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Kamal Hawabhay : « Aucune renégociation du traité avec l’Inde n’est à l’agenda »

21 juin 2011, 00:00

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Une tempête dans un verre d’eau. Tel est le sentiment de Kamal Hawabhay, le représentant des professionnels de l’offshore à Maurice et officiellement président de l’Association of Trust and Management Companies (ATMC).

Tout en prenant la précaution de dire qu’il appartient au gouvernement de décider s’il veut renégocier le traité fiscal entre l’Inde et Maurice, Kamal Hawabhay déclare qu’une telle renégociation n’est pas à l’agenda.

A travers les contacts de l’ATMC avec les autorités « nous savons qu’il n’y a pas de proposition pour renégocier le traité », fait-il ressortir. « Même en Inde on n’est pas intéressé. C’est purement de la spéculation de la part des journaux indiens », affirme Kamal Hawabhay.

La renégociation d’un traité de non double imposition prend du temps, indique notre interlocuteur. Il faut ensuite que les deux parties soient d’accord pour renégocier, ce qui n’est clairement pas le cas dans le cas présent. « Il n’y a même pas de calendrier pour commencer une éventuelle discussion », ajoute Kamal Hawabhay.

Selon lui, la spéculation qui est née sur une soi-disant renégociation découle peut-être du fait que le Joint Working Committee qui a été créé il y a des années entre l’Inde et Maurice a accepté de se reparler après trois ans de silence. « Il n’y a rien de mal à se parler. C’est même une bonne chose. Mais cela ne veut pas dire qu’on renégocie quoi que ce soit. Il y a beaucoup de choses qu’on peut échanger, comme des informations », poursuit le président de l’ATMC.

Kamal Hawabhay n’est pas le seul à dire et à penser qu’il n’y a aucune renégociation à l’ordre du jour. En Inde également, Sunil Mitra, le secrétaire financier de ce pays, a remis les points sur les i dans la presse indienne ce matin du 21 juin. L’Inde ne peut pas imposer des taxes sur les plus-values (capital gains) de manière arbitraire car cela serait contraire au traité existant. Il faudrait d’abord renégocier le traité, et il n’y a actuellement aucune volonté de le faire, a dit Sunil Mitra.

Il y a deux jours, le patron du Central Board of Direct Taxes (CBDT) de l’Inde, Prakash Chandra, avait déclaré que l’Inde souhaitait que les capital gains soient imposables en Inde puisque c’est la Grande Péninsule qui abrite les compagnies qui créent de la richesse pour les investisseurs étrangers.

Selon lui, l’Inde est la source de la richesse et les capital gains doivent être prélevés à la source. Sunil Mitra vient, lui, dire aujourd’hui que rien n’a changé en vertu du traité et que les capital gains continueront à être imposables à Maurice où le taux est de zéro. Même le Wall Street Journal américain cite d’autres officiels indiens pour dire qu’aucune renégociation n’est à l’agenda.

La presse, le fisc et une partie des parlementaires indiens sont surpris par cette question de capital gains qui est de zéro à Maurice. Ils arguent que les investisseurs étrangers se font une fortune en ne payant rien comme impôt. Ils sont également étonnés par l’idée que des Indiens puissent détourner de l’argent de leur pays, le placer dans l’offshore mauricien, l’y accumuler, ou le retourner en Inde, sous couvert d’investissements.

Dans le deuxième cas il s’agit d’une fraude et c’est aux autorités indiennes de le prévenir. Maurice aide à chaque fois qu’elle est sollicitée en fournissant des informations et même des informations bancaires. Pour ce qui est du premier argument à l’effet que les investisseurs sont exemptés de taxe, il faut se dire que quelque part ses investisseurs payent quelque chose, par exemple à la sortie des capitaux de leurs pays d’origine. Ensuite, les Indiens mal à l’aise doivent se dire qu’on ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre. En l’occurrence, des investissements par milliards plus les impôts.

Pour le président de l’ATMC une menace plus sérieuse pour l’offshore mauricien pourrait venir du Direct Tax Code en préparation au Parlement indien. Ce projet de loi pourrait remettre en cause quelques-uns des avantages de l’offshore mauricien en réclamant plus de substance des compagnies enregistrées dans la juridiction mauricienne. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi. Mais tout viendra dans l’interprétation de la loi et cela pourrait donner lieu à de nombreuses tracasseries.

« Nous avons déjà fait un dossier où nous montrons les problèmes qui pourraient surgir avec le Direct Tax Code car ce code pourrait override le traité actuel et ce n’est pas bon pour Maurice », déclare Kamal Hawabhay. Le dossier de l’ATMC à ce sujet a déjà été déposé auprès du comité parlementaire indien chargé de piloter le DTC. Maintenant l’ATMC attend de déposer physiquement devant le comité et cela devrait se faire assez vite.

Pour ce qui est de la débandade sur le marché indien hier, lundi 20 juin, Kamal Hawabhay estime que la spéculation sur la renégociation du traité a pu être une étincelle dans un environnement où le marché indien est déjà très nerveux. Il ne se passe pas une semaine sans qu’un scandale n’éclabousse la finance ou la politique indienne. Dans un marché normal, la rumeur de renégociation n’aurait peut-être pas eu une telle ampleur. La Bourse indienne a décroché de 2 à 3 % dans une seule journée. Ce qui est considérable.

En même temps, ces événements sont peut-être une bénédiction déguisée car cela a pu amener les autorités indiennes à réfléchir. Si la simple rumeur d’une renégociation a pu causer de tels dégâts, que se passera-t-il si on touche vraiment au traité fiscal entre l’Inde et Maurice ? Port-Louis est le principal conduit d’investissement étranger en Inde depuis ces dix dernières années. L’offshore mauricien a dirigé 55 milliards de dollars d’investissements étrangers en Inde.