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La Chine durcit l''arsenal policier contre les opposants

8 mars 2012, 00:00

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La Chine durcit l''arsenal policier contre les opposants

Le Parlement chinois a commencé à étudier jeudi un projet de loi qui permet notamment à la police de détenir les dissidents au secret, mesure qui a provoqué l''''indignation des défenseurs des droits de l''homme.

Maigre consolation pour les opposants, le parti communiste au pouvoir a apparemment renoncé à une des dispositions les plus critiquées de cette réforme du code pénal, présentée pour la première fois en août dernier, la "résidence surveillée".

La nouvelle mouture du projet de loi renforçant les pouvoirs de la police contre les suspects de « subversion et d''atteinte à la sécurité de l''Etat » doit être soumis au vote du Parlement pendant sa session annuelle.

"Les familles des détenus doivent être informées de leur arrestation dans les 24 heures, sauf si c''est impossible ou s''ils sont soupçonnés de crimes en relation avec la sécurité de l''Etat ou le terrorisme", détaille le gouvernement dans un communiqué remis aux parlementaires et à la presse.

Le manque de confiance et la peur

Ce durcissement du code pénal est perçu par les opposants comme un signe de l''intention du parti communiste de réprimer plus fermement les dissidents après les soulèvements populaires dans le monde arabe. "Cela traduit la mentalité actuelle (du gouvernement), basée sur le manque de confiance et la peur", a commenté l''artiste contestataire Ai Weiwei, lui-même détenu au secret l''an dernier pendant 81 jours. "C''est une menace considérable pour le système judiciaire et pour la sécurité des citoyens", a-t-il estimé. Condamné après sa libération à une amende pour fraude fiscale, qu''il conteste, Ai Weiwei, 54 ans, était suspecté d''avoir joué un rôle dans les manifestations organisées en février 2011 dans l''élan du "printemps arabe".

En Chine, les "atteintes à la sécurité d''Etat" incluent la dissidence et de nombreux chefs d''accusations qui permettent dans les faits de punir quiconque s''oppose au parti communiste. Les accusations de terrorisme ont elles servi à réprimer par le passé les sécessionnistes tibétains ou ouïghours, des musulmans de l''ouest de la Chine.

"Notre pays traverse une période de transformation sociale et de conflits prononcés, les crimes se maintiennent à un niveau élevé et les crimes très violents augmentent", a fait valoir le parlementaire Wang Zhaoguo dans un discours.

Le risque d''arbitraire et d''abus

Police et procureurs disposent déjà de larges pouvoirs en matière d''arrestations, et les tribunaux contrôlés par le parti communiste leur demandent rarement de rendre des comptes sur l''usage qu''ils en font. Mais l''inscription de la détention au secret dans le code pénal renforce le risque d''arbitraire et d''abus, soulignent les opposants.

Le texte prévoit que les suspects de "crimes concernant la sécurité de l''Etat, le terrorisme et les cas de corruption les plus graves" pourront être détenus dans des lieux gardés secrets pour le bien de l''enquête. Leurs familles devront toutefois être prévenues de leur arrestation dans les 24 heures.

La première mouture du projet de loi allait encore plus loin en proposant que les familles ne soient pas informées, mais le tollé que ce texte avait provoqué a apparemment incité le gouvernement à faire une légère marche arrière.

"Il semble que la vision des juristes a finalement prévalu et que cette tentative de la police d''élargir considérablement ses pouvoirs a été rejetée", estime Nicholas Bequelin, de Human Rights Watch.

Les autorités chinoises ont arrêté l''an dernier des dizaines de dissidents par crainte d''une contagion des soulèvements dans le monde arabe. Plusieurs d''entre eux ont été, comme Ai Weiwei, détenus au secret pendant des semaines, voire des mois, et ont ensuite dit avoir été victimes de mauvais traitements physiques et psychologiques.

Ces abus montrent que "ce n''est pas tant ce que dit la loi qui compte que la façon dont elle est appliquée", souligne l''avocat Pu Zhiqiang, spécialisé dans les affaires de dissidence politique et de liberté de la presse.

Source : Reuters.