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Téléphonie : la Réunion à la traîne

16 janvier 2012, 00:00

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Un coup de vieux. Comparés à l’offre de l’opérateur Free, fraîchement dévoilée en métropole (France, Ndlr), les forfaits des opérateurs locaux paraissent désormais anachroniques, écrit le Journal de la Réunion ce liundi matin.

Vingt euros par mois et des communications illimitées en France méropolitaine. En dévoilant son offre de téléphonie mobile la semaine dernière, après des mois d’intenses rumeurs, le nouvel opérateur Free a jeté un pavé dans la marre dont les conséquences se font déjà sentir : désengagement de clients, baisse des tarifs chez la concurrence...

A la Réunion, en revanche, c’est calme plat. Dans l’immédiat, aucun des opérateurs n’envisage de modifier ses offres et encore moins de s’aligner. "Son modèle économique ( celui de Free) est très différent du nôtre. Il est basé sur un prix très bas, mais pas sur le service", affirme Caroline Gaudel, responsable de la communication chez SFR Réunion. "L’offre est vraiment particulière, enchaîne Pierre-Etienne Cizeron, directeur général adjoint d’Orange-Réunion. Tout se fait par Internet et le mobile n’est pas subventionné". SFR, Orange et Only sont d’accord sur une chose : pour le moment, le consommateur réunionnais ne serait pas prêt à souscrire à une offre par Internet à l’instar de Free. "Il a besoin d’une vraie relation client, de venir en magasin, voir les téléphones...", assure Caroline Gaudel.

De lourds investissements

Only voit même une raison objective à l’impossibilité de faire baisser les tarifs. Le prix des terminaisons d’appel, c’est-à-dire la somme que reverse chaque opérateur à un autre pour acheminer l’appel d’un client de la concurrence, est plus élevé qu’en métropole. "Il y a 65% d’écart sur les appels vocaux et 25 % sur les SMS," constate Claire Richet, directrice de la communication d’Outre-Mer télécom.

Autre argument : les lourds investissements consentis et le poids des boutiques et du personnel. "Nous investissons 20 % de notre chiffre d’affaires dans les infrastructures, ajoute Pierre-Etienne Cizeron. Nous menons un plan d’investissement de 50 millions d’euros sur trois ans. Le tout sur un marché de 800 000 personnes qui n’est pas extensible. Nous avons besoin de marge pour mener à bien ces projets". "Les services ont un coût, confirme Caroline Gaudel. Nous avons 30 boutiques réparties sur l’île, 150 conseillers commerciaux et 150 pour la gestion de la clientèle ainsi que 40 personnes en service après-vente. Chez Free, il n’y a pas de SAV !".

Toutes ces raisons ne résistent pourtant pas à l’analyse des connaisseurs du marché. "Les offres type "Free" sont complètement envisageables, estime un spécialiste de la téléphonie. Le prix des terminaisons d’appel fixé par l’autorité de régulation des télécommunications (Arcep) va continuer à baisser et se rapprocher de la métropole. Il va de toute façon y avoir une pression populaire genre "nou lé pas plus, nou lé pas moins" pour faire baisser les tarifs. Et si ça ne marche pas, l’Etat obligera les opérateurs".

Les opérateurs préparent leurs armes

Autre argument en faveur d’une baisse rapide des tarifs : le cash généré par les opérateurs. "Leurs taux de rentabilité sont équivalent à ceux de la métropole, confie un cadre dirigeant d’un opérateur réunionnais. Ils sont compris entre 30 et 40 % sachant que le leader du marché réalise un chiffre d’affaires d’environ 250 millions d’euros. Même s’il faut en donner 5% à l’Etat et en réinvestir entre 10 et 15%, il en reste encore beaucoup dans les caisses".

Un homme, enfin, observe la révolution Free avec envie. Le patron du fournisseur d’accès à Internet, Yann de Prince, prévoit d’investir le marché de la téléphonie mobile d’ici la fin de l’année. "Je ne vois aucune raison pour que le prix des forfaits actuels ne baisse pas, assure-t-il. Les investissements consentis par les opérateurs ont été défiscalisés. Il est possible de faire des choses comparables à ce qui se produit en métropole."

S’ils affirment ne rien vouloir changer, les opérateurs, en coulisse, préparent leurs armes. "Ils y pensent, promet un proche des opérateurs. La guerre est ouverte". Orange est en tout cas le premier à se dévoiler. "Nous aurons rapidement une évolution sur le net avec des offres épurées", assure Pierre-Etienne Cizeron. Only promet également du nouveau dans les prochaines semaines sans aller jusqu’au modèle de Free. Et si en 2012, la Réunion faisait sa révolution tarifaire des mobiles ?

Jean-Philippe Lutton, Le Journal de l’île de la Réunion.