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Politique monétaire: la source du mal

7 mars 2018, 08:31

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Le rendement sur les bons du Trésor à maturité de trois mois est en hausse tandis que le taux interbancaire est passé au-dessus du plancher bas de son couloir depuis décembre 2017. Yandraduth Googoolye, qui a pris officiellement les rênes de la Banque de Maurice, le 15 janvier dernier, s’en félicite.

Selon le gouverneur, cette trajectoire ascendante est attribuable aux actions du régulateur pour éponger l’excédent de liquidités dans le circuit. Les statistiques indiquent qu’au 23 février, la Banque centrale avait émis des instruments à hauteur de Rs 78,4 milliards dans le cadre de son programme de gestion de liquidités. En 2015, le montant était de l’ordre de Rs 36,7 milliards.

Cette tendance est certes réconfortante, mais Yandraduth Googoolye devrait se garder de crier victoire. Car nous avons été confrontés à des situations similaires dans le passé, où les taux commencent à grimper avant de vite replonger. La source du mal: l’excès de liquidités. Le phénomène n’est pas nouveau.

En remontant le temps, l’on découvre qu’en novembre 2013, l’excédent de cash disponible s’élevait à Rs 3,2 milliards. Depuis, ce chiffre n’a cessé de grimper pour atteindre un pic de Rs 16 milliards en avril 2015. Alors qu’historiquement le niveau de l’excès de liquidités a évolué autour de Rs 1,5 milliard. C’est ce que révèlent les données pour la période janvier 2006 à janvier 2010.

Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce mal, dont le ralentissement économique depuis 2010 et sa conséquence : le repli de l’investissement. Au fil des années, tellement il a été difficile de l’extirper du système, la bête a muté. D’un simple problème conjoncturel au départ, il s’est transformé en un véritable casse-tête structurel, rendant inefficace la politique monétaire.

C’est ce que les analystes qualifient de rupture du mécanisme de transmission monétaire. Sa réparation passe invariablement par le retrait de l’excédent de liquidités. Les indicateurs montrent que la Banque de Maurice est sur la bonne voie s’agissant de la stérilisation, mais elle n’est pas au bout du chemin.

Pas plus tard que décembre dernier, le Fonds monétaire international l’a rappelé à l’émetteur de billets. «Un resserrement de la politique monétaire est nécessaire pour ramener les taux interbancaires au même niveau que le taux directeur et ainsi reprendre le contrôle des conditions du marché monétaire».

Facile à dire pour le FMI, mais plus compliqué à mettre en oeuvre pour la Banque de Maurice. Surtout que celle-ci a pris fait et cause pour la croissance. Coincé par sa posture, le régulateur n’a que très peu de choix. Du moins pour le moment, car une nouvelle poussée inflationniste forcera la Banque centrale à rebattre ses cartes.

Même le gouvernement, principal partisan et bénéficiaire d’une politique monétaire accommodante, sera contraint de réfléchir à deux fois dans l’éventualité d’une remontée de l’inflation.

Quoi qu’il en soit, la Banque de Maurice et le Trésor public ne sont pas en mesure de laisser l’excès de liquidités dans le système. Car en l’absence d’intervention, les risques de voir basculer la rémunération de l’épargne en territoire négatif augmentent. Si cela devait arriver, le prix social à payer sera très élevé.

Afin d’empêcher cela, la Banque centrale gagnerait à rechercher l’appui du ministère des Finances dans sa lutte contre la source du mal.