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Le silence et l’obscurité

22 octobre 2016, 07:30

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«Petredec : y a-t-il anguille sous roche ?», s’interrogeait l’express, il y a cinq semaines, par rapport à l’attribution d’un contrat d’approvisionnement du gaz de pétrole liquéfié. Depuis, c’est le silence radio.

Toute cette affaire, qui nous rappelle étrangement, et à bien des égards, les conditions dans lesquelles un contrat avait été alloué, sous l’ancien régime, à la firme Betamax, mérite un éclaircissement de la part de nos autorités – au nom de la transparence et de la bonne gouvernance – termes maintes fois brandis dans le manifeste de triste mémoire de l’alliance Lepep.

À nos yeux de profane, il semblerait que les procédures ont été taillées sur mesure. Un premier appel d’offres limité, un Restricted Bid, a été annulé par la STC. Pourtant, pas moins de huit entreprises avaient été présélectionnées au cours de cet exercice. Ce qui intrigue, c’est l’entrée en scène de Petredec à travers un Unsolicited Bid, alors même que cette compagnie avait été écartée lors du premier exercice en raison de «pratiques malhonnêtes» !

Le revirement de situation est intervenu le 25 août 2016. Le conseil d’administration de la STC avait été convié à une réunion spéciale afin d’annuler l’appel d’offres. L’express a publié des extraits de documents officiels qui indiquent que l’autorisation du board avait été sollicitée «to annul this tender exercise and to award the contract to Petredec». Et, effectivement, le 31 août, le premier appel d’offres est annulé.

Que s’est-il passé au juste ? Comment se fait-il que Petredec aura fait un retour gagnant ? Pourquoi le Conseil des ministres s’y est mêlé alors que le board de la STC avait dénoncé les «deceitful practices» de cette entreprise ? Le silence et l’obscurité étant toujours l’arme ultime des filous, pourquoi la STC n’explique-t-elle pas la situation pour rassurer le public ?

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C’est dans le dernier Budget de Pravind Jugnauth (29 juillet 2016) que nous avons pour la première fois entendu parler du projet Near Shore Refinery. Par la suite, on devait apprendre que la compagnie qui va monter ce projet de Rs 574 millions avait été enregistrée une semaine seulement avant la présentation du Budget et avait parmi ses actionnaires Roland Maurel. So far so good.

Il y a quelques jours, le ministère des Terres a octroyé 54 arpents à Near Shore Resources Ltd à Albion, soit le même terrain identifié pour CT Power sous le régime de Ramgoolam.

Si le projet de transformer la côte Ouest en Petroleum Hub n’est pas une mauvaise idée en soi, c’est l’opacité du GM autour de ce projet qui nous gêne.

Sur son site web, Near Shore Resources se targue de pouvoir «develop the first of many mobile modular refinery vessels located near-shore, mitigating much of the risk associated with an on-shore facility». Le consortium, basé à Dubayy, explique aussi que «there is an initial target country and there is a total of 19 countries that are prime candidates for the first vessel». En d’autres mots, notre pays devient un peu comme un cobaye de cette expérience «near shore».

Ce que nous ne savions pas non plus, c’est que le projet aurait été présenté au PM et au «Deputy Prime Minister» – et qu’il y aurait eu au moins sept rencontres à ce jour (selon Near Shore Resources toujours) : «The Deputy PM was appointed as project champion and leader. The incorporation into Port Master Plan has been agreed and ongoing.»

Pourquoi, comme dans le cas de Petredec, y a-til comme des écrans de fumée autour de ces projets importants ? A-t-on vraiment besoin d’une raffinerie de cette nature ? Ce projet est-il viable économiquement ? Ce projet prendra-t-il en compte notre consommation (600 000 tonnes de «black oil» et 700 000 tonnes de «white oil») ou devra-t-on importer par ailleurs d’autres produits pétroliers ? Quelles sont les précautions prises contre les risques pour l’environnement ? On n’en sait pas grand-chose, pour dire le moins.

Dans une tribune publiée dans l’express et intitulée «Oil Refinery at Albion : Another CT Power Saga in the Making !», le professeur Swalay Kasenally faisait ressortir : «Government policy to widen our economic activities in novel areas of potential growth deserves support but a project with underlying environmental hazards needs the collaboration of all sections of our society, otherwise we may end up with another CT Power saga»...

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D’où notre propos : pourquoi répétons-nous les mêmes erreurs que dans les affaires Betamax et CT Power ? Sommes-nous à ce point condamnés à vivre dans l’obscurité alors qu’on nous avait promis la transparence… Deux ans après, on s’interroge toujours sur cette promesse électorale (page 44 du manifeste de Lepep) : «L’ensemble du processus d’appels d’offres publics sera revu et une nouvelle législation sera promulguée pour garantir une transparence totale…»

Et puis il y a aussi MauBank – à la suite de nos révélations relatives aux emprunts de Rakesh Gooljaury, trois cadres de la banque ont été suspendus ! Quant à Omega Ark, on a sonné l’alarme plus d’une fois et aujourd’hui on réalise qu’on s’est bien moqué de nous – et que ceux qui sont censés nous diriger ont été menés en bateau. Le bateau Lepep sombre... Le silence et l’obscurité…bla-bla-bla, etc…