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Kelly Wayne, le corps et l?âme dévoilés

29 mars 2004, 00:00

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KELLY WAYNE nous revient pour son troisième solo. Le vernissage aura lieu demain à l?hôtel Labourdonnais, au Caudan, à partir de 18 h 30. L?exposition, d?une vingtaine de tableaux, huiles et aquarelles confondues, se verra, dès le lendemain, jusqu?au 5 avril, dans la cour du Caudan Waterfront, près du Craft Market. Elle rassemble des autoportraits, une scène-transcription d?un mythe littéraire, des marines, des couchers de soleil?

Aux premiers pas dans l?atelier qui abrite les peintures, le regardeur prend conscience qu?il est en présence de deux expositions : d?abord, celle des encadrements qui habillent les peintures, puis celle des oeuvres. Et, s?il désire faire une lecture objective de ces dernières, clinique, dira-t-on, selon les exigences du métier, il devra se livrer à une acrobatie mentale des plus périlleuses, pour tâcher de les libérer de leur enclave. Ce qu?il ne réussira pas toujours. Toutefois, nous parlerons des cadres dans un autre temps.

Cette exposition, de facture et de styles fort inégaux et disparates, et qui interpelle à plusieurs titres, comme le deuxième solo à La Maison du Poète, va, cependant, plus loin dans la révélation de l?artiste, corps et âme. Elle ose davantage, sinon totalement. Le cri poussé de l?abîme du désespoir, qu?était la dernière exposition, pourrait être interprété, ici, comme un acte de provocation, compte tenu du contexte local ? loin de nous tout jugement moral, cependant. Ce qui n?empêche pas d?admettre que l?artiste est libre par essence. De reconnaître que l?acte de peindre, qui est chez elle thérapeutique, atteste ici d?une libération et d?une liberté marquées de Kelly Wayne.

Ainsi, dans les différents tableaux, est-on, sans ambages, en présence d?une travestie. Là, d?une femme-vampire. Bien des phantasmes dévoilés appartiennent aussi à cette parenthèse, que l?on pourrait intituler Sexualité et peinture. En ce sens, il s?agit là d?une première. L?an dernier nous évoquions un parallèle possible entre Kelly Wayne et Frida Kahlo. C?était, entendons-nous, au sujet de l?expression, par le biais de l?autoportrait, de l?Etre. Ce qui était tout autant une première. Là s?arrête le parallèle, soulignons-le. Car, Kelly Wayne devra s?astreindre à une longue pratique de la peinture, pour, au niveau de la technique, rejoindre Frida Kahlo. Signalons cette autre différence entre les deux artistes. La Mexicaine illustre ses souffrances physiques, psychologiques et morales, sans jamais défigurer ses traits authentiques, d?une grande beauté.

Du côté des peintures, que l?on dirait symboliques, rappelons La Mort d?Abel 2003, d?inspiration biblique, Paul et Virginie 2004, mythe éminemment mauricien, et La Femme-vampire 2004, trois étapes qui parlent de Kelly Wayne elle-même. Avec La Mort d?Abel, elle tue le grand frère, l?homme en elle, pour se libérer d?un état qu?elle n?a pas choisi, et faire respirer son corps. Et, ainsi, mieux vivre. Paul et Virginie, archétype même de la féminité, lui consacre une nouvelle féminité. Alors que La Femme-Vampire s?associe au sang. Kelly Wayne exprime là son regret, qu?en tant qu?homme, bien qu?elle se donne des seins, elle ne peut avoir de règles, donc, elle ne peut, biologiquement, être mère.

Pour passer aux cadres, s?il n?est pas bien vu de se citer, rappelons, (voir l?express du 19 mai 2003) pour l?exception, l?intertitre ?Cadres exubérants?, de notre analyse 2003. Nous parlions de ?cadres anachroniques du XVIIIe siècle, ou encore baroques, rococo, de la rocaille? au volume écrasant, de forme décorative exubérante, privilégiant des sinuosités végétales, à annihiler les peintures elles-mêmes.? Le fait quelle persiste dans cette direction, nous fait comprendre que le cadre exubérant fait partie de Kelly Wayne. De ce schéma quelle n?a pas choisi. Cadre envahissant, allant jusqu?à tuer le tableau. Le cadre véhicule l?expression même de son art. Qu?on aime ou pas, il fait partie intégrante de son art. A prendre ou à laisser.