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Tout a changé, rien n'a changé...

20 mars 2016, 21:21

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Tout a changé, rien n'a changé...

Que reste-t-il de ce vent de changement survenu un matin de décembre 2014 ? Que reste-t-il de ces jours d’après, porteurs d’espoir de lendemains meilleurs post-dix ans de «Ramgoolamisme» ? Aujourd’hui, la désillusion à tous les niveaux a cédé aux miracles et promesses, les grandes manœuvres politiques pour des intérêts autres que ceux du peuple ont repris et le spectacle auquel se livrent les acteurs du gouvernement Lepep obéit uniquement à des tactiques de realpolitik. Exemple : ce mini-remaniement par un Premier ministre dépassé par la guerre des clans de son camp, et l’accalmie de façade,  dont le but  d’éviter des secousses irréversibles, n’ont échappé à personne. Un calme en trompe-l’œil à voir le dernier coup de sang de Lutchmeenaraidoo – lui-même dans l’œil du cyclone – qui délaisse cette fois les sages paroles de Kipling pour, dit-il, «passer à l’action» après une campagne qu’il qualifie de «calomnies et de mensonges». 

En attendant la prochaine manche du jeu de rapport de force entre les acteurs du gouvernement, la population reste choquée par toute l’affaire du prêt de son ancien ministre des Finances, son investissement et ses supputations dans l’or ainsi que ses centaines de milliers d’Euros empruntés. Tout ça sonne de manière abstraite aux oreilles du citoyen lambda qui mesure, du coup, concrètement l’écart qui existe entre son monde et celui des politiciens. Mais la fracture n’est pas qu’à ce niveau. Car s’il y a eu un changement de gouvernement en décembre 2014, l’homme de la rue qui regarde, effaré, l’image que lui renvoie son pays ces jours-ci, a de plus en plus de mal à voir la différence entre l’ancien gouvernement et celui-là. L’arrogance des uns en témoignent. Ceux qui ont écouté le ton employé par Collendavelloo sur les ondes de Radio One jeudi dernier pour parler des chauves-souris, responsables, semble-t-il, des coupures d’électricité, se disent que le leader du ML n’a rien à envier aux anciens ministres travaillistes.

Que dire de la politique des petits copains/petites copines/nou bann fami, avec ici le recrutement d’un père, là d’une fille, là encore d’une épouse, et là-bas d’une maîtresse, quand ce n’est pas – c’est la dernière révélation en date – un fils qui obtient des contrats d’institutions appartenant à l’État pour sa société privée ? De la part d’un gouvernement qui nous promettait transparence et bonne gouvernance, ça fait plus que sourciller. Si on ajoute les arrestations arbitraires des citoyens à chaque toussotement de quelques ministres qui se croient princes, le grand désordre du projet des smart cities qui se fait dans le dos de la population, l’absence des résultats réels dans des secteurs-clés, la déprime pourrait réellement nous guetter. D’autant que, et c’est notre drame, face au gouvernement, il y a une opposition qui est décrédibilisée.

Entendre Ramgoolam dire que la corruption s’installe dans le pays agresse non seulement nos oreilles mais retentit aussi comme une insulte à notre intelligence. Faut-il rappeler qu’à part des partisans rouges et une poignée d’électeurs qui commencent à devenir amnésiques, nous avons toujours en mémoire les passe-droits du temps où il était Premier ministre ? Sans compter les images indélébiles de ses coffres-forts. Quelle alternative alors ? Le leader de l’opposition, qui nous a sorti son disque usé en réclamant la démission du gouvernement du jour ? Son flirt public avec le leader des Rouges à travers les opérations on/off de 2014, sa contribution au prolongement injustifié de la fermeture du parlement pendant les épisodes de koz koze, son alliance avec l’ancien gouvernement gangrené de tous les maux lors des dernières législatives, le privent également de toute crédibilité.

À bien y voir, sans une recomposition totale de la classe politique à travers du sang nouveau, sans un engagement accompagnée d’une rupture avec la manière dont fonctionnent tous les partis de l’échiquier, nous, citoyens seront toujours les dindons impuissants de la farce politique. Car il ne reste rien du vent de changement rempli d’espoir survenu un matin de 2014 !