes et de franchises internationales par exemple ne serait nullement souhaitable car cela ne serait qu’une reproduction de ce qu’il y a ailleurs et n’aiderait pas les éventuels visiteurs à mieux s’approprier la ville. L’ère bien sûr est à la multifonctionnalité avec le concept de travailler/loisir/dormir, mais l’idée de cette nouvelle ville est de fidéliser le client en lui permettant de vivre une nouvelle expérience. Ainsi, alors que l’avènement des hypermarchés laissait présager la mort lente des entreprises familiales, nous avons pu constater leur résilience et le fait que ce type de commerce répondait aux attentes d’un type de clientèle (lassé du gigantisme mercantile) désireux d’une vie communautaire plus conviviale. De plus, ce type de commerce génère des emplois pérennes car pour ces entrepreneurs qui n’ont que cela comme gagne-pain, il s’agit de s’accrocher contre vents et marées. Contrairement à cela, quand la crise est durable, les gros entrepreneurs sont les premiers à fermer car ils veulent un retour rapide sur l’investissement et ont la possibilité d’écouler leurs stocks ailleurs. A une époque où l’uniformité tue le commerce, on peut s’imaginer le drame humain qui serait occasionné par les fermetures de commerces qui appartiendraient majoritairement à un seul promoteur dans une situation de monopole ! Ce n’est malheureusement pas le seul inconvénient associé à une situation de monopole.

Il faudrait ainsi souligner que l’appel à projets met dès le départ l’accent sur le fait que   la vente des terres n’est pas qu’une opération financière, mais il incombe à l’état de s’assure que chaque promoteur privé ne soit pas privilégié au détriment de la collectivité. Landscope a toujours aussi laissé comprendre clairement d’ailleurs qu’il privilégie davantage le fait d’avoir affaire à plusieurs promoteurs qu’un seul ou deux gros promoteurs, sachant qu’un promoteur dans une situation de monopole ne serait intéressé que par un retour rapide sur son investissement. Animés par un souci de bonne gouvernance, un des critères de l’appel à projets stipule clairement que nous ne pouvons être partie prenante et donc actionnaire avec le privé dans les projets se situant au cœur de ville de Côte D’or. De plus, il n’y a rien de pire qu’une situation de monopole couplé au conflit d’intérêts pour étouffer la créativité et l’innovation.

Monopole et Métro express

Cela coûterait approximativement six (6) milliards pour permettre au Metro Express de transiter par Côte D’Or. Nous pouvons nous imaginer quelle aberration cela serait si cette facilité serait mise à la disposition d’un promoteur en situation de monopole aux frais des contribuables ! C’est pourquoi, il semble logique de favoriser une multiplicité de promoteurs. Ce sera bien sûr la tache de Landscope, le promoteur en chef, de créer une synergie à partir des diversités et d’œuvrer afin de donner une vision cohérente de l’ensemble des projets immobiliers. Nous avons jusqu’ici fait référence aux conséquences perverses des commerces évoluant en situation de monopole. Cependant, soulignons que les pseudos investisseurs véreux exposent notre économie à un danger encore plus grand : celui de la spéculation foncière.

Dangers de la spéculation foncière

Il ne faudrait pas oublier que lors de la réunion de consultations, il a beaucoup été question de la bonne gouvernance. Le lobbying est tellement ancré dans le paysage politique ici et ailleurs qu’il serait irresponsable d’en faire abstraction. Quel que soit le parti politique au pouvoir certains affairistes jettent de la poudre aux yeux en faisant miroiter (grâce à une technologie avant-gardiste) une perspective économique quasi miraculeuse dans le but d’influer sur les décisions d’ordre politico financier. Cependant comme nous avons pu le noter lors de la consultation, les citoyens ont un certain niveau de défiance à l’égard des autorités publiques qui se voient ainsi acculer à règlementer les règles du jeu en toute transparence. Ainsi soulignons que dans le but de freiner la spéculation, un des critères de l’appel à projets est d’allouer des terrains uniquement pour mettre en œuvre un  projet tangible qui devrait commencer et finir à des dates décidées d’avance. Aussi, soulignons que nous avons su tirer des leçons de l’affairisme des spéculateurs à Ebène qui ont accaparé des terrains sans les développer pendant 15 ans dans le but d’acquérir une plus-value sur la vente du bail. Il est évident que c’est le devoir de l’état de veiller à ce que ce patrimoine national qu’est Côte D’Or soit mise à contribution pour le bien de la collectivité. De la même manière, l’appel à projets a bien stipulé que le loyer ou le prix de vente des lots de terrain seraient établis en fonction du critère du marché, et ce afin d’éviter une flambée spéculative.

Partout dans le monde certains individus tentent en se servant de pressions de toutes sortes de manipuler les politiques. L’environnement institutionnel doit tuer dans l’œuf ce genre de dérives. Notre intérêt collectif est de voir émerger une ville vibrante de vie, une ville avec une âme, dans laquelle tout un chacun pourra retrouver un peu de lui-même, un peu de sa diversité. Ces 2000 arpents à Côte D’Or représentent tout ce qui nous reste des terres exploitables. Cote D’Or n’est pas reproductible ! C’est notre patrimoine commun à tous. Ne le sacrifions pas au Dieu de l’argent. Il est déjà bien malheureux que toute une armée de pauvres gens (incapables de résister à leurs démons), se voit forcés deux fois par semaine de se délester de quelques sous si durement gagnés, bercés dans l’espoir hypothétique de toucher enfin le gros lot. Cependant, il est bien connu que le malheur des uns fait le bonheur des autres !

Gérard Sanspeur
Chairman Landscope Mauritius Ltd