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Serge Ng Tat Chung et Alain Romaine analysent les origines des préjugés envers les créoles

28 janvier 2010, 00:00

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Dans un ouvrage qu’ils viennent de publier, Serge Ng Tat Chung et Alain Romaine démontent le mécanisme des préjugés envers les descendants d’esclaves.

Les préjugés envers les créoles viennent d’une pensée systémique et structurée. C’est ce que révèle le livre «Les créoles des idées reçues – Origines du racisme antiafricain à l’Ile Maurice» de Serge Ng Tat Chung et le père Alain Romaine, lancé mercredi 27 janvier, à l’Université de Maurice à Réduit.

Cet ouvrage qui s’inscrit dans le cadre de la commémoration de la 175ème année de l’abolition de l’esclavage à Maurice se veut un hommage au docteur Gérard Fanchin, Professeur associé en littérature à l’Université de Maurice et décédé en 2006. L’objectif c’est de mettre en lumière les racines du racisme antiafricain qui hante la population mauricienne depuis le 19ème siècle.

Tous les intervenants, dont le doyen de la faculté des sciences humaines, Sanjeev Sobee, Jimmy Harmon, directeur de l’Institut Cardinal Margéot, Serge Rivière, président de la même institution, Daniela Police, professeur de français à l’Université de Maurice, ont rendu hommage au professionnel, à l’homme et surtout à l’intellectuel engagé pour la cause créole qu’était Gérard Fanchin.

Dans son intervention, Serge Ng Tat Chung, recteur du collège Saint Joseph, lauréat du prix Pierre Renaud en 1989 et surtout ami intime de Gérard Fanchin, raconte comment ce dernier avait mis la main sur l’œuvre d’Eugène Bernard, écrit de 212 pages, sorti en 1834, intitulé «Essai sur les nouveaux affranchis à l’Ile Maurice». Cet ouvrage qui sert de point de départ à l’étude que voulait faire Gérard Fanchin, constitue une source primaire précieuse sur la réalité servile avant l’Abolition de l’esclavage. Cet essai, laisse, cependant, voire des traces éloquentes du racisme à l’égard de l’Africain. Celui-ci y est dépeint essentiellement « comme inférieur, arriéré et jouisseur ».

Les auteurs de «Les créoles des idées reçues – Origines du racisme antiafricain à l’Ile Maurice», font une lecture critique de l’œuvre d’Eugène Bernard pour faire ressortir « les préjugés stéréotypes et autres clichés qui existent encore à l’égard des créoles descendants d’esclaves.

Serge Ng Tat Chung fait l’analyse littéraire de l’œuvre d’Eugène Bernard tandis qu’Alain Romaine analyse le côté anthropologique et social de la pensée de cet auteur.

Serge Ng Tat Chung rappelle qu’Eugène Bernard était propriétaire d’esclaves et agriculteur. Il avait une puissante plume. «L’essai était comme un discours pour plaider ou défendre une cause à cette époque. Ces préjugés émis sur les noirs étaient issus d’une pensée systémique et structurée», dit-il.

Pour sa part Alain Romaine, explique comment l’esclave a intériorisé ce nœud de préjugés et l’a transmis à sa descendance, aujourd’hui les créoles. «Ces derniers les ont si bien intégrés qu’ils se sous-estiment ou se mésestiment. Ils acceptent facilement ce que le monde colporte facilement : Kréol paress, kréol voler, kréol mazanbik, » souligne Alain Romaine
L’ouvrage en trois chapitres tente de remonter à l’origine du racisme anti-africain ancrée dans l’imaginaire collectif national et démonte les mécanismes qui le fait perdurer.

Alain Romaine avance que l’esclavage perdure encore dans les esprits en 2010 à l’île Maurice. «Ce sentiment de rejet de honte à l’égard de la peau noire, des cheveux crépus et du phénotype africain, ces complexes d’infériorité difficiles à extirper dans la mentalité quand il s’agit d’ascendance ou d’origine africaine, vient de là», déclare-t-il.

Quelques pistes sont suggérées par les auteurs, à la fin de l’ouvrage, pour un regard neuf sur les créoles, descendants d’esclaves.

Le livre «Les créoles des idées reçues», tente de mettre en lumière les racines du racisme antiafricain qui hante la population mauricienne en générale.