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Patrimoine : Ce Port-Louis qui s’oublie

16 mars 2009, 01:00

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Patrimoine : Ce Port-Louis qui s’oublie

Il a suffi d’un regard pour que s’ouvre un boulevard. Menant à ces édifices qui vivotent en silence. Attendant la fin car fatigués de guetter de nouvelles façades. Port-Louis, chef-lieu. Port- Louis, port d’une colonie. Devenu district de République, la capitale reste la ville comptant le plus de symboles – que ce soit tombes, statues et édifices – classés comme patrimoine national. Un ensemble qui dépasse les 80 lieux de mémoire.

Sauf que l’ombrelle s’avère bien frêle face à l’usure du temps. Et le fait d’être en plein centre-ville et à des points névralgiques de la ville ne change pas grand-chose à l’état de décrépitude de ces édifices qui nous parlent de nous-mêmes.
En 2007, un collectif procédait à un état des lieux du patrimoine bâti, dans un ouvrage intitulé Les bâtisseurs de l’île Maurice. Philippe La Hausse de la Louvière, membre du collectif, ancien président du National Heritage Fund (NHF) et responsable, entre autres, des ONG à vocation patrimoniale, Friends of the Environment et Fondation Fort Blanc, explique que son analyse comparative de l’état des édifices appartenant à l’Etat et ceux du privé a montré que «tout ce que possédait l’Etat était 50 % moins bien entretenu que ceux du privé».

«Il y a deux solutions au problème : réparer un monument par-ci, retaper une statue par-là,ou alors on s’occupe de tout le patrimoine en consultant la liste du NHF.» Nous avons feuilleté la liste de plus de 80 lieux de mémoire. Sans aucune prétention à l’exhaustivité mais sans oublier les autres. C’est-à-dire tous ceux que Port-Louis oublie.


La Tour Koenig

A la périphérie de la ville, sur une butte, se tient la Tour Koenig ou alors ce qu’il en… reste. Cette ancienne fortification surplombant le donjon de St-Louis, à Grande-Rivière- Nord-Ouest, qui avait à un moment été transformé en hôtel, est aujourd’hui livré aux herbes folles.
 
 
 Le Grenier

A ras de chaussée, c’est un parking très fréquenté dans un Port-Louis congestionné. Mais il suffit de lever la tête vers les fenêtres sans vitres pour se rendre compte que la brique rouge du mur est un vestige d’un siècle passé. Et que le Grenier, classé patrimoine national en 2003 est fonctionnel en bas mais dépassé en... haut.
 

 

L’Hôpital militaire

Coincé entre le grenier et l’Aapravasi Ghat, l’hôpital de Mahé de Labourdonnais a «le toit qui s’effrite», s’indigne Philippe Lahausse de la Louvière.

«C’est là qu’on hébergeait les marins souffrant de scorbut. Ce bâtiment illustre le côté humanitaire de Labourdonnais qui s’occupait des artisans,des esclaves et des marins qui venaient y récupérer en 45 jours. Les Anglais n’ont jamais fait cela. D’ailleurs ils séparaient les officiers des marins et des esclaves. Même s’il y avait l’esclavage, ce bâtiment reste un témoignage  d’humanité.» Un vestige qui n’est pas sans intéresser l’Aapravasi Ghat Trust Fund qui a exprimé la nécessité de préserver cet édifice se trouvant dans le core zone du site classé patrimoine mondial.
 
 

 

La gare Victoria

 Ancienne station de trains, c’est aujourd’hui le rendezvous fixe des marchands ambulants qui ne... déambulent point. Ils ont envahi la varangue de ce qui reste de l’édifice pour allécher les voyageurs. La proie de plusieurs incendies, ce qui reste de l’édifice est aujourd’hui exposé au soleil de la négligence.
 
 «Le bureau de la CWA»

La mémoire collective se souvient qu’il y avait jadis une école primaire à la rue Decaen.
Aujourd’hui, le bâtiment, non classé, a été investi par le distributeur national d’eau. Les murs extérieurs, en pierres taillées, ont été badigeonnés de peinture. A l’intérieur des locaux, pas si éloignés des Casernes de Labourdonnais, la vie administrative a investi un quartier chargé d’histoire. 
 
L’école Beaugeard

Démolition suspendue en 2006 de l’Edith-Cavell Government School, plus connue comme l’école Onésipho-Beaugeard.
Cela à la suite d’une injonction en cour obtenue par un collectif de défenseurs du patrimoine. Depuis, les lieux sont restés tels quels.Stagnants. Sans rénovation.

Probablement construit à la fin 18e ou au début du 19e siècle, le bâtiment d’un étage de la rue Edith-Cavell est un exemple de l’architecture coloniale française. Il a été habité par des personnalités mauriciennes connues. Tels Adrien D’Epinay, Robert Edward Hart et le Dr Onésipho Beaugeard, médecin et politicien mauricien qualifié par les historiens de «père de la démocratie de l’île Maurice». Le bâtiment fut acheté par l’Etat pour être transformé en école primaire à qui le nom du politicien fut donné en guise d’hommage. Le bâtiment est classé comme monument historique.
 
 
L’ancienne prison

L’ancienne prison centrale, ayant servi de 1839 à 1953, n’est pas classée monument national. C’est un lieu désaffecté du Renganaden-Seeneevassen Building. En 2002, il a été question que le NHF en fasse un complexe multi-fonction.
Un projet qui n’a pas eu de suite. En 2007, à la faveur d’une exposition, on évoque la possibilité d’en faire une galerie d’art contemporain. En attendant, la cour sert de parking aux fonctionnaires alors que le bâtiment abrite une partie du ministère des Arts et de la Culture.
 
 Les projets en chantier

Une ville abritant le plus grand nombre de lieux de mémoire d’un pays est aussi une ville avec le plus grand nombre de chantiers à vocation patrimoniale. Le plus prestigieux est sans doute celui de l’Aapravasi Ghat, lieu de débarquement des travailleurs engagés, en travaux depuis 2001. Alors que convergent les efforts pour y aménager un Interpretation centre, le site devrait être ouvert au grand public d’ici décembre. Parmi les autres sites faisant l’objet de projets de rénovation, citons la Citadelle placée sous la tutelle de Discover Mauritius. Le théâtre de Port-Louis, fermé pour rénovation depuis juin 2008, a obtenu les fonds pour les travaux. Mais pour qu’ils commencent, il faut attendre le long déroulé des procédures administratives. Sont également en travaux : la Government House, en partie affectée par un incendie ou encore la partie historique du cimetière de l’Ouest.Sans oublier le Vagrant Depot à Grande-Rivière-Nord-Ouest, prison où étaient enfermés les vagabonds.